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Arts et culture

Blogues Culturels : Ottawa Showbox, Apt 613, Photogmusic et Herd Magazine

Web-Rotonde
9 avril 2015

– Par Didier Pilon –

Ottawa Showbox

Comme bien des blogues artistiques de la région, Ottawa Showbox est dans un certain sens né des cendres de l’hebdomadaire Ottawa Xpress. Alors que le fondateur du blogue, Mathias Munoz, aménageait à Ottawa, il n’a pu s’empêcher de constater un vide dans la scène artistique. « À l’époque où l’Xpress venait de publier sa dernière édition, j’étais frustré par le manque de couverture que recevait la scène musicale », confie l’entrepreneur. « Certes, le Citizen publie quelques rubriques ici et là, mais j’ai commencé ce blogue pour pouvoir creuser plus en profondeur ».

La formule était simple, mais efficace : Munoz allait voir des spectacles de musiciens de la région, parlait aux musiciens et rapportait les événements sur son blogue. Du journalisme populaire dans sa forme la plus pure. Ses articles commentaient autant sur la scène punk que la scène folk, pop et électro. « À peu près un an plus tard, j’ai reçu un courriel particulièrement formel d’un étudiant en journalisme, Éric Scharf, qui tenait absolument à contribuer au blogue », raconte Monuz. « Avec son arrivée, et celle de son ami Joseph Mathieu, le blogue a pu diversifier ses propos, grâce en partie à la présence de deux Franco-Ontariens ».

Depuis, Ottawa Showbox est devenu la source par excellence pour tout ce qui concerne la musique d’Ottawa. Nul autre n’arrive à égaler la profondeur avec laquelle il présente la communauté musicale. Par exemple, il a réussi l’exploit de cataloguer l’inventaire des albums produits par des groupes d’Ottawa en 2014, une liste qui a grandement servi à rapport d’Andrew Vincent et d’Ian Swain, Connecting Ottawa Music. Il a aussi créé une carte interactive d’Ottawa qui montre tous les lieux musicaux de la ville.

Autre que ces grands projets, le blogue se divise en cinq sections : concerts à venir, critiques, entrevues, nouveautés et chroniques. Alors que les chroniques « Thirsty Thursdays » associent des listes d’écoute aux bières ottaviennes, des musiciens racontent leur expérience à des concerts passés pour les chroniques « Throwback Thursdays ». Il est aussi possible d’écouter une panoplie d’albums et de visionner des vidéoclips.

Le but de Showbox a toujours été de promouvoir la musique de la région. Mais maintenant qu’il a plus de moyens et d’influence, il arrive à diversifier ses méthodes. En plus d’avoir forgé des partenariats avec des festivals de la région tels que Megaphono, Arboretum et Folk It All, il organise aussi des concerts au Mugshots les troisièmes vendredis du mois.

 

Photogmusic

Contrairement à Showbox et à Apt613, nul ne trouvera de longues descriptions des artistes de la région sur le blogue Photogmusic. En effet, le blogue se présente comme un catalogue des intérêts de son créateur, le photographe ottavien de renommée grandissante, Ming Wu. De nature volontairement informelle, les images racontent la semaine du photographe, revisitant ses sorties les plus récentes. Toutefois, si ce blogue demeure toujours si pertinent, c’est que Wu vie au cœur de la scène musicale.

Semaine après semaine, caméra autour du cou, Ming Wu se promène de scène en scène, baignant dans la musique d’Ottawa et d’ailleurs. Après un événement, alors que les autres journalistes rentrent rédiger leur article, Wu a toujours un deuxième ou troisième événement à découvrir et couvrir. Par exemple, après avoir documenté le nouveau festival Folk It All au Rainbow Bistro, Wu s’est rendu au Makers Space pour prendre des photos du party audiovisuel, Kosmic Apollo. Lors de la première édition d’un festival en son honneur l’automne dernier (WuFest), une blague circulait à savoir s’il allait rester toute la soirée ou s’excuser pour aller couvrir d’autres événements. Outre les groupes de la région, Wu partage aussi ses photos des grands noms du monde indie, tels que Arcade Fire, Grimes et, plus récemment, Patrick Watson. Ses photos de la toujours joviale Lisa Leblanc au Record Centre cap- turent avec justesse l’intimité de sa performance.

En plus des photos, Ming Wu présente aussi un palmarès de ses albums préférés avec quelques pistes intégrées. Actuellement, cette liste inclut entre autres des artistes tels que les Hilotrons, Anna Mayberry ainsi que la chanteuse blues-folk ottavienne, Catriona Sturton. Toutes les semaines, le blogue recommande aussi cinq chansons dans le cadre de la chronique « Top 5 Songs of the Week » et affiche la bande intégrale de l’émission de radio, No Filter.

 

Apartment 613

L’hebdomadaire culturel OttawaXpress existait toujours en 2009, mais il commençait à se faire mince. Un groupe d’amis a ainsi constaté que la communauté artistique d’Ottawa devenait de moins en moins accessible. Quoiqu’il y ait une gamme hétéroclite d’activités culturelles un peu partout dans la région, rester à l’affût de la programmation (parfois mal publicisée) de tous les bars, salles de concert et galeries d’art était en soi un emploi à temps plein. La communauté se ralliait ainsi derrière les événements à gros budget – Blues- fest, Folkfest, Bal de neige, etc. – au détriment des soirées plus discrètes. Apt 613 s’est donné comme mission de combler cette lacune.

Fondé au modèle de la radio communautaire, Apt 613 est la création de cinq personnes de parcours et de vocations différents. Alors qu’Althia Raj était déjà journaliste pour CTV et que Ryan Saxby Hill maintenait un blogue personnel, Katrina Marsh, Karen Diepeveen et François Levesque avaient peu d’expérience avec les médias. Toutefois, ayant tous vécu à Halifax à un moment ou un autre, ils partageaient une admiration de l’hebdomadaire culturel d’Halifax The Coast et ressentaient la nécessité de recréer quelque chose du genre à Ottawa.

Le blogue a d’abord plongé dans les événements plus obscurs. Plutôt que de couvrir Bluesfest, il couvre le festival Fringe et, plus tard, Arboretum. Plutôt que de fréquenter le Centre national des Arts, il fréquente les petites productions théâtrales dans les parcs et les théâtres communautaires d’Ottawa. Depuis, leur programmation s’est diversifiée, mais garde un penchant pour l’inédit, tel les cafés à jeux de société et les microbrasseries de la région. Dans les dernières années, une alliance s’est aussi forgée entre le blogue et la radio communautaire de l’Université d’Ottawa. L’émission de radio Basement 819, actuellement animée par Cindy Savard et Éric Barrette, s’est vouée d’« explorer le sous-sol culturel d’Ottawa-Gatineau » en français. En plus de le faire sur les antennes de CHUO, il publie leurs podcasts, leurs recensions d’événements et leurs critiques artistiques sur le blogue.

Apt 613 est d’abord et avant tout connu pour son calendrier culturel détaillé. Ce calendrier a bien sûr bien évolué au cours des cinq années du blogue. À ses débuts, les membres du groupe exploraient eux-mêmes les ressources à leur disposition : pages d’événement Facebook, les affiches publicitaires sur les lampadaires de la ville, d’autres blogues, etc. Depuis les deux dernières années, les gens peuvent soumettre leurs propres événements. Toutefois, à l’encontre de bien d’autres blogues du genre, un conservateur doit donner son approbation avant que l’événement figure sur le site web.

 

Herd Magazine

Le blogue internet de Herd Mag prend une approche particulière au journalisme : il publie longuement, mais rarement. Dans le dernier mois, le blogue n’a vu paraitre qu’une demi-douzaine d’articles. La publication papier, aussi clairsemée, ne parait que quatre fois par année. Mais où d’autre trouver l’intégral d’une interview de 1500 à 2000 mots qui explore la vie et l’art d’un groupe indie à la première personne dans un flux de conscience imagé? Où dénicher une séance de photos artistiques de sacs à main, étalée sur une dizaine de pages au centre d’un magazine?

Herd encourage ouvertement ses auteurs (à ne pas dire « journalistes ») à prendre une licence artistique qui effrayerait sans doute les médias plus mainstream. Au lieu de présenter une simple analyse, l’auteur-artiste raconte son expérience et ses réactions face à l’art dont il traite. Plutôt qu’une prétention d’objectivité, les sujets se manifestent et ressortent des textes. Il en résulte le double rôle du magazine : en parlant de l’art, le magazine crée de l’art.

Cette dimension de création artistique est d’autant plus évidente dans la publication papier. En plus d’inclure des photos et des dessins de haute qualité avec chaque article, une section d’une quinzaine de pages est réservée à la fin pour mettre en vedette des œuvres d’art.

Ce style a ses mérites et ses limites. Les lecteurs qui cherchent à savoir ce qu’était un événement vont sans doute se perdre dans les narrations loquaces et parfois redondantes. Mais cette critique semble manquer la marque. À vrai dire, c’est que Herd ne raconte que rarement ce qu’était tel ou tel événement. Il raconte plutôt ce qu’était l’expérience de telle personne ou tel artiste, lorsque confronté à l’événement. Certes, ce n’est pas une formule grand public, mais elle mérite tout de même sa niche.

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