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Éditorial

Héritières du suffrage, leaders de demain

Web-Rotonde
13 mars 2017

Éditorial

Par Frédérique Mazerolle — rédactrice en chef

Comme vous le savez bien, chers lecteurs et chères lectrices, le 8 mars est une journée bien spéciale pour la gent féminine. La Journée internationale des droits des femmes : une journée qui est dédiée aux femmes, de tous âges et de toutes formes, où l’on célèbre leurs exploits et leurs aspirations. Mais attention, une journée seulement. Comme une vente à ne pas manquer, mais qu’on oublie assez rapidement. 

Il ne faut pas se le cacher, après avoir publié votre statut ou votre gazouillis sur les médias sociaux concernant l’importance des femmes dans votre vie, comme votre maman ou votre copine, vous êtes surement passé.e à autre chose. Après 24 heures bien méritées, les femmes sont encouragées à retourner au traintrain quotidien, sans bruits et sans soucis. Après le 8 mars, on ne veut plus entendre les femmes crier à l’injustice.

Certes, plusieurs continuent de s’indigner quant au manque de représentation des femmes au sein des instances législatives. Avec raison, lorsqu’on constate qu’en Nouvelle-Écosse, seulement 15  des 51 député.e.s sont des femmes. En Ontario, la situation s’améliore, avec 30 député.e.s sur un total de 57 membres parlementaires. Cependant, au niveau de la diversité, seulement deux d’entre elles sont des femmes de couleur.   

Avec la Journée internationale de la femme qui semble se fondre dans le décor, s’effaçant tranquillement du quotidien, il est donc nécessaire de se rappeler que la guerre n’est certainement pas gagnée. Ne soyez pas berné.e.s, les cris des manifestant.e.s féministes sont bien plus forts que le lourd silence que tente d’imposer le patriarcat et la misogynie.

Que du chemin parcouru … et à parcourir

Par contre, qu’arrive-t-il quand on donne le micro aux femmes,  plus exactement à 338 jeunes femmes venant d’un bout à l’autre du pays, pour les laisser parler d’enjeux sociopolitiques, économiques et légaux, l’espace de quelques heures dans la Chambre des communes?

Certainement, un paysage rafraichissant, quand l’on considère que seulement 88 femmes y siègent présentement.

Plus encore, ça donne quelque chose comme les Héritières du suffrage, une initiative de l’organisation À Voix Égales, où l’on encourage les femmes à faire leur place dans la joute politique.

Ça donne des jeunes femmes qui représentent le rêve, la révolte, la relève de demain.

Loin de ressembler aux débats loufoques d’une simulation parlementaire à la sauce uottavienne, les jeunes femmes qui ont été invitées à prendre la place du ou de la député.e de leur circonscription et à discuter des causes qui leur tiennent à coeur l’ont fait avec éloquence, tact et surtout avec respect. Un exemple qui ne peut certainement pas être applicable aux député.e.s qui siègent normalement à la Chambre des communes, où le chahut est toujours en vogue.

La question se pose : que pouvons-nous en conclure, suite à cette journée historique où il y avait plus de femmes réunies en une seule journée dans la Chambre des communes que dans toute la jeune existence du Canada?

Qu’il reste encore beaucoup de travail sur la planche de l’égalité des sexes.

La place de la femme est dans la Chambre… des communes

Que ce soit dans les bancs de la Chambre des communes ou à la table de n’importe quel conseil exécutif, il va sans dire que la parité entre les sexes n’est pas un défi atteint partout. Certes, des efforts ont été faits dans les dernières années, comme l’annonce pro-féministe du premier ministre, Justin Trudeau, qui déclarait en 2015 que le Cabinet des ministres allait être constitué d’un nombre égal de femmes et d’hommes. Woo hoo, c’est gagné, on peut retourner se coucher.

Pourtant, on ne peut pas ignorer que plusieurs problèmes liés à la parité entre les sexes semblent être ici pour rester et qu’il existe des questions bien taboues, même dans la Chambre des communes. Certains de ses problèmes persistent et deviennent des bâtons dans les roues de plusieurs femmes, particulièrement celles marginalisées en raison de leur culture, leur religion, leurs habilités physiques et/ou mentales et leur orientation sexuelle.

Cependant, à l’occasion de l’évènement du 8 mars dernier, les jeunes député.e.s d’un jour ont eu la chance d’en parler ouvertement. De parler sans reproches et surtout sans interruption.

Parler du taux élevé de suicides dans leurs communautés éloignées, trop éloignées pour que le gouvernement lève le petit doigt. Parler des difficultés linguistiques des francophones et francophiles d’ici et d’ailleurs, qui doivent surmonter les murs dressés par des lois et des préjugés obsolètes. Parler d’islamophobie et comment celle-ci est plus vivante que jamais, même dans un pays qui prône constamment son amour pour le multiculturalisme.

De parler avec passion. De parler avec franchise. De parler avec conviction.

Bien que cet évènement n’ait duré que 24 heures, l’héritage que portent maintenant ces jeunes femmes ayant participé à celui-ci nous montre que la place de la femme est bien dans la Chambre des communes. Reste maintenant à savoir si l’on sera prêt.e.s à les écouter, et ce, 365 jours par année.

Sur ce, laissons donc de côté l’idée que « derrière chaque grand homme se trouve une femme pour le soutenir ». On peut maintenant dire avec fierté que derrière chaque grande femme s’en trouvent 337 autres, tout aussi brillantes qu’elle. 

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