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Entrevue avec Allan Rock : «Je vais accepter les dons de gens de bonne foi»

Web-Rotonde
7 avril 2014

arock– Par Marc-André Bonneau et Sara Ghalia –

Fidèle à la tradition, La Rotonde s’est entretenue avec Allan Rock, recteur de l’Université d’Ottawa (U d’O). Le mandat de grève du Syndicat des étudiant.e.s employé.e.s de l’U d’O (SCFP 2626), le financement de l’U d’O et la culture du viol ont été les principaux thèmes abordés. Porteur d’espoir, M. Rock nous souhaite bonne chance dans nos revendications estudiantines et sociétales.

La Rotonde : Le Syndicat SCFP 2626 vient de voter un mandat de grève et critique l’U d’O de tarder à leur donner plusieurs documents importants. Qu’en pensez-vous?
Allan Rock : Je suis heureux que les négociations continuent et nous sommes encouragés par les discussions, mais je n’ai pas l’intention de commenter les déclarations du Syndicat. Je peux simplement vous assurer que l’Université est déterminée à arriver à une entente par l’entremise de négociations de bonne foi. Nous sommes à la table, prêts à discuter les enjeux. […] On va continuer jusqu’à la fin pour arriver à une entente qui est juste pour les employés et pour l’institution.

LR : Nous avons été surpris d’apprendre dernièrement qu’il y a très peu de règles entourant certaines donations que l’U d’O reçoit, notamment venant de l’industrie minière. Est-ce un problème?
AR : C’est surprenant que vous disiez qu’on n’ait pas plus de règles pour savoir comment on peut utiliser l’argent, parce que c’est quelque chose dont nous sommes très fiers. Souvent des universités se retrouvent en difficulté à cause du fait qu’elles acceptent de l’argent d’un donateur qui impose comment l’argent va être utilisé, tel que quels sujets seront inclus ou exclus de l’enseignement. Dans le cas du don de M. Telfer, cela a été très simple. Voilà l’argent, faites de notre Faculté de gestion la meilleure Faculté qu’on puisse imaginer, nous a dit ce dernier. Et c’est cela qu’on est en train de faire. Le doyen peut vous donner les détails concernant la manière dont l’argent a été investi.

LR : Mais si les donations étaient encadrées dans une entente formelle et publique, cela ne réduirait-il pas les risques de conflits d’intérêts?
AR : Nous avons maintenant rendu public ce que nous avons concernant ce don [de 25 millions]. C’est clair que l’argent n’est pas restreint avec des conditions qui exigent que les chercheurs ou les universitaires se préoccupent seulement de certaines questions. Mais cela fait près de six ans que le don a été fait, vous êtes maintenant en position de juger si oui ou non, l’argent a été utilisé de façon inappropriée. […] On entend souvent des plaintes concernant la hausse des frais de scolarité, et nous avons été cherchés d’autres sources de financement. Sans la philanthropie, la pression financière serait pire qu’aujourd’hui. Il faut choisir : frais de scolarité ou générosité des donateurs.

LR : Ne croyez-vous pas que ça serait mieux si l’industrie payait davantage d’impôts et que le gouvernement finançait l’institution dans un deuxième temps, pour préserver sa liberté universitaire?
AR : Maintenant, on parle de choix de société. Franchement, je suis heureux d’entendre que vous êtes intéressés dans de tels changements. Vous avez le temps. Moi, j’ai 66 ans maintenant. J’ai fait mon dix ans en politique. J’ai terminé tout ça et je suis maintenant un universitaire. Je n’ai pas le 25, le 30 ans nécessaire pour mettre en place les changements dont vous avez parlé. Je vous souhaite bonne chance. Je suis d’accord, je préférerai avoir du financement à cent pour cent public pour l’Université, mais je ne m’attends pas à ce que cela soit en place avant mon départ comme recteur. Je vous souhaite bonne chance et j’espère que vous allez réussir. Entre temps, je vais accepter les dons des gens de bonne foi qui voudraient améliorer l’Université avec leur argent au bénéfice des étudiants.

LR : L’Université pourrait toutefois militer pour cette nouvelle façon de financer l’institution publique. On pourrait rassembler la communauté étudiante et les décideurs pour qu’on mette de l’avant de tels changements, ne croyez-vous pas?
AR : Je suis régulièrement à Toronto pour essayer de convaincre le gouvernement d’augmenter le niveau de financement pour les universités et je vais continuer dans ce sens-là jusqu’à la fin.

LR : Suite à la création de groupes de travail après les événements qui ont soulevé ce qu’on a appelé la culture du viol, croyez-vous que ceux-ci pourraient influencer le déroulement de la prochaine semaine 101? Elle a souvent été critiquée à cause du type d’activités ou des slogans à caractère sexuel utilisés.
AR : C’est la première fois que j’entends qu’il y a des problèmes et des enjeux avec la semaine 101, qui est organisée par la Fédération des étudiants de l’U d’O [FÉUO]. Si on a des problèmes, j’espère que la FÉUO va les corriger. Entre temps, je peux vous dire que nous avons mis en place un groupe de travail pour examiner la manière dont nous pouvons renforcer une culture de respect sur le campus. Je n’ai jamais accepté que nous ayons une culture du viol à l’U d’O. Ce que je reconnais, c’est qu’on a un problème de société qui banalise la violence sexuelle faite aux femmes. […] Les universités sont les microcosmes de la société.

LR : Pourquoi cela a été aussi long avant qu’on voit cette initiative sur notre campus?
AR : Ce n’était pas longtemps après les événements, mais c’était longtemps après 1848, lorsque nous avons fondé l’Université. […] Pour la première fois depuis 1848, deux choses comme ça sont arrivées rapidement et nous ont incités à créer un tel groupe de travail.

LR : D’autres recommandations ont été émises par des étudiantes, telles que la création d’un centre de recours pour les victimes. Pensez-vous qu’elles pourraient être adoptées?
AR : J’ai envoyé au groupe de travail les huit recommandations qui ont été mises sur la table la semaine même de la création du groupe de travail. J’ai demandé au groupe d’examiner ces recommandations et d’examiner s’il faut aller de l’avant avec chacune d’entre elles.

LR : Un ancien joueur de l’équipe de hockey masculine, M. Pat Burns, vous a écrit pour critiquer votre gestion de la crise, soulignant qu’il a été mis de côté malgré qu’il ait dénoncé l’inconduite. Que lui répondez-vous?
AR : J’ai répondu que nous n’avons pas l’intention de lever la suspension jusqu’à la fin de l’enquête. L’enquête a deux dimensions. Premièrement, sur les événements de la soirée à Thunder Bay. Deuxièmement, sur la manière dont on gère le programme de hockey, quels sont les principes de base, les règles de comportement? […] Jusqu’à ce qu’on aille de l’avant avec un encadrement amélioré, la suspension va rester en place. […] Dommage pour M. Burns, mais la chose la plus importante, c’est de mettre en place les règles du jeu et d’exprimer clairement nos attentes envers nos joueurs lorsqu’ils sont à l’extérieur pour représenter notre institution.

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