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Sports et bien-être

James Derouin : tranformer le basket en art

Web-Rotonde
8 décembre 2014

– Par Moussa Sangaré-Ponce –

James Derouin a changé le basketball à l’Université d’Ottawa (U d’O), transformant l’équipe en une des meilleures au Canada. Sa philosophie offensive et une tendance à recruter les meilleurs joueurs du secondaire, année après année, permettent à beaucoup de démontrer pleinement leur talent lorsqu’ils sont sur le terrain. Il est même possible de dire que Derouin est le troisième meilleur entraineur-chef au Canada. Cette année, si Ottawa peut gagner pour une deuxième année consécutive la coupe Wilson (décernée au gagnant des Sports universitaires de l’Ontario), et s’il peut également remporter un premier championnat du Sport interuniversitaire canadien (SIC), Derouin pourrait être considéré comme le meilleur entraineur au niveau universitaire et deuxième meilleur entraineur au Canada après Dwane Casey, l’entraineur-chef des Raptors de Toronto.

Qu’est-ce qui fait de Derouin un si bon entraineur? Sa connaissance et passion pour le basketball? Le fait qu’il soit un homme très motivant? Oui, mais l’un de ses grands atouts est qu’il est capable de s’identifier avec les joueurs. Quand il recrute, il insiste sur la compréhension de la réalité des jeunes basketteurs. « Il était un peu jeune quand il m’a recruté. Il paraissait comme un coach terre à terre. Il comprenait ce qu’on faisait dans nos vies à ce point. Il ne faisait pas mine de rien, il savait ce qui ce passait, c’était cool et c’est pourquoi j’ai choisi [Ottawa]. Honnêtement, il n’a pas changé, c’est un meilleur coach, mais il est fidèle à la même attitude que lorsqu’il m’a recruté », partage Vikas Gill, joueur de quatrième année pour les Gee-Gees.

Pour les joueurs, c’est bien plus qu’un entraineur, c’est un ami, un membre de la famille. La compassion de Derouin va par contre au-delà du basketball, elle s’applique également à l’école et à la vie. Ce lien formé au fil du temps a un impact sur le terrain. « Quand tu déçois ton coach, tu déçois aussi ton ami, c’est pour ça qu’on joue plus fort pour lui », souligne Gill. Bien que joueurs et entraineur soient très proches sur et en dehors du terrain, Derouin ne laisse pas leurs relations affecter la qualité du basketball à Ottawa. « Il sait [quand] il doit être un coach et quand être un ami. Il dessine une très bonne ligne entre les deux et une bonne partie de notre succès est dû à ça parce qu’on peut aller lui parler de n’importe quoi dans la vie, ce qui est gros », dit Gill.

Changer la culture

« Il m’a dit qu’à ma deuxième année, les Gee-Gees seraient en position de remporter l’or », se souvient Gill. Lorsque Derouin est devenu entraineur-chef en 2010, il n’avait qu’un seul but : que le programme de basketball masculin soit en position à chaque année de gagner le championnat national. Bien que remporter le championnat soit la seule chose qui lui reste à faire comme entraineur, Derouin a tout de même accompli son but. Après deux éliminations lors des séries des SUO, lors de la saison 2012-2013, l’équipe a finalement pu se rendre aux championnats du SIC où elle a remporté le bronze contre Acadia. L’année dernière le Gris et Grenat a remporté la coupe Wilson, décernée aux champions des SUO et s’est rendu jusqu’en finale du championnat. Selon Berhanemeskel : « Il a beaucoup changé la culture. Notre fiche s’est améliorée énormément à chaque année avec lui ».

Viser l’excellence

Depuis trois saisons, Ottawa remporte presque tous ses matchs avec des grands écarts de points. Derouin pousse ses joueurs lors des pratiques tout en trouvant l’équilibre parfait entre apprentissage et compétition. L’entraineur s’assure aussi que ses joueurs puissent s’entrainer quand ils veulent. « Il est toujours là quand on veut aller dans le gymnase, regarder des vidéos ou aller dans la salle de conditionnement physique », souligne Berhanemeskel.

Bien que les Gee-Gees remportent la majorité de leurs matchs, Derouin trouve toujours une façon de pousser ses joueurs pour qu’ils continuent de s’améliorer. « Quand on gagne de beaucoup, il devient fâché pour pas qu’on se contente [du résultat] et quand [le match] est proche, il ne se fâche jamais. Tu ne peux pas avoir de mauvaises habitudes. Il préfère que l’on gagne par huit et qu’on ait bien joué défensivement », mentionne Gill. Après une défaite, il ne se fâche pas contre ses joueurs. À la place, il se concentre sur les erreurs et sur comment les rectifier. Malgré le fait qu’Ottawa ait une des offensives les plus explosives au pays, il y a énormément d’attention placée sur le côté défensif du jeu. « Il avoue qu’il n’était pas le meilleur joueur offensif. C’est pour ça qu’il se fâche pour une mauvaise défensive, parce qu’il était un joueur défensif », dit Gill.

Recrutement

Même s’ils sont une puissance nationale, les Gee-Gees ne reçoivent pas le soutien qu’ils méritent, que se soit financièrement ou de la part des partisans. Cela n’a tout de même pas empêché Derouin de convaincre d’excellents joueurs de choisir l’Université d’Ottawa. Lorsqu’il était au secondaire, Mike L’Africain était vu comme l’un des meilleurs gardes au pays, ayant joué contre et avec certaines étoiles du basketball canadien comme Andrew Wiggins et Nik Stauskas. L’année dernière, Derouin a convaincu Terry Thomas de rejoindre les rangs du Gris et Grenat et le Néo-Écossais a eu une saison historique qui s’est terminée avec une médaille d’argent du SIC. Cette année, il a aussi réussi à recruter Alex Ratté qui était le troisième meilleur marqueur du SIC l’an dernier. Derouin n’a pas seulement démontré une habileté constante pour recruter des étoiles, mais également de recruter des joueurs de soutien. En regardant les matchs d’Ottawa, on peut voir que le groupe de troisièmes années, notamment Moe Ismail, Matt Plunkett, Matt Nelson et Mehdi Tihani, est constitués de joueurs supérieurs à certains partants d’autres équipes du SUO. En ajoutant Caleb Agada, qui est maintenant dans la formation partante, ou Ratté, le banc d’Ottawa serait une des meilleures équipes dans d’autres conférences du SIC.

Même si les gens ne sont pas surpris du succès qu’Ottawa connait en recrutant, Derouin surprend encore l’équipe. Vikas Gill raconte : « N’ayant pas les mêmes installations ou montant d’argent que les autres écoles ont, le fait qu’il a les meilleures recrues presque chaque année, je me demande comment il le fait. En plus, il n’y a pas beaucoup de temps de jeu pour eux ».

Toujours dans le basket

Certaines personnes ont des différentes personnalités au travail et à la maison. Qu’il soit dans son bureau à Montpetit ou dans sa maison dans un quartier résidentiel près du centre-ville, James Derouin est toujours en train de penser au basket. « Les conversations qu’il a au téléphone avec ses amis, c’est comme une autre langue. Essayer de tout comprendre ce qu’il dit est un peu un défi », partage son épouse Jenna Derouin. Comme il lui parle constamment de ses joueurs, Mme Derouin se sent d’une certaine façon comme leur mère. « Je sens comme si je connais les gars en long et en large parce que ce sont comme ses enfants. C’est tout ce dont il parle ». Certains penseraient que toujours entendre parler de basketball serait monotone, voire agaçant, mais Mme Derouin comprend et admire la passion que son époux a pour le sport et pour son équipe. Elle ne s’en lasse pas puisque pour elle, c’est « remarquable de le voir transformer ce sport en un art ».

Lorsque la saison commence, elle estime que Derouin passe 80 % de son temps à faire quelque chose relié au basket et 20 % de son temps à la maison. Ils trouvent tout de même du temps à passer ensemble. « Lundi, c’est la journée où il est à la maison pour souper. Quand ils sont sur la route ils partent le jeudi et rentrent dimanche », affirme Mme Derouin. Elle ajoute en riant que, sans le basket, son mari serait un peu perdu. « C’est une transition pour lui ne sachant pas quoi faire avec un peu plus de temps libre. Même durant la saison morte, il s’implique avec les gars. Mais même durant son temps libre, il regarde des matchs, ils les [enregistre], les avance et il fait du rembobinage. C’est frustrant regarder les matchs lorsqu’il a l’ordinateur et la télé sur un écran double en regardant deux matchs », mentionne-t-elle.

Respect et admiration

De Warren Ward à Johnny Berhanemeskel en passant par Terry Thomas, Derouin a eu la chance d’entrainer et former des amitiés avec des joueurs qui ont eu des saisons et carrières historiques pour le programme. Il a aussi recruté la future étoile du basketball à l’U d’O, Caleb Agada. Tout de même, Ward était déjà là quand il est arrivé et Agada a encore trois saisons à jouer. Berhanemeskel a joué sous Derouin pendant ses cinq années pour le Gris et Grenat, quelque chose qu’il tient à cœur. « Être avec lui de ma première année [à aujourd’hui] c’est spécial parce qu’on peut se voir grandir en tant que joueur et en tant que personne. De voir d’où on est venu s’est gratifiant et là on veut voir si on peut franchir la dernière étape ensemble », mentionne Berhanemeskel.

Chic

James Derouin est non seulement connu pour avoir bâti un programme élite, mais également pour avoir un style impeccable. En demandant à ses joueurs où leur entraineur a appris à si bien s’habiller, ils ne peuvent que rigoler. « Je ne sais pas! Tout ce qu’on remarque c’est que quand il enlève son manteau, on va se faire crier dessus. Notre but est qu’il garde le manteau le plus longtemps possible », dit Vikas Gill. Bien que personne ne sache où et comment James Derouin a appris à si bien se vêtir, c’est sa femme qui lui donne la permission de porter ses habits. « Je lui donne le [feu vert] avant qu’il sorte de la maison », explique-t-elle.

Autre passion

Le basketball est sans aucun doute la passion de Derouin. Tout de même il y a une chose qu’il aime plus que ce sport : sa chienne Lilly. Jenna Derouin raconte qu’il ferait tout pour la rétrieveur, qui est une véritable source de joie. Selon son épouse, « Lilly tire les ficelles de son cœur ».

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