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Arts et culture

La Rotonde sur la route

Culture
30 octobre 2017

Par Gabrielle Lemire Cheffe Arts et culture

Voyage au Lac St-Jean

 

Le voyage, c’est devenir nomade pour quelques jours et laisser son quotidien et son égo de côté pour aller à la rencontre des gens. En voyage, tout est permis, que ce soit de goûter aux produits de toutes les fromageries de la région ou de  troquer quelques heures de sommeil pour écrire son carnet de voyage; on part sans culpabilité et on revient le coeur léger. Zoom sur la région du Saguenay Lac St-Jean.

 

En voiture!

Sur mon billet de train, il est marqué Évasion. La mienne est prévue pour 16h10, où les portes du train se fermeront pour laisser filer le 28 Via Rail jusqu’à la capitale de la Belle Province. À 15h30, je suis encore dans ma salle d’examen: mon stylo bille patine à toute vitesse pour compléter la dernière question, seule étape à franchir avant le départ. À 16h08, je m’installe de justesse à côté de ma compagne de voyage dans le wagon 4, prête pour le départ. Le train quitte la gare pour Québec.

Quelques minutes plus tard, des deux côtés des rails, les champs de maïs de l’Est ontarien côtoient les graffitis caractéristiques des gares québécoises. Les pâtés de maisons défilent à toute allure alors que les enfants des villages agitent la main sur notre passage. Arrêtée près de l’aéroport de Dorval, j’admire les avions qui décollent dans le soleil couchant teinté de rose et de violet.
Quelques heures plus tard, le train s’immobilise à la gare de Charny: un train de marchandises bloque la route. Il faudra attendre trois quarts d’heure avant qu’une âme charitable vienne nous chercher.

 

L’île d’Orléans
L’île d’Orléans, loin des cheminées du secteur industriel de Québec, constitue la destination rêvée pour la cueillette de pommes tardive. Le microclimat de l’île permet la récolte de tous les fruits inimaginables beaucoup plus tard qu’ailleurs dans la région. Parmi les dizaines de producteurs de vin et de produits dérivés de la pomme, de la poire et de raisins pour n’en nommer que quelques-uns, se trouve le Domaine la source à Marguerite. Diane Dion, la propriétaire du domaine, explique que les raisins du Québec peuvent résister à des températures extrêmes qui frôlent les moins 40 degrés Celsius.

L’île D’Orléans se situe juste assez en altitude pour avoir une vue imprenable sur les minuscules villages de la région de Beau-Port. La route sinue entre les fermes familiales, les vergers et les gîtes du passant. Ici, la pureté de l’air frais est déstabilisante pour le voyageur urbain habitué au smog et aux sirènes des services d’urgence. Nul besoin de s’envoler pour l’Italie, rendez-vous à l’île d’Orléans pour visiter les vignobles aux propriétaires les plus accueillants les uns que les autres.

 

La descente aux conifères
Dans le Parc des Laurentides, la température est incroyablement imprévisible. David Larouche, un habitué du parc, affirme: « Ici, c’est tout le temps de la grêle, de la pluie, des grands vents, on ne sait jamais. » En l’espace d’une heure, le paysage passe d’un feuillage de feu à des arbres dénudés. Il faut croire que la fin octobre au parc des Laurentides sonne la victoire des conifères sur les feuillus. Sur le chemin du retour, une tempête de neige survient sans prévenir, donnant raison aux propos de Larouche.

Saguenay, ville étudiante
La ville de Saguenay est composée de quatre arrondissements, qui formaient indépendamment quatre villes distinctes avant leur union en 2002. Chicoutimi, un des quatre arrondissements, se considère la « virée urbaine » de la région. Véritable ville étudiante avec son université et son cégep, on peut y retrouver autant de friperies que de petits cafés équitables, notamment le café Cambio, une brûlerie locale et coopérative qui sert depuis 2005 des aliments frais et des cafés filtres en provenance de partout. Une ambiance moderne contraste avec le mobilier et le piano antiques, attirant les clients par dizaines.


À Jonquière, je me rends au Ici café Klimt, où les gens se regroupent pour jouer à des jeux de société. Dans le café aux vitraux représentant les oeuvres de Gustav Klimt, les clients sirotent des Valala: un breuvage de lait mousseux vaporisé à saveur de cannelle, d’érable, de biscuit et j’en passe. Le tout ne serait pas complet sans la montagne de crème fouettée saupoudrée de cannelle qui dépasse d’une dizaine de centimètres le haut de la tasse.

Le Fjord
La fierté des habitants du Saguenay, le Fjord, une étendue d’eau semblable au fleuve Saint-Laurent, mais en plus petit. Le Fjord accueille l’eau des rivières du Lac St-Jean pour se jeter dans l’océan. On peut y retrouver 60 espèces de poisson. Situé entre deux parois rocheuses, il est le seul de ce type en Amérique du Nord à être navigable. Son étendue dépasse les 100km, le classant parmi les plus longs au monde. Même en fin de mois d’octobre, les plus braves sortent toujours leur planche à voile pour naviguer les eaux et les vents forts caractéristiques du Fjord. 
Le tour du Lac
Le tour du Lac est un incontournable pour quiconque souhaite visiter la région, quelle que soit la saison. Pour commencer, je me hisse à l’observatoire du camp musical de Métabetchouan, la meilleure prise de vue du Lac St-Jean et de ses couchers de soleil.


Mashteuiatsh, joyau inattendu

 

Plus loin, à la communauté autochtone de Mashteuiatsh, j’arrête au carrefour d’accueil touristique, près du Musée amérindien. C’est sur le site que chaque été la communauté donne un Grand Rassemblement des Premières Nations, fête traditionnelle où des danseurs aux habits garnis de plumes dansent sur le rythme créé par les drummers. Ici, je rencontre par hasard une étudiante de l’Université d’Ottawa qui m’explique son terrain de recherche de thèse. Ses recherches en socio-linguistique visent à cerner le rôle du tourisme et de la valorisation des langues dans la construction identitaire des membres de la communauté de Mashteuiatsh. « Ça me permet de me confronter aux stéréotypes que les visiteurs étrangers ont des autochtones. Je vois leur conception de ce qui est authentique […] amérindien. » Préférant garder l’anonymat pour des raisons de confiance avec la communauté, celle-ci explique qu’elle doit rectifier humblement les croyances des touristes sur la réalité des Premières Nations d’aujourd’hui. Les étrangers entrent dans la communauté en espérant voir la culture traditionnelle telle qu’elle était il y a des centaines d’années. « Ce qui m’a le plus surprise, c’est les représentations (des stéréotypes très primaires) des visiteurs à l’égard des autochtones. » La chercheuse devient alors une ambassadrice de la culture des autochtones de Mashteuiatsh en plus de défendre leur dignité et leurs droits.


Desbiens
Pour la saison estivale, des centaines de touristes viennent visiter la Caverne du trou de la fée. Au bout d’un sentier pédestre rénové il y a quelques années, un guide remet de l’équipement d’escalade et une lampe frontale aux aventuriers qui souhaitent descendre dans l’antre où l’on peut retrouver une paroi en forme de fée, qui servait d’ange gardien aux jeunes hommes de Desbiens qui s’y cachaient pour ne pas avoir à s’enrôler lors de la Première Guerre mondiale.

Roberval
Avec environ 10 000 habitants, Roberval est la plus grande ville du Lac St-Jean. Experte en tourisme, Roberval propose en hiver un village sur glace. Chaque année, même les membres des médias installent leur cabane sur le lac gelé pour ne rien perdre de l’action. En été, Roberval est le point d’arrivée d’un événement digne des Olympiques: la traversée internationale du Lac St-Jean, qui attire nageurs en provenance de partout au monde. Ce parcours de 32 km est le fruit d’une idée folle de Martin Bédard, un citoyen de Roberval, qui a annoncé en 1950 qu’un jour, un homme traverserait à la nage l’immense étendue d’eau.

 

Coup de coeur

La chocolaterie des Pères Trappistes, Dolbeau-Mistassini

Après le calme d’une entrée de 500 mètres bordée d’arbres et d’étangs, j’arrive devant la chocolaterie dans un havre de paix. « Selon la règle de St-Benoît, les Pères doivent vivre du travail de leurs mains » indique Dominique Genest, le premier directeur général laïque de la chocolaterie. Celui-ci indique qu’« il faut vraiment que [l’activité] respecte leur quiétude et leur mode de vie. » Justement, les Pères trappistes ont toujours produit une quantité de chocolat assez importante pour subvenir à leurs simples besoins. Dans les dernières années, le nombre de visiteurs de la chocolaterie a augmenté de manière exponentielle pour atteindre un total de 20 000 visiteurs cet été. « C’est de l’artisanat de masse» affirme Genest en désignant les employés en pleine production des figurines de Pâques de l’an prochain. Après un accueil digne d’une reine, je repars avec un panier rempli de boîtes de chocolat.

La Rotonde aimerait adresser un merci particulier aux Pères trappistes de Dolbeau-Mistassini pour l’accueil chaleureux et le chocolat!

Malgré la fatigue, je reviens des souvenirs plein la tête et ma caméra pleine d’images de couchers de soleil.

 

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