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« L’Empire a-t-il un nom ? » | Lire Negri et Hardt dans le contexte canadien

Web-Rotonde
24 mars 2014

L'empire– Par Sinda Garziz –

La Chaire de recherche sur la francophonie et les politiques publiques, en collaboration avec l’École d’études politiques, a organisé mercredi dernier une conférence à la Faculté des sciences sociales de l’Université d’Ottawa, intitulée « L’Empire a-t-il un nom? ». Le conférencier Claude Couture, professeur titulaire au campus Saint-Jean de l’Université de l’Alberta, a présenté un essai critique portant sur la notion d’Empire du philosophe et homme politique italien Antonio Negri et sur celle du critique littéraire et théoricien politique américain Michael Hardt, à partir du contexte canadien.

Le professeur Couture a commencé son intervention en soulevant la problématique qui existe autour de la définition de la notion d’Empire. Ian Angus, professeur des sciences humaine à l’Université Simon Fraser, en Colombie-Britannique, discute dans son recueil d’essais intitulé The Undiscovered Country : Essays in Canadian Intellectual Culture des thèmes de l’identité, de la puissance et de la nation en s’appuyant sur la pensée philosophique contemporaine canadienne-anglaise. D’ailleurs, il définit l’Empire comme étant « une multitude globale non-localisée dans un lieu particulier et une société sans visage, où les communautés ont été détruites et ne sont pas ancrées en un endroit », cite M. Couture.
Par ailleurs, les thèses de Negri et Hardt se veulent une critique de la définition traditionnelle de l’Empire. Il existe deux caractéristiques fondamentales qui définissent l’Empire dans un monde moderne de nouvel ordre mondial et de globalisation. L’Empire serait représenté par la hiérarchie, avec des leaders tels que l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), le Groupe des huit (G8) , le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale (BM), ou bien par l’oligarchie, avec des ordres tels que l’Organisation des Nations unies (ONU) et des organisations non gouvernementales (ONG). Dans ce sens, l’Empire est global, sans lieu ni encrage géographique. D’un autre côté, cette définition insinue que l’Empire serait un ennemi terroriste, destructeur de la diversité, source de l’aliénation de l’homme et de la marchandisation de la vie humaine, a expliqué M. Couture.

M. Couture a également expliqué que de nos jours, l’Empire américain perpétue les valeurs que véhiculait l’Empire britannique en s’ingérant dans les politiques des autres pays.
Avec la montée de l’Empire américain, une redéfinition de la notion d’Empire s’impose, selon le professeur en sociologie de l’Université de Boston, Julien Go, dans son livre Patterns of Empire. Celui-ci suggère que « l’Empire a un visage, ce visage est américain et il est ancré dans l’exceptionnalisme américain, qui est de nier d’être un Empire ».
Ce dernier souligne que l’Empire américain considère que son champ d’implication est global et se donne le droit de décider ce qui est bien et ce qui ne l’est pas.

Suivant cette logique, M. Pierre Beaudet, professeur agrégé à l’École de développement international et mondialisation de l’Université d’Ottawa, explique « que l’Empire américain n’est pas en déclin, malgré toutes les crises qu’il a provoquées et qui l’ont touché. L’impérialisme de cet Empire reste par ailleurs impalpable car les crises qu’il a provoquées touchent tous les autres pays ».
M. Couture essaye de lier ces thèses au contexte canadien actuel. Selon lui, le Canada essaye à tout prix de s’opposer à l’Empire américain et se bat encore pour déconstruire la conflictualité qui émane de l’héritage colonial britannique et français. D’un côté les médias anglophones continueraient de véhiculer une supériorité morale qui nourrit l’approche ethnique chauvine contre les francophones. D’un autre côté et avec la Charte des valeurs québécoises, il y aurait une montée de l’héritage colonial français qui nourrit également des stéréotypes négatifs.

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