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Nouveau chancelier de l’U d’O : Rovinescu, est-il paré au décollage ?

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23 novembre 2015

Par Yasmine Medhi

Le 9 novembre, l’Université d’Ottawa (U d’O) a dévoilé l’identité de son quatorzième chancelier, Calin Rovinescu, PDG d’Air Canada. Pour bon nombre de commentateurs publics, la nomination semble témoigner d’un changement de cap pour l’Université. Avant même que la cérémonie d’installation officielle n’ait lieu, le nouveau chancelier aura déjà su créer la polémique. Retour sur les principales critiques qui font de Rovinescu un chancelier si controversé.

 QUI EST CALIN ROVINESCU?

Calin Rovinescu est le PDG d’Air Canada depuis 2009, ainsi que le président du Conseil de direction du réseau Star Alliance, et membre du Bureau des gouverneurs de l’Association du transport aérien international.

En avril 2014, sa prédecesseure, Michaëlle Jean, a préféré quitter ses fonctions après sa nomination à la tête de l’Organisation internationale de la francophonie. À l’époque, le recteur Allan Rock expliquait dans un communiqué : « Elle devra renoncer [à ses fonctions] en raison de l’ampleur de ses nouvelles responsabilités, ses fréquents déplacements et ses très nombreuses obligations. »

L’Université ne s’inquiète cependant pas des nombreuses occupations de son nouveau chancelier. « Nous sommes confiants que M. Rovinescu saura combiner son rôle de chancelier avec ses tâches professionnelles », explique Néomie Duval, gestionnaire des relations médias de l’U d’O.

De même, Air Canada appui la nomination de son dirigeant, comme l’indique dans un courriel Isabelle Arthur, chef de service aux relations avec les médias : « Le Conseil d’administration d’Air Canada appuie la décision de M. Rovinescu d’accepter cette nomination qui n’aura aucune incidence sur ses responsabilités. »

« EXCELLENT AMBASSADEUR BILINGUE » OU PRÉSIDENT DE « AIR ANGLO »?

Calin Rovinescu est « un excellent ambassadeur bilingue de l’Université ». C’est ce qu’a déclaré Robert Giroux, président du Bureau des gouverneurs, dans un communiqué du 9 novembre dernier. Le bilinguisme est en effet un critère clé de sélection du nouveau chancelier, comme il était inscrit sur le site de l’U d’O : « [Le nouveau chancelier] devra être capable de promou­voir les objec­tifs de l’Univer­sité et de la faire rayon­ner dans les deux commu­nau­tés linguis­tiques. »

Cette affirmation ne fait pas consensus. Le Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO) tient par exemple à pointer du doigt la mauvaise réputation d’Air Canada en ce qui concerne le respect des langues officielles. Alain Dupuis, directeur général du RÉFO, s’est avoué choqué par la nomination de Rovinescu : « C’est important le bilinguisme, il faut choisir des gens qui représentent cette vérité […] Les gens doivent se voir dans les symboles. »

La compagnie aérienne est en effet arrivée deuxième au rang national des plaintes en matière de services offerts en français de 2006 à 2013, en plus d’avoir été réprimandée à de nombreuses reprises par le Commissaire aux langues officielles, Graham Fraser. Dans son tout dernier rapport annuel, on peut lire : « J’ai été décontenancé de constater que celui-ci [le transporteur aérien] n’avait pris en compte qu’une seule des douze recommandations que j’avais formulées […]. »

LE SECTEUR PRIVÉ, SUR-REPRÉSENTÉ?

Calin Rovinescu est un acteur issu du secteur privé, alors que dans les dernières décennies, l’Université d’Ottawa avait plutôt coutume de nommer à sa chancellerie des personnalités publiques. Ainsi, Michaëlle Jean, était l’ancienne gouverneure générale du Canada, et avant elle, Huguette Labelle était femme d’État.

Pour Dupuis, cette nomination est une preuve de la corporatisation de l’Université. Il s’interroge : « Est-ce que c’est encore un milieu qui est axé sur le développement du savoir critique ou est-ce que c’est rendu un business qui voit les étudiants comme des clients? »

Inquiets, les professeurs le sont aussi. « Comme symbole de notre Université, nous ne trouvons pas cela très intéressant », a déclaré Jennifer Deckker, présidente de l’Association des professeurs de l’Université d’Ottawa (APUO). Elle se dit anxieuse non seulement de l’image de corporatisation universitaire à laquelle renvoie cette nomination, mais également du bilan de Rovinescu à Air Canada. Elle mentionne, à titre d’exemple, le changement du régime de retraite des employés qui avait soulevé la grogne du syndicat de la compagnie aérienne.

Si Rovinescu diffère de ses prédecesseures par son parcours professionnel, il n’en demeure pas moins que l’Université semble ravie de sa nomination. Pour emprunter les mots du recteur, il reste à voir si Rovinescu « propulsera l’Université vers de nouveaux sommets » ou s’il s’écrasera au moment même du décollage.

Calin Rovinescu en 5 dates clés

En 1965, Calin Rovinescu a 10 ans. Il quitte Bucarest et arrive au Canada, accompagné de ses parents et de sa sœur.

En 1980, Rovinescu obtient un baccalauréat en common law de l’Université d’Ottawa. L’homme d’affaires possède également un bac en droit civil de l’Université de Montréal et un DEC de McGill.

En 2013, après avoir quasiment éliminé le déficit qu’accusait Air Canada, Rovinescu est nommé meilleur PDG canadien par le magazine Report on Business

En 2014, Rovinescu reçoit un doctorat honorifique des mains de Michaëlle Jean. Dans un communiqué, l’Université indique avoir conféré ce doctorat « en reconnaissance de sa carrière remarquable en droit des sociétés et en affaires. »

En avril 2015, Air Canada accepte d’augmenter la pension de Rovinescu à condition que celui-ci demeure à la compagnie aérienne trois ans de plus. La pension du PDG passe ainsi de 414 000$ par an à 791 300$, à l’indignation d’Unifor, le syndicat représentant les employés d’Air Canada.

 

 

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