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Omniprésence de publicité : L’Université et ses étudiants, « un fantasme » pour les annonceurs

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19 septembre 2016

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Par  Yasmine Mehdi

Vous les avez assurément remarquées sur le campus, tentant de vous aborder, de vous charmer, de vous convaincre. Elles s’appellent Vidéotron, Simons, Nescafé ou encore Rogers, et le campus universitaire est l’endroit où leur rêve de convertir de nouveaux clients devient réalité. Mais à quel prix ?

Les étudiant.e.s, mines d’or ambulantes

« Le potentiel commercial du campus est indéniable, c’est un fantasme pour un annonceur » : c’est la conclusion à laquelle aboutit Luc Dupont, professeur en communication spécialiste du marketing.  Pourquoi? D’une part parce que les étudiant.e.s forment le public cible rêvé : jeunes, éduqué.e.s et en pleine formation de leurs habitudes de consommation.

Ce public idéal devient toutefois de plus en plus difficile à endoctriner, comme l’explique le professeur Dupont : « Avant, c’était facile d’entrer en contact avec les jeunes. On achetait de la publicité à la télévision, à la radio ou dans les journaux. Aujourd’hui, ces médias traditionnels ne parviennent plus à attirer les jeunes », a-t-il expliqué.

Qui plus est, la présence de ces compagnies sur le campus lors de la semaine d’accueil n’est pas due au hasard. « La recherche en marketing nous montre qu’on est plus réceptif quand on est heureux, mais aussi quand on est dans un nouvel environnement, comme c’est le cas pour les étudiants de première année », a souligné Dupont.

Prenons l’exemple de Nescafé, dont le kiosque était installé devant la Place de l’Université. Vous avez sûrement remarqué que bon nombre d’étudiant.e.s déambulaient sur le campus avec un petit gobelet rouge dans les mains, ou encore, vous faites partie de ceux qui ont attendu de longues minutes pour avoir droit à un fameux café gratuit.

Contactée par La Rotonde, Danielle Wasiman, assistante-directrice du service marketing de Nescafé, explique que le géant du café était présent dans douze campus à travers le Canada dans le cadre d’une « campagne de marketing expérimentale […] se concentrant sur les millennials ».

La Banque Scotia a également fait un tabac lors de la semaine d’accueil, grâce à sa distribution de selfie-sticks gratuits au UCU (qui n’étaient bien entendu offerts qu’aux étudiants acceptant de prendre rendez-vous dans une succursale bancaire).

Frank Bilodeau, vice-président du district d’Ottawa et de l’Ouest du Québec de la banque, a indiqué que la campagne s’étendait à « plus de 55 campus collégiaux universitaires », montrant ainsi que la présence de compagnies sur les campus est pratique courante partout au pays. 

Quand commercialisation ne rime pas avec transparence

Si ces déclarations prouvent que les avantages commerciaux sont indéniables pour les compagnies, la question des revenus que cela génère tant pour l’Université que pour la Fédération étudiante de l’Université d’Ottawa (FÉUO) demeure nébuleuse.

Si Frank Bilodeau de la Banque Scotia a confirmé avoir communiqué avec la FÉUO afin de « réserver un emplacement », il n’a pas divulgué le coût de celui-ci. Pour sa part, Francesco Caruso, vice-président aux communications de la FÉUO, n’a pas fourni cette information à La Rotonde, malgré de multiples requêtes.

Silence aussi du côté de l’administration de l’Université. En effet, si la représentante de Nescafé a déclaré avoir fait « un investissement important » pour cette campagne, son ordre de grandeur reste inconnu.

Pour le professeur Dupont, la commercialisation du campus ne devrait pas ralentir dans les prochaines années, désengagement de l’État oblige. « Rien ne se perd, rien ne se crée, on doit trouver d’autres sources de financement », a-t-il conclu. Reste à savoir si les étudiant.e.s sortiront perdant.e.s de ces ententes, puisque personne ne semble se soucier des implications éthiques que peut avoir la commercialisation d’un campus universitaire.

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