Crédit visuel : Les Frivoles – Contribution
Article rédigé par Aïcha Ducharme-Leblanc – Journaliste
Téléphoner à des inconnu.e.s pour leur réciter des poèmes et des pièces théâtrales ; c’est le défi que s’est lancé Les Frivoles, un collectif de neuf jeunes auteur.e.s de la région d’Ottawa-Gatineau. Avec le projet On s’appelle, on frivole ? ils.elles souhaitent rompre la solitude imposée par la pandémie.
Initié par Emmanuelle Gingras, et en co-dirigé avec Clémence Roy-Darisse, deux étudiantes de l’Université d’Ottawa, le projet a débuté en mars 2020. Son objectif est de produire un recueil de textes en réaction à la COVID-19, tout en démocratisant l’accès à l’art et en encourageant la communication.
Allô théâtre et poésie
L’initiative On s’appelle, on frivole ? déployée le 13 novembre dernier, consiste pour les auteur.e.s à téléphoner à des personnes de la communauté pour leur interpréter leurs propres textes. Pour recevoir un appel, les intéressé.e.s doivent prendre rendez-vous en s’inscrivant dans un document en ligne, et attendre un message de confirmation de la part du collectif.
Si chaque rendez-vous est en théorie d’une durée de 15 minutes, Aryane Roberge, auteure et membre du collectif, signale qu’une bonne conversation entre auteur.e et auditeur.rice peut dépasser les 45 minutes. Elle ajoute que le collectif essaie au mieux de répartir les appels afin de maximiser le temps de conversation.
Les thèmes des textes interprétés sont variés, mais tous se rapportent à la situation actuelle de la pandémie et les effets de celle-ci, notamment sur les relations et le comportement des gens, indique Roberge. « On vit une situation sans précédent, surtout à l’ère technologique, c’est certain qu’on veut immortaliser ça », précise l’auteure.
Roy-Darisse explique également que Les Frivoles ne sont pas les premier.ère.s à entamer un tel projet. Le collectif s’est inspiré des initiatives Au creux de l’oreille, entreprises au printemps dernier par le Théâtre du Périscope à Québec, et par le Théâtre de la Catapulte en partenariat avec la Nouvelle scène à Ottawa.
Créer des liens
L’originalité du projet relève du fait que les auteur.e.s présentent leurs propres œuvres inédites. En effet, pour Roy-Darisse et Roberge, ce sont les liens qui se nouent entre l’appelant.e et l’auditeur.rice qui font la richesse de On s’appelle, on frivole ? Roy-Darisse décrit cette relation comme intime et privilégiée. « C’est vulnérable pour nous en tant que lecteur.rice de partager des textes qu’on a écrit nous-mêmes », renchérit-elle.
Quant à Roberge, elle évoque les rétroactions utiles sur les textes que les artistes peuvent recevoir dans le cadre de ces échanges. Selon elle, c’est surtout en tant qu’artiste émergente que ces commentaires sont appréciés, et ajoute que « c’est intéressant d’avoir le pouls du public comme ça on peut retravailler [les textes] si certains passages sont moins bien compris ». Elle estime que l’audience aime sentir qu’elle a une incidence sur les productions des auteur.e.s.
Les réactions de l’ensemble de la communauté ont d’ailleurs été extrêmement encourageantes, soulignent Roberge et Roy-Darisse. Elles se sentent chanceuses et reconnaissantes de la couverture médiatique accordée à l’initiative, et des échanges touchants qu’elles ont connus tout au long de cette expérience.
Vers une publication ?
Les Frivoles prévoient la publication de leur recueil de textes dans un avenir proche. Souhaitant résumer intégralement leur expérience de la pandémie, les membres attendent que celle-ci prenne fin avant de publier. Roy-Darisse et Roberge espèrent que cette idée pourra se concrétiser en 2021. Le collectif envisage également de poursuivre sa mission de démocratisation de l’art en réalisant un court-métrage. Celui-ci mettrait en scène un oiseau distribuant des poèmes au cœur du centre-ville d’Ottawa.
On s’appelle, on frivole ? termine officiellement le lundi 30 novembre ; il n’est donc pas trop tard pour écouter de la poésie et du théâtre par téléphone.