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Arts et culture

Portrait de violoniste : entre fiertés et difficultés

Culture
26 mars 2021

Crédit visuel : Siri Ducharme-LeBlanc – Contribution

Entrevue réalisée par Marie-Ève Duguay – Journaliste

Loin d’imaginer qu’elle intégrerait un jour l’Orchestre du Centre National des Arts (CNA), Marjolaine Lambert a débuté la pratique du violon à l’âge de quatre ans. La Canadienne partage aujourd’hui son parcours dans le domaine professionnel de la musique, et offre quelques conseils pour celles et ceux qui souhaitent faire carrière dans le milieu.

La Rotonde (LR) : Comment est née votre passion pour le violon ? 

Marjolaine Lambert (ML) : J’ai grandi avec la musique autour de moi. Mon frère aîné a commencé à jouer [du violon] à un très jeune âge, et je m’y suis mise aussi, simplement pour le copier. Finalement, j’ai adoré l’instrument et nous jouons aujourd’hui tou.te.s les deux professionnellement.

J’ai étudié au Conservatoire de musique et d’art dramatique de Montréal. J’ai ensuite fait mon baccalauréat à McGill, puis ma maîtrise à l’Université Yale aux États-Unis, et ai finalement complété mon doctorat à McGill. Pendant mes études, j’ai joué avec plusieurs orchestres différents, notamment l’orchestre philharmonique de Yale […]. 

Après avoir gradué, j’ai été appelée par l’Orchestre du CNA pour faire une tournée à Édimbourg. Le premier violon m’avait vu jouer à un récital pendant mon doctorat, et il s’était souvenu de moi. C’est la preuve qu’il faut toujours donner le meilleur de soi, peu importe l’occasion ! Un an plus tard, j’y ai fait une audition, et j’ai obtenu l’emploi que j’occupe actuellement [au sein de l’Orchestre] […]. 

LR : Avez-vous un projet dont vous êtes particulièrement fière ?

ML : J’ai aimé tous mes projets. Je les prends tous au sérieux et je me donne toujours à 110 %. Je suis notamment très fière d’avoir obtenu mon emploi au CNA. Les gens à l’extérieur du milieu ne savent pas à quel point il est difficile de gagner sa place au sein d’un orchestre ; des heures et des heures de pratique sont requises pour obtenir une audition qui ne dure que trois minutes. J’ai donc été très chanceuse. 

J’ai participé au projet Les Gestes, [une création mondiale] réalisé[e] par Isabelle Van Grimde, et j’ai aussi travaillé auprès de Céline Dion pendant un mois : ces deux projets m’ont beaucoup marquée. J’ai également performé avec de grandes femmes cheffes d’orchestre comme Dalia Stasevska, qui commencent tout juste à recevoir la reconnaissance qu’elles méritent. 

LR : Est-il difficile pour une femme de réussir dans ce milieu ? 

ML : C’est un métier difficile pour n’importe qui. Par contre, j’ai l’impression que les femmes doivent toujours être parfaites et qu’elles n’ont pas souvent les mêmes opportunités que les hommes. Par exemple, quand j’étais plus jeune, il était plus difficile pour les femmes de recevoir les mêmes bourses que leurs collègues du sexe opposé. Heureusement, je vois tranquillement des changements dans cette dynamique aujourd’hui. 

Au CNA, il y a une belle parité. C’est surtout parce que nous faisons les auditions à l’aveugle : il y a un rideau qui sépare le.la muscien.ne [et les juges]. Les auditions sont donc vraiment basées sur le talent de la personne, et cela crée un sentiment de justice et d’équité. 

LR : Travaillez-vous sur d’autres projets ces temps-ci ? 

ML : J’enseigne au Conservatoire de Gatineau depuis deux ans et j’adore ça. Je trouve que les bon.ne.s professeur.e.s peuvent faire une grande différence dans la vie de leurs élèves […]. Je n’enseigne pas seulement le violon ; je montre aussi à mes élèves des méthodes de travail, de discipline et de résolution de problèmes qu’il.elle.s peuvent appliquer à leur vie hors du conservatoire […]. 

J’adore pousser mes élèves à devenir les meilleures versions d’eux.elles-mêmes […], c’est pour cette raison que j’aime surtout enseigner aux adolescent.e.s. Ces jeunes vivent souvent des périodes de changement qui les forcent à découvrir qui ils.elles sont, et la musique leur sert de ressource pour se dépasser. L’heure que je passe avec eux.elles chaque semaine est un moment positif qui doit être privilégié, surtout pendant la pandémie.  

LR : Avez-vous des conseils pour les personnes qui considèrent une carrière en musique ?

ML : Être musicien.ne ne se résume pas à ce que nous voyons sur scène ni à faire des concerts […]. En réalité, ce domaine nécessite des centaines d’heures de travail et de pratique. Avant d’obtenir mon poste au CNA, j’étais ma propre publiciste, ma propre gérante et je devais organiser mon horaire. Il faut être réaliste, et être prêt.e à tout faire.

Je suggère donc à ces individu.e.s de poser des questions aux gens du milieu, et de vraiment écouter leurs réponses. Mais, si une personne ne se voit pas faire autre chose et si ça ne la dérange pas de pratiquer tous les jours même pendant ses vacances, c’est une carrière qui en vaut vraiment la peine.

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