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Racisme à l’U d’O : À quand une vraie politique sur le racisme ?

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7 mars 2016

Boni Guy-Roland Kadio

Depuis les derniers mois, l’Université d’Ottawa (U d’O) enchaine malgré elle les gaffes quant aux affaires de discrimination raciale. Après l’incident de black-face du centre sportif Minto en octobre dernier, l’organisation du Mois des Noirs par la Fédération étudiante (FÉUO) aura elle aussi provoqué son lot de mécontentement vis-à-vis de l’administration. À l’occasion de la fin des festivités, La Rotonde a décidé de faire un bilan sur les mesures institutionnelles de l’Université dans la lutte contre le racisme sur le campus.

VIRULENTES CRITIQUES DE LA FÉUO

Mercredi 24 février, la FÉUO a publié sur sa page Facebook et son site web une lettre ouverte critiquant ouvertement l’administration de l’U d’O pour son manque de soutien dans l’organisation et la promotion des évènements du Mois des Noirs.

Elle écrit : « Il nous a été regrettable de constater que l’Université manquait à l’appel [pour le financement du Gala du Mois de l’histoire des Noirs]. […] [L’administration] lève le nez lorsqu’il s’agit de célébrer et de se souvenir des contributions à la société par la communauté noire. Dans une université qui prétend prioriser l’expérience étudiante, cette inaction révèle clairement un favoritisme pour l’expérience de certains étudiant.e.s, aux dépens d’autrui. Dans une université où les étudiant.e.s noir.e.s défient quotidiennement les conventions par leur simple existence, la promesse de soutien de l’université est trahie par la façon dont celle-ci utilise ses fonds. » Elle conclut son message en signant du mot-clic #BlackLivesMatter.

L’administration, au travers de sa gestionnaire chargée des relations avec les médias, Néomie Duval, se défend : « L’Université d’Ottawa a été approchée par la FÉUO pour contribuer financièrement au Gala du Mois de l’histoire des Noirs il y a environ un mois. Tous les fonds étaient déjà alloués aux activités étudiantes planifiées d’ici la fin de l’année fiscale, donc il n’avait pas de fonds supplémentaires disponibles pour cette activité. » Elle ajoute cependant que des fonds seront prévus pour ce genre d’activités « imprévues » dans la prochaine planification budgétaire des fonds mobilisables.

QUELLE POLITIQUE CLAIRE?

L’U d’O n’a pas une politique claire et définie sur le racisme en tant que tel. Un seul règlement, le règlement 67a sur la Prévention du harcèlement et de la discrimination, encadre toutes les formes de discriminations, notamment celles à base « raciale ».

Selon Sonya Nigam, la directrice du Bureau des Droits de la personne, qui a à charge de recevoir les plaintes liées à ce règlement, la discrimination telle que définie par ce règlement s’applique au racisme. Elle explique, pour l’année 2013-2014, que « sur les 18 incidents de discrimination, 4 ont été en lien avec la race et 1 en lien avec la couleur », et ajoute qu’une « trentaine d’ateliers » en lien avec le harcèlement et la discrimination ont été organisés.

Mireille Gervais, directrice du Centre des droits étudiants, explique d’ailleurs avoir reçu des plaintes étudiantes de discrimination raciale dans les dernières années, mais avoue que celles basées sur le handicap sont les plus récurrentes. « L’Université d’Ottawa ne fait rien de particulier pour créer un campus où il y a moins de racisme. Il y a certaines initiatives du Bureau des droits de la personne pour encourager l’équité de manière générale, mais selon moi il n’y a rien quant à la question large de discrimination raciale », affirme-t-elle.

L’UNIVERSITÉ CARLETON : UN EXEMPLE?

D’autres universités, comme l’Université Carleton, ont des politiques contre la discrimination et contre le racisme. Le professeur Daniel McNeil de Carleton soutient, en s’appuyant sur la définition de la Commission ontarienne des droits de la personne, que le racisme est un « phénomène plus large que la discrimination raciale ».

Pour lui, une politique sur le racisme a des effets différents qu’un règlement sur la discrimination. Par exemple, une politique antiracisme peut susciter « une éducation publique pour combattre le racisme et promouvoir l’avancement des droits humains », là où un règlement anti-discrimination peut seulement permettre de « créer des agences pour traiter des plaintes de discrimination ». Et c’est exactement ce rôle que joue le Bureau des droits de la personne. Autrement dit, l’Université est encore réticente à l’idée de mettre l’accent sur une approche proactive de lutte contre le racisme sur le campus. Ultimement, cette absence de politique spécifique sur le racisme camoufle le problème dans une multiplicité d’autres systèmes d’oppression.

 

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