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Des rapports déconseillés, mais peu encadrés

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13 novembre 2017

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Par : Yasmine El Kamel – Journaliste

 

Co-fondateur de l’École de musique de l’Université d’Ottawa (U d’O), Francoys Bernier, décédé il y a plus de 20 ans, a récemment été accusé d’agression sexuelle par sa nièce. Alors qu’une bourse d’études porte actuellement son nom, l’administration de l’Université pense à la renommer. En parallèle, au Québec, un projet de loi est actuellement développé pour encadrer les relations intimes entre professeur.e.s et étudiant.e.s. Qu’en est-il à l’U d’O ? Comment l’Université œuvre-t-elle pour se prémunir de toutes formes de harcèlements et d’agressions en son sein ? 

Il faut des « politiques claires avec des définitions »

La gestionnaire de relations médias de l’U d’O, Néomie Duval, a confirmé dans un premier temps que la bourse portant actuellement le nom du co-fondateur de l’École de musique sera renommée. Elle n’a par la suite pas désiré développer davantage en ce qui concerne l’encadrement des relations entre professeur.e.s et étudiant.e.s. Duval a en effet simplement renvoyé les questions lui étant adressées à ce sujet au règlement 67 de l’Université.

Intitulé « harcèlement sexuel », celui-ci prévoit, entre autres, la composition du Comité du harcèlement sexuel (CHS), ses attributions, la méthode de présentation des plaintes et les droits de la personne plaignante et des intimés. Maïra Martin, directrice générale de l’Action ontarienne contre la violence faite aux femmes (AOcVF), explique que ce sujet est un peu tendu « dans quelques universités ».

Elle ajoute que ces mêmes universités ne sont cependant pas dérangées par le fait « de travailler sur les agressions sexuelles commises entre étudiants ». Martin appelle alors à ce que les politiques contre les agressions à caractère sexuel et le harcèlement dans le milieu académique soit « vraiment claires avec des définitions » et des « procédures en cas d’agression ».

L’U d’O « désapprouve » des relations entre professeur.e.s et étudiant.e.s

Le règlement 67 de l’U d’O reconnait toutefois l’inégalité de pouvoir que peuvent avoir « les relations à caractère amoureux ou sexuel entre des membres du corps professoral et des étudiants et étudiantes ». L’Université s’attend ainsi à ce que « les membres de sa communauté s’abstiennent de telles relations ».

Simon Lapierre, professeur au département de Service social et ancien membre du Comité contre la violence sexuelle de l’Université, souligne cependant ne pas avoir connaissance d’un règlement visant à réguler les relations entre le personnel de l’Université et les étudiant.e.s. En soulignant l’intérêt d’un tel encadrement, il explique que comme dans le cas de la loi québécoise, « il n’est pas question d’interdire les relations intimes entre étudiant.es et professeur.es ». Selon lui, « un tel règlement pourrait peut-être éviter qu’une étudiante demeure dans une relation avec un professeur par crainte de répercussions négatives sur ses résultats scolaires ».

Lapierre estime néanmoins qu’il pourrait être plus approprié d’interdire ces relations, et ce en raison des rapports inévitables de pouvoir et d’autorité, entre les professeur.es et les étudiant.e.s. D’après lui, même en l’absence de règlement, les professeur.es devraient éthiquement éviter de s’engager dans des relations intimes avec des étudiant.e.s.

L’Ontario et l’Université d’Ottawa font preuve de leadership sur la question de la violence sexuelle

« Prévenir la violence sexuelle, c’est changer toute une culture. Les féministes luttent depuis plus de 40 ans contre la culture du viol », rappelle Lapierre, tout en précisant que l’Ontario et l’U d’O font preuve de leadership sur la question. L’Université a en effet mis en œuvre des initiatives, telles que le programme de formation et d’éducation (mobilisation des témoins) qui a été déployé à travers le campus.

Par ailleurs, le gouvernement canadien élabore actuellement un projet de loi portant sur le harcèlement sexuel en milieu de travail. Cette loi pourrait exiger que les employeurs se dotent d’une politique interne spécifique au harcèlement sexuel et que chaque cas rapporté fasse l’objet d’une résolution. Pour Lapierre, ce projet de loi est intéressant, car il ne remet pas uniquement aux survivantes la responsabilité de dénoncer leurs agressions; l’employeur doit agir s’il est au courant d’une situation.

« Plusieurs survivantes ne souhaitent pas porter plainte à la police (moins de 5% le font) et il est donc important qu’il y ait d’autres mécanismes pour assurer leur sécurité et leur bien-être dans leur milieu de travail », rappelle-t-il.

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