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Arts et culture

Théâtre : Et au pire, on se mariera

Culture
5 octobre 2015

« En fait, je voulais être une pute, oui, mais juste avec un client. Un respectueux. Un qui me demande comment s’est passée ma journée et qui me fait couler un bain. Je lui ferais à manger, pis je m’occuperais de la maison, ou alors on aurait une femme de ménage. Je serais amoureuse de lui, et lui de moi, et il me laisserait faire ce que je veux. »

Myriam Bourdeau-Potvin

Bienvenu dans le monde d’Aïcha, une adolescente de 13 ans qui a pour amies deux prostituées travesties, une mère conne et un amoureux du double de son âge. Adapté du roman de Sophie Bienvenu par les productions ExLibris, Et au pire on se mariera présente les confessions confuses d’une jeune fille pas tout à fait femme qui mélange parfois la réalité avec ses fantasmes et des scènes de cinéma.

Nicolas Gendron, jeune metteur en scène responsable de l’adaptation théâtrale, admet que « le plus gros du travail, c’était de choisir ce qu’on garde et ce qu’on ne garde pas ». Lors de l’écriture, M. Gendron a également jonglé avec l’idée d’incorporer le personnage de la travailleuse sociale, mais a finalement opté pour « être fidèle à l’émotion que j’avais eue en lisant le roman et de préserver le huis clos où [le public] devient la travailleuse sociale ». Il rédige cette première mise en scène l’année dernière avec un succès noté; après les 13 représentations initialement prévues au théâtre Prospero, il se voit contraint d’ajouter deux supplémentaires.

Kim Despatis, seule sur scène, offre un monologue parfois comique et souvent dramatique. Elle avait déjà interprété le rôle lors de la première il y a un an : « Quand on est jeune acteur, un an, ça fait comme mille ans », a-t-elle commenté en rapport à l’évolution que son jeu d’actrice a subie depuis. Pour elle, « trouver l’équilibre entre la femme et l’enfant […] et de trouver la gestuelle qui n’était pas fausse, qui n’a pas l’air d’un adulte qui joue un adolescent, et surtout de ne pas tomber dans le cliché » a été le plus ardu. Son travail a porté fruits, puisque les aveux tintés de mensonges d’Aïcha sont interprétés avec brio. Jean-Stéphane Roy, directeur artistique pour la Catapulte, ajoute qu’« à un certain point, on se demande où est la réalité et où est le théâtre ».

Malgré l’hésitation à présenter une pièce aussi poignante à des adolescents, Jean-Stéphane Roy a fait un bon pari. Il s’était donné la mission de faire découvrir aux Ottaviens la vie chamboulée d’Aïcha après un passage impromptu à Montréal, lors de l’une des représentations de l’année dernière. « Je ne m’attendais absolument à rien, et je suis sortie avec cette petite émotion-là qui m’habite encore depuis un an », a-t-il confié. « [À cause du sujet ardu], je me suis demandé si j’allais pouvoir présenter cette pièce aux étudiants : est-ce que les professeurs vont dire oui à cette pièce? Le résultat a été très positif; on a eu de très belles matinées étudiantes. » Mme Despatis est d’avis que les jeunes s’identifient facilement au personnage d’Aïcha : « Les adultes, ça les bouleverse parce qu’ils se rendent compte d’une autre réalité. Les ados, c’est ce qu’ils vivent en ce moment. »

Une version pour le cinéma est également en réécriture : vous rencontrerai peut-être Aïcha sur un grand écran prochainement!

 

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