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Violence sexuelle : Où sont passées les ressources externes pour les victimes ? (CALACS)

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3 octobre 2016

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Par Charlotte Côté

VIOLENCE SEXUELLE

Incohérences entre discours et ressources : l’Université d’Ottawa (U d’O) n’est pas passée à l’acte après avoir publié un rapport en février dernier démontrant pourtant la nécessité et la pertinence du travail des partenaires externes indépendants communautaires pour le soutien des femmes victimes d’agressions sexuelles sur le campus. Retour sur une initiative manifestement nécessaire à laquelle on tarde toujours à donner suite.

En 2015, Josée Guindon, gestionnaire au Centre d’aide et de lutte contre les agressions à caractère sexuel francophone d’Ottawa (CALACS), a contacté l’U d’O après la médiatisation de deux cas de violence sexuelle : celui de la présidente de la Fédération étudiante de l’Université d’Ottawa (FÉUO) et celui de l’équipe de hockey masculin des Gee-Gees.

Elle a alors proposé à l’équipe d’intervention sur le respect et l’égalité (ÉIRÉ), nouvellement mise en place pour s’occuper de l’enjeu de la culture de viol, une collaboration permettant à l’U d’O de bénéficier de l’expertise du CALACS, un organisme actif depuis plus de 20 ans.

C’est ainsi qu’un partenariat a été signé le 15 mai 2015 entre l’U d’O, le CALACS et leur partenaire anglophone, le Ottawa Rape Crisis Centre (ORCC). Un projet pilote a ensuite été lancé entre les mois de juillet 2015 et de janvier 2016. Pendant cette période, le CALACS et l’ORCC ont donné une formation d’initiation aux bases de la violence sexuelle à 68 % des cadres supérieurs de l’U d’O conviés.

« Certains sont venus de reculons », se rappelle Guindon, « plusieurs étaient très mal à l’aise avec la notion de culture de viol sur les campus ». En concert avec les formations, l’U d’O accordait deux jours de rémunération par semaine à une intervenante de chaque organisme afin d’apporter un soutien personnel aux victimes qui le souhaitaient.

Des résultats encourageants

Dans le rapport d’étape de l’ÉIRÉ, publié en février dernier, on lit clairement que « [suite] aux recommandations d’une consultante externe, Mme Denise Beaulieu, le partenariat sera renouvelé en 2016 ». Cependant, depuis lors, les deux organismes sont en attente de nouvelles. Pour Sunny Mariner, directrice générale du ORCC, ce projet est un modèle de collaboration université-communauté qui apporte un service de soutien indispensable. Le rapport de l’ÉIRÉ semble abonder en ce sens : « ces services semblent avoir comblé un besoin urgent sur le campus ». Alors pourquoi l’Université n’a-t-elle pas encore contacté ses partenaires communautaires?

Isabelle Mailloux-Pulkinghorn, gestionnaire aux relations avec les médias de l’U d’O, explique : « En ce moment, aucun budget n’existe pour supporter un tel contrat. Une demande sera soumise avec le rapport final [de l’ÉIRÉ], qui sera présenté au Conseil d’administration [Bureau des gouverneurs] bientôt. »

Les victimes doivent se tourner vers l’externe…

Quelle est l’importance de l’implication de partenaires indépendants? « Plusieurs victimes ne veulent pas de soutien à l’interne, pour toutes sortes de raisons », explique Simon Lapierre, professeur à l’École de service social et membre du collectif de recherche FemAnVi.

Les observations du CALACS le confirment : environ 90 % des femmes de l’U d’O ayant fait appel au service ont demandé des rencontres hors campus. « Les séquelles de l’agression sexuelle vont au-delà de la vie étudiante, et donc des ressources proposées sur le campus », affirme Guindon, « mais de manière plus importante, c’est l’anonymat que les victimes recherchent ».

Et le financement doit suivre

Selon M. Lapierre, il n’y a aucun doute : « l’expertise se retrouve dans les mains des organismes de la communauté ». Avec la médiatisation du phénomène de culture du viol sur les campus, ainsi que les efforts de sensibilisation déployés par l’U d’O, davantage de victimes contactent des organismes comme le CALACS et l’ORCC pour du soutien.

« Il faut s’assurer que le financement [provincial, ou de partenaires] suive pour ces organismes qui font face à la pression du nombre grandissant de sollicitations », prévient M. Lapierre. Il est à noter que, financièrement, le CALACS ne peut proposer que deux intervenantes pour 75 000 femmes francophones à Ottawa, dont 25 % seront victimes d’agressions sexuelles pendant leur vie.

Face au silence de l’U d’O, l’ORCC espère que le projet sera bientôt relancé. Pour sa part, le CALACS « sent que l’U d’O veut continuer la collaboration, mais ça tarde. Surtout quand on sait que les mois de la rentrée des classes sont une période critique. »

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