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Arts et culture

Un festival de films à Ottawa ? Prise numéro trois

Web-Rotonde
10 novembre 2019

Crédit visuel : Jith Paul

Par Caroline Fabre –  Directrice de production

Oyez oyez camarades, connaissiez-vous l’existence du Ottawa Canadian Film Festival (OCanFilmFest) ? Non ? Eh bien, c’est parfait, je vais donc vous instruire.

Qu’est-ce que le OCanFilmFest me direz-vous ? C’est un festival créé par un groupe de réalisateurs indépendants qui a pour but de promouvoir et de célébrer le cinéma canadien en mettant de l’avant des artistes locaux. Quand est-ce qu’il a lieu ? Le festival se déroule sur deux jours et est divisé en cinq blocs de visionnement durant lequel une quinzaine de films et courts-métrages sont projetés.

Sa troisième édition, organisée par Jith Paul, Blair Campbell, Manuel Sousa et Megha Dash s’est tenue les 1er et 2 novembre dernier, à La Cour des arts d’Ottawa. Travaillant durant les fins de semaine, je n’ai malheureusement pu assister qu’à un seul bloc ; le numéro 4.

Courte durée : rythme soutenu 

Pendant approximativement une heure, cinq courts-métrages se sont succédés, abordant des thèmes aussi divers que variés.

Le premier à avoir été projeté s’intitule Newborn. Réalisé par Ray Savaya, il traite des problèmes liés au racisme et à la xénophobie. Le film débute sur un homme sortant d’un aéroport en furie. Après avoir rejoint sa femme qui vient d’accoucher, l’homme annonce qu’il n’est plus d’accord avec le prénom donné au nouveau-né. S’ensuit alors une véritable scène de ménage qui se soldera par l’émergence de la véritable raison de ce changement d’avis. 

Nommer son fils Samir est une tradition qui se transmet de génération en génération dans la famille du père mais dans le monde actuel, porter un prénom à consonance étrangère peut s’avérer être un véritable frein dans la vie. Le film termine sur la véritable raison liée à l’absence du père lors de l’accouchement : en raison de son prénom, il a été retenu à la douane. 

Des cinq oeuvres projetées, celle-ci m’a le plus touchée. Elle m’a permis de réaliser que le racisme a lieu tous les jours, sous différentes formes et qu’il est, malheureusement, bien trop banalisé. 

Il m’a révoltée ; j’aurais voulu parler au père et lui expliquer que le nom de son fils est un héritage, qu’il doit le porter avec fierté, et non pas le remplacer, le cacher sous un diminutif. J’aurais voulu parler au réalisateur, qui raconte, à travers ce court-métrage, son histoire personnelle. Lui assurer que le monde de demain sera différent, et que j’ai foi en l’humanité. Car, j’en suis persuadée, les choses changeront dans le futur.

Se sont ensuite enchaînés The Order of Things to Come, abordant la vengeance, Overgrowth, qui traite de la séparation amoureuse, May Flowers, mêlant quiproquo et humour, ou encore The Still Life of Annika Myers.

Ce dernier aborde la question de la famine durant l’hiver de 1945. Annika et sa famille meurent de faim et se décident à échanger leur seul bien de valeur, une peinture d’un festin, contre quelques rations alimentaires. 

De longues années plus tard, Annika, qui a dorénavant 84 ans, découvre que le tableau est exposé dans la ville où elle réside ; désireuse de le récupérer, elle s’allie à Evan pour tenter de le subtiliser. Au fur et à mesure de leur aventure, Evan se rend compte que la vieille dame n’est pas animée par l’envie de récupérer la peinture, mais plutôt par le repas qu’elle représente, et dont elle a tant rêvé quand elle était plus jeune. Le brave homme mettra alors tout en oeuvre pour satisfaire son plus vieux rêve.

Question-réponse, à qui le tour ?

À la suite de la projection a pris place une séance de questions. Cinq personnes se sont avancées en bas de la scène et présentées, toutes appartenant à l’une des équipes techniques ayant participé à la réalisation des courts-métrages. Parmi eux, il y avait quatre des cinq réalisateurs ainsi qu’un cinématographe. Plusieurs thématiques y ont été abordées, comme celle des conditions de tournage, des budgets accordés ou encore des doubles sens présents dans certains de ces courts-métrages.

Je suis vraiment fascinée par la période de production d’un film, c’est pourquoi j’aime beaucoup écouter les anecdotes de tournage, découvrir l’envers du décors en général. La foire aux questions m’a semblé très intéressante et a permis de répondre à certaines de mes interrogations.

À la fin de cette dernière, les spectateurs étaient invités à voter pour le court-métrage qu’ils ont le plus apprécié. Il suffisait juste de glisser le billet d’entrée du festival dans la petite boîte comportant le nom du film. C’est sans surprise le dernier court-métrage auquel j’ai assisté, The Still Life of Annika Myers, qui a remporté le prix du public. La tendresse émanant de ce dernier m’a émue, et je comprends aisément pourquoi le prix lui a été décerné.

Et localement, ça se passe comment ?

Sept des dix réalisateurs des films présentés étaient ontarien.ne.s. Mais comment l’industrie locale est-elle supposée se développer lorsque l’Université d’Ottawa elle-même réduit les financements accordés aux professeur.e.s du département de communication, faisant fermer de nombreux cours et même le programme de cinéma ?

Faisant partie de ce dernier, je me retrouve bloquée dans le choix de mes cours ; graduer s’annonce donc être une mission bien compliquée. Chaque année, le même problème se pose au moment de choisir les classes que je vais suivre: dois-je prendre les cours disponibles, mais qui ne m’intéressent pas forcément, pour rester dans la sécurité, ou au contraire, me montrer joueuse, et attendre de pouvoir choisir les cours qui me plaisent ? Au final, c’est bien trop souvent le premier cas de figure qui l’emporte. Je me retrouve dans des cours, avec d’autres étudiants désespérés, à attendre que les heures passent rapidement.

L’Université d’Ottawa aurait pu, c’est le minimum à mon sens, nous prévenir, lors de notre inscription, que le programme fermait l’année d’après. L’un de mes amis se retrouve à devoir batailler, se justifier pour pouvoir obtenir la mineure en cinéma dont il rêvait tant. Est-ce normal ? Je ne pense pas.

Comment le cinéma local sera-t-il alors impacté dans les années à venir si les futurs artistes ne sont ni formé.e.s, ni soutenu.e.s ? Est-ce donc ça l’avenir de la communauté artistique d’Ottawa ? D’être brimée pour une raison monétaire ? Peut-être serait-il judicieux de réouvrir le programme, d’y proposer des cours techniques, comme ceux de vidéos, dont le niveau 2 qui a d’ailleurs été coupé par l’Université. 

Je demeure certaine qu’il existe d’autres services bien plus superflus, dont le budget pourrait être coupé, plutôt que de supprimer un programme. Et qu’en est-il du surplus budgétaire découvert l’année dernière? Ne pourrait-il pas, par exemple, être investi dans la restauration de ces programmes supprimés, et qui, j’en suis sure, en intéressent plus d’un. Tu m’as déçue uOttawa, à toi de redorer ton image.

Rendez-vous incontournable

J’ai eu l’opportunité de me rendre au OCanFilmFest l’année passée, sur les conseils d’une de mes professeurs puisque j’étudie dans les programmes de communication et de cinéma du monde à l’Université d’Ottawa. Je me souviens avoir rapidement été saisie par l’ambiance du festival. Les organisateurs s’étaient montrés si à l’écoute et si amicaux que j’avais donc mis un point d’honneur à y retourner cette année ; je n’en suis pas déçue.

Cinéphiles en devenir, l’événement est pour vous l’occasion rêvée de non seulement diversifier les films que vous regardez, de pouvoir poser les questions qui vous brûlent les lèvres à des membres actifs de l’industrie cinématographique mais aussi de rencontrer des artistes et des professionnels, et d’ainsi vous créer une liste de contacts. 

Si le cinéma n’est pas votre domaine de prédilection, mais que le festival vous intrigue, vous serez tout de même plus que bien accueilli, croyez-mois sur parole. J’espère donc vous avoir donné envie de venir admirer les œuvres présentées, et j’aspire à vous croiser lors de la quatrième édition. Rendez-vous l’année prochaine !

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