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Arts et culture

Lever le voile sur le racisme dans le monde des arts

Rédaction
25 juin 2020

Crédit visuel : Ottawa Art Gallery 

Par Noémie Calderon Tremblay – Journaliste

Une série de conversations virtuelles organisée par la Galerie d’art d’Ottawa (GAO) et animée par l’artiste et membre du conseil d’administration de la GAO Dominique Dennery a ouvert le dialogue sur l’implication des arts et de ses établissements dans le racisme anti-noir. La première de cette série a entamé une réflexion dans le but de mettre en place des actions concrètes pour lutter contre le racisme systémique en art. Réunissant les artistes Evelyn Duberry, Kosisochukwu Nnebe et le conseiller du quartier Rideau-Rockcliffe de la ville d’Ottawa, Rawlson King, la conversation a eu lieu le mercredi 17 juin 2020 de 16h00 à 17h00.

Près de 400 personnes se sont jointes à la discussion qui s’est déroulée sur l’application Zoom, formant par la même occasion le plus grand événement virtuel de la GAO. La directrice de la galerie, Alexandra Badzak a ouvert l’événement en identifiant la GAO comme une alliée, et en promettant son implication en organisant, entre autres, plusieurs conversations concernant la lutte contre le racisme dans l’art.

« Les conversations vont permettre la création des liens et entamer un dialogue entre les artistes et la communauté noire et la galerie afin de permettre par après la décision des prochaines étapes à suivre », a-t-elle déclaré. S’est est suivie l’introduction de l’événement et une brève présentation des panélistes par Dennery, la médiatrice de l’événement.

Faire trembler les fondations des institutions artistiques

Les panélistes ont été invité.e.s à partager leur expérience dans le milieu des arts. Nnebe a raconté avoir fait face à de la discrimination lorsqu’elle a tenté de présenter ses oeuvres à certains événements. On lui a notamment demandé de « prendre moins de place » et « de revenir lorsqu’elle aura plus d’expériences. »

Duberry, qui est aussi collectionneuse d’art, explique quant à elle avoir beaucoup de difficultés à avoir accès à de l’art diversifié dans les galeries. Elle déplore la présence globalisante du « safe art ». « Pourquoi ne voyons-nous pas d’art noir dans les galeries et les musées ? Nous savons pourtant que nous faisons intrinsèquement partie de la fondation du Canada », se demande-t-elle.

King, quant à lui, a avoué avoir été confondu avec un gardien de sécurité lors de sa participation à des vernissages. « Je croyais qu’on allait me poser des questions sur l’art parce que ma femme est une conservatrice, mais non ! », livre-t-il.

Besoins et manques : la réalité du terrain

« Il faut une continuation perpétuelle dans l’aide financière et l’intérêt porté vers l’art des artistes noir.e.s. Et pas seulement un engouement lors du mois de l’Histoire des Noir.e.s » a souligné Duberry. Elle se dit fatiguée de voir l’exploitation d’histoires et d’expériences noires et le faux appui de la cause antiracisme à des fins commerciales ou dans le but unique de combler un échéancier.

Les panélistes s’accordent pour dire qu’il y a un écart entre ce qui est dit et promis, et la réalité. Duberry dit qu’il y a beaucoup de « unicorn floss » dans le discours ambiant, un néologisme qui en anglais désigne une histoire fantasmée écrite par des gens dans la visée de mieux se sentir et de ne plus ressentir de la culpabilité.

En outre, tous affirment qu’il est essentiel d’obtenir de l’argent soit par le moyen de bourses, de programmes ou de subventions pour que les voix marginalisées puissent être entendues.

King, qui a annoncé sa nomination en tant qu’agent de liaison du Conseil pour les initiatives de relations ethnoculturelles et de lutte contre le racisme à la ville d’Ottawa, demande des mesures concrètes pour l’élimination du racisme systémique présent dans les institutions canadiennes, dont les galeries d’art. « Il faut l’ouverture d’un dialogue certes, mais il faut aussi la mise en place de politiques radicales et que de l’éducation et de la sensibilisation soient faites parmi les citoyen.ne.s pour que de véritables changements s’effectuent », déclare-t-il.

Après l’échange, des actions concrètes ont été proposées à la GAO par les artistes et le conseiller de la ville d’Ottawa.

Dans l’objectif de faire de cette discussion une rencontre collective, les participant.e.s ont ensuite été invité.e.s à partager leurs questions par le biais du groupe de discussion Zoom. Vers la fin de l’événement, un temps a été accordé aux panélistes pour répondre à quelques-unes de ces questions.

Dennery a cependant rappelé qu’une heure est bien insuffisante pour répondre et discuter de tous les enjeux concernant le racisme dans l’art, et les actions qui doivent être prises pour changer la structure discriminatoire des institutions artistiques et culturelles du Canada.

La discussion s’est conclue sur la promesse d’une prochaine conversation et la continuation du dialogue avec la communauté artistique noire entamée lors de cette première conversation virtuelle. Badzak a également annoncé la réouverture de la galerie GAO au début du mois de juillet.

Il vous est possible de visionner la conversation virtuelle en anglais sur YouTube.

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