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Conférence Les femmes et la science : Comment conjuguer science au féminin ?

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1 février 2016

Charlotte Côté

Dans le milieu universitaire comme ailleurs, il y a des stéréotypes qui ont la vie dure. Afin de prouver une bonne fois pour toutes que les femmes ont leur place dans les sciences, l’Université d’Ottawa (U d’O) s’est jointe au service scientifique de l’Ambassade de France au Canada et à L’Oréal Canada « Pour les Femmes et la Science » pour une grande conférence intitulée « Les femmes et la science : encore un défi de nos jours? » Ce fut l’occasion pour les intervenants de discuter d’enjeux de société et de partager histoires, perspectives et conseils avec la relève.

Plus d’une centaine de personnes, étudiantes pour la plupart, en génie, en médecine ou en sciences, se seront rassemblées au pavillon des Sciences sociales (FSS), le mardi 19 janvier. Pendant près de deux heures, les panélistes Molly Shoichet, Ruby Heap, Catherine Mayriplis et Mona Nemer, grandes figures de la science de l’U d’O et d’ailleurs, modérées par la journaliste scientifique de renom Véronique Morin, ont discuté de la manière d’être femme et de laisser sa marque dans des disciplines traditionnellement réservées aux hommes.

Un constat : Encore bon nombre de défis à relever

Commanditée par la fondation L’Oréal, la conférence s’est ouverte sur une étude réalisée en partenariat avec Opinion Way. Celle-ci a révélé que les préjugés dans le monde de la science restent solidement ancrés : seuls 10 % des gens interrogés ont dit considérer les femmes comme étant aptes à évoluer dans les domaines de la science appliquée; 67 % ont même affirmé que celles-ci ne possèderaient pas les compétences nécessaires pour le faire.

Au-delà des chiffres cependant, il était indéniable pour les panélistes rassemblées de dire que les femmes ont au fil des ans réussi à se tailler une place dans les sciences… bien que les obstacles restent nombreux. Harcèlement, disparités salariales, sous-représentation, ou conciliation famille-carrière restent encore des freins bien réels au plein épanouissement des femmes en science.

Modèles invisibles, mais bien présents

Et s’il y a une chose qui manque cruellement aux femmes dans le monde de la science, ce sont des modèles.

Pour Shoichet, titulaire de la Chaire de recherche canadienne en génie tissulaire, les parents, notamment les mères, doivent jouer un rôle primordial dans la construction de l’identité de leur(s) fille(s). Nemer, vice-rectrice à la recherche et professeure de biochimie à l’U d’O, pense quant à elle que c’est par une plus grande représentation féminine au sein des facultés des sciences que l’on pourra attirer davantage de jeunes filles passionnées. Heap, vice-rectrice associée à la recherche et professeure d’histoire à l’U d’O, a ajouté à cela que « malgré des accomplissements incroyables, les femmes souffrent encore d’invisibilité au niveau des positions d’autorité dans les domaines scientifiques ». Ce à quoi Mavriplis, titulaire de la Chaire pour les femmes en sciences et en génie du Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, a ajouté que « beaucoup de femmes ont déjà marqué les sciences; il suffirait d’en parler plus ».

Beaucoup de jeunes femmes maintenant en sciences avouent avoir eu besoin d’aide et de soutien de leurs proches masculins pour s’aventurer dans le domaine. « Si je n’avais pas eu [le modèle de mes frères et de mon père], je n’aurais peut-être jamais envisagé ces études », explique Marie Ève Hodack, étudiante en génie mécanique. « J’aimerais plus tard pouvoir inspirer d’autres filles à considérer l’ingénierie comme possibilité de carrière. Être une femme ne devrait pas limiter nos choix. »

Comment s’affirmer quand on est femme dans un milieu d’hommes?

« Lors d’un de mes premiers emplois en tant que physicienne, j’ai vite remarqué que mon salaire était bien inférieur à celui de mes collègues masculins », s’est rappelée Alicia Gaseck, lauréate du prix d’excellence en recherche L’Oréal-UNESCO pour Les Femmes et la Science.

La jeune femme, bien qu’elle occupait le même poste, possédait la même expérience et la même formation que ses homologues masculins, était pourtant intimidée à l’idée de demander un salaire égal. « Je me demandais si la qualité de mon travail m’autorisait à revendiquer une hausse salariale. Le méritais-je vraiment? »

En s’informant auprès de ses collègues physiciens, elle a réalisé la dimension du fossé qui existait entre leur réalité et la sienne. « C’était simple : pour eux, lorsqu’ils négociaient leur salaire, ils se basaient sur le salaire des autres. Je me suis rendu compte qu’il n’était pas question de le ‘mériter’; le principe était que je devais m’affirmer et exiger le même salaire que mes collègues. »

Le sentiment ressenti par Alicia est assez courant chez les personnes évoluant dans des milieux compétitifs. Parfois nommé « syndrome de l’imposteur », il se manifeste par un doute maladif chez certaines personnes, qui en viennent à nier la propriété de leurs accomplissements personnels et à dévaluer leur valeur professionnelle. Et les femmes en sont beaucoup plus touchées que les hommes.

L’histoire de Gasecka en a interpellé plus d’une, dont Hodack. « On est toujours réticente à revendiquer, alors que nos collègues masculins le font sans y penser », explique-t-elle. « Pendant ma première année par exemple, j’avais l’impression constante de devoir prouver que je méritais d’être dans mon programme. »

« Prenons la parole, démarquons-nous, mettons-nous dans des situations inconfortables s’il le faut. Changer les perceptions se fera par l’information et la sensibilisation des gens autour de nous. »

Ce sont sur ces paroles de Shoichet que s’est conclue la conférence. « Ne vous sous-estimez pas. Bien sûr, le chemin est parsemé d’embûches, mais vous êtes pleines de ressources, alors foncez », a assuré, une fois le panel clôt, Mona Nemer aux étudiantes de l’assemblée, dans l’espérance que les jeunes femmes ressortiront de la salle la tête haute et confiantes dans l’avenir.

 

 

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