Par Mathieu Tovar-Poitras – Rédacteur en chef
L’Université d’Ottawa (l’U d’O) pourrait devoir affronter une poursuite judiciaire provenant de l’un de ses étudiants, qui juge ne pas avoir reçu les accommodements relatifs à ses problèmes de santé mentale.
Tout a commencé à la fin de la session d’hiver 2014, lorsque Jami Merali, étudiant dans le programme de Common Law à l’U d’O, a dû envoyer une lettre de demande de réadmission après avoir échoué deux cours. Le comité de réadmission de la Faculté de droit – section Common Law – chargé d’évaluer ces demandes lui a indiqué qu’il lui serait plus bénéfique de prendre une absence pour cause de maladie pour l’année académique 2014-2015 puis de revenir l’année suivante.
« C’est une décision injuste », soulève Merali. « Je n’ai pas reçu les accommodements que mes médecins, des spécialistes et les Services d’accès ont soulignés ». Il précise toutefois qu’il n’accuse pas la Faculté de droit de n’avoir fourni aucun effort mais plutôt qu’ils étaient « incomplets, manquaient de constance et pas à la hauteur ». Par ailleurs, Merali précise avoir été transparent lors de son application initiale au programme et avoir été accepté comme un étudiant avec un handicap et une maladie chronique.
Mireille Gervais, directrice du Centre des droits étudiants de la Fédération étudiante de l’Université d’Ottawa (FÉUO), explique que l’étudiant a approché le Centre au lendemain de la réception de la lettre du comité de réadmission. « Dans les motifs prohibés de discrimination en vertu du Code des droits de la personne de l’Ontario, c’est de loin le handicap qui apparaît le plus souvent dans nos dossiers », explique Gervais. Selon elle, l’étudiant a été transparent et de bonne foi dans ce dossier mais elle qualifie la réponse du comité de réadmission « d’un paternaliste honteux », dû aux références que la lettre faisait aux étapes médicales qu’avaient entreprises Merali.
Est-ce qu’un comité administratif a vraiment le pouvoir d’analyser et de substituer son jugement au jugement des professionnels de la santé ? – Mireille Gervais, directrice du Centre des droits étudiants de la FÉUO
Appel rejeté, l’ombudsman intervient
Avec l’aide du Centre des droits étudiants, Merali a décidé de faire appel à son retrait auprès du Comité d’appel du Sénat de l’U d’O, soulevant des motifs relatifs aux accommodements liés à son handicap.
Toutefois, le Comité d’appel a rejeté la demande, ce qui a poussé Merali à contacter l’ombudsman de l’Université, qui était à ce moment-là Lucie Allaire, qui a ensuite intervenu pour renverser la décision et réadmettre Merali dans le programme.
Les représentants de la section Common Law de la Faculté de droit impliqués dans le dossier ont décliné les demandes d’entrevue de La Rotonde, pour des raisons de confidentialité relatives aux dossiers étudiants.
« Nous tenons à vous assurer que l’Université veille à offrir aux étudiants avec des besoins particuliers les mesures d’accommodement nécessaires », explique Isabelle Mailloux-Pulkinghorn, gestionnaires des relations avec les médias (par intérim). Elle souligne aussi l’existence du Service d’appui au succès scolaire (SASS) ainsi que la présence d’une conseillère en équité et mieux-être au sein de la section Common Law.
Devant le tribunal
Merali prévoit emmener son dossier devant le Tribunal des droits de la personne « pour attirer l’attention sur la question des accommodements pour les personnes avec des handicaps ». Il a toutefois envoyé une proposition de règlement à Julie Sicotte, conseillère juridique de l’U d’O, qui demandait à l’institution de lui fournir une compensation financière située entre 250 000$ et 400 000$. Sa proposition comprend aussi plusieurs réparations non-financières, tel que des garanties d’accommodements ainsi que des initiatives pour l’entièreté de la population étudiante.
« J’insiste pour que ce dossier inclue des compensations et réparations à l’égard de ma personne, mais aussi – et surtout – des actions de l’Université pour tous les étudiants », explique Merali, qui mentionne aussi avoir eu des rencontres avec des représentants de la FÉUO.