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Arts et culture

Apaiser ou faire vibrer : la double force de la musique

Crédit visuel : Élodie Ah-Wong – Directrice artistique 

Article rédigé par Bianca Raymond – Cheffe du pupitre Arts et culture

La musique, art vivant qui oscille entre apaisement et énergie, porte en elle, derrière chaque chanson, une origine, un message et un impact profond. Pour l’artiste franco-ontarienne Jessy Lindsay, la création naît de l’intime et du quotidien, tandis que pour la professeure Lori Burns, elle s’inscrit dans une expérience humaine globale et collective. Croisant leurs regards, elles dévoilent la puissance de la musique sur son auditoire.

Trouver sa voix : la création comme acte identitaire

Selon l’artiste franco-ontarienne, Jessy Lindsay, « être francophone en situation minoritaire, c’est un choix ». Elle se souvient de ses années au secondaire, où elle était encouragée à monter sur scène et à performer en français. Cette étape a marqué un tournant dans son parcours artistique.

C’était lors du festival « Quand ça nous chante », un festival de musique organisé par des écoles secondaires franco-ontariennes, qu’elle a décidé de faire carrière en français. Après avoir vu l’artiste Céleste Lévis sur scène, que Lindsay s’est dit « Wow, une femme qui est au centre de la scène, qui joue ses propres chansons, qui collabore avec des musicien.ne.s et qui partage son histoire avec un public, voila ce qui m’inspire.»

Écrire et composer en français est une manière de préserver sa langue, estime Lindsay. Chanter en français signifie conserver cet héritage culturel et ne pas l’oublier. Alors que beaucoup de personnes ne parlent plus cette langue après l’école secondaire, pour elle, la langue française est lyrique. C’est une manière de s’exprimer qui permet de « peindre de belles images ».

En tant qu’artiste franco-ontarienne, Lindsay se considère aussi comme « franglophone », intégrant des anglicismes dans ces chansons. Par exemple, dans « Just Friends », une chanson majoritairement francophone, elle utilise quelques mots anglais courants comme « drink » ou « les lights en slow mo ». Elle les ajoute pour donner une touche d’authenticité  : « C’est comme ça que je parlerais dans la vie de tous les jours », affirme-t-elle.

Lorsqu’elle écrit, Lindsay part d’une expérience personnelle ou d’une idée notée dans son carnet. Selon elle, « les expériences qu’on vit nous-mêmes, ce sont celles qu’on peut le mieux décrire et mettre en mots ». Elle explique que son journal quotidien révèle souvent des émotions fortes, qui nourrissent l’écriture de ses chansons, abordant des thèmes personnels, parfois thérapeutiques.

« À travers mes expériences de création, je cherche ma communauté, mon identité et ma confiance en moi, je m’assume en tant que femme queer, et je n’ai pas peur de dire ce que je pense ni de prendre ma place. »

- Jessy Lindsay -

La scène comme lieu de connexion

La professeure uottavienne Lori Burns, de son côté, perçoit dans la musique une tension entre intimité et collectif, qui constitue une dimension humaine fondamentale. Selon elle, chaque genre musical remplit une fonction sociale distincte : « La musique d’ambiance crée une concentration calme et méditative ; la musique orchestrale grandiose suscite l’émerveillement et l’anticipation ; l’Electronic Dance Music (EDM), entendue dans les clubs,  crée un espace à haute énergie ».

Burns souligne que la musique agit à la fois sur les émotions et sur le corps : « Danser ou vibrer en groupe constitue un phénomène de cohésion sociale ». Elle rappelle que « les êtres humain.e.s collaborent mieux et se respectent davantage lorsqu’iels partagent des modèles de mouvement communs ».

C’est assurément cette tension entre intimité et collectif qui pousse  Lindsay à laisser le champ libre à la danse et à l’énergie, et qui fait que son public y répond toujours. Elle se remémore notamment la soirée du Cinq-Zéro, où l’ambiance et le public étaient chaleureux et enthousiastes. Pour elle, le spectacle est un moment de libération collective, une célébration du vivant : « En live, surtout avec le style de musique que je fais, avec un beat et du pop, je dirais que c’est vraiment plus énergisant, plus rassembleur. »

Cette énergie, Lindsay la vit comme un dialogue entre elle et le public. Ses refrains, souvent simples et entraînants, créent des ponts invisibles entre les voix et les corps. Elle explique que lorsque tout le monde chante la même ligne au même moment, il se produit  une connexion, une véritable magie entre la musique et le public.

Après son spectacle au Cinq-Zéro, elle se rappelle qu’une jeune fille est venue la voir pour lui dire à quel point elle était un modèle pour elle. Elles ont pris une photo ensemble, et la jeune fille lui a offert un de ses bracelets qu’elle avait fièrement porté lors de la parade de la fierté plus tôt dans l’année. Cette rencontre a rappelé à Lindsay que c’était pour les interactions et les connexions avec le public qu’elle a commencé à faire de la musique, et que celle-ci se veut un vecteur d’unité et d’empathie, un outil de libération personnelle.

Entre apaisement et énergie, Lindsay et Burns nous rappellent que la musique ne choisit pas entre le corps et le cœur, mais qu’elle les unifie tous les deux.

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