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Au cœur de la COP : comprendre l’impact réel des négociations climatiques

Crédit visuel : Courtoisie 

Entrevue réalisée par Joelluc Liandja – Journaliste

De Belém à Ottawa, le fil des négociations climatiques se poursuit. À la 30ᵉ conférence des Nations Unies sur les changements climatiques (COP30), tenue du 10 au 21 novembre 2025, l’Université d’Ottawa était représentée par Alouss Willy Doumbia, doctorant en droit et spécialiste de la politique climatique. Avec La Rotonde, il revient sur les grandes lignes et les tensions qui ont marqué ce conclave climatique.

La Rotonde (LR) : Qu’est-ce qui vous a motivé à participer à la COP 30 et quel rôle précis avez-vous joué dans les discussions ou les panels ?

Alouss Willy Doumbia (AWD) :
Je suis venu avant tout dans le cadre d’une recherche. Je travaille comme assistant de recherche de la professeure Lynda Hubert Ta de la section de droit civil à l’Université d’Ottawa. Notre objectif était d’analyser la présence des entreprises, en particulier les grands pollueurs dans les COP. Depuis plusieurs années, on observe une augmentation très nette de leur participation et on cherche à comprendre comment ces acteurs arrivent à y véhiculer leurs messages, à influencer les discussions et à se positionner dans l’espace climatique international.

LR : Comment décrivez-vous l’atmosphère qui a régné au sein de cette COP, particulièrement dans un contexte où les attentes internationales envers les États, dont le Canada, sont très élevées ?

AWD : Cette COP était sous tension, mais cruciale. D’un côté, il y a une urgence climatique croissante quand on voit le rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). De l’autre côté, on a une communauté internationale très fragmentée. Et pourtant, quand je suis arrivé pour la première fois dans cette COP, on a senti qu’il y avait une volonté réelle de certains États, d’expert.e.s et des peuples autochtones de remettre la justice climatique au centre, donc la protection de l’environnement. Le 23 juillet 2025, la Cour internationale de justice a rendu un avis dans lequel elle a rappelé les obligations juridiques des États très clairement pour dire qu’il faut protéger l’environnement et que le climat n’était pas qu’uniquement de la diplomatie, c’est aussi du droit. Il faut faire respecter les engagements que les États se sont donnés dans les différentes COP qui ont eu lieu précédemment.

LR : À votre avis, où en est le Canada par rapport à tous ses engagements juridiques issus de l’accord de Paris, notamment dans son objectif de réduction de 40 à 45 % des gaz à effet de serre d’ici 2030 ?


AWD
: Je dirais que le Canada essaie justement d’atteindre ses objectifs. Parce que pour les peuples autochtones, c’est une question cruciale. Le Canada essaie de faire avancer les choses étape par étape. Mais est-ce que ça va au niveau que les peuples autochtones le réclament ? La réponse est non. Mais est-ce que le Canada essaie de faire les choses au mieux ? Je le pense. C’est dans ses obligations. C’est sûr que ça prend du temps. Mais je le rappelle toujours : nous vivons dans un contexte économique en crise. Avec l’arrivée de Donald Trump et les tarifs douaniers, beaucoup de choses sont remises en question. Le Canada n’est finalement pas l’État où toutes les choses avancent assez rapidement, mais il essaie de faire de son mieux. Il pourrait faire plus, comme tout État. Mais je pense qu’il ne faut pas tout remettre en cause.

LR : Comment l’expertise en droit de l’environnement et en politique climatique de l’U d’O a-t-elle contribué à cette conférence ? 

AWD : Moi, j’étais à la fois dans la délégation canadienne et la délégation de l’U d’O. J’ai animé la toute première conférence du panel du gouvernement canadien. C’était la présentation d’un livre récemment publié aux presses universitaires de l’Université d’Ottawa. Ce livre, intitulé 30 Climate COP Later : Stories from Canadian Participants, retrace les réalisations et défis climatiques du Canada. Nous avons eu la chance d’avoir différent.e.s expert.e.s du gouvernement et des peuples autochtones, qui ont montré comment le Canada a pu influencer le changement climatique. Dans la délégation de l’U d’O, nous avons présenté ce livre pour montrer à quel point ces questions sont importantes.

LR : Quelles ont été les grandes résolutions de cette conférence et comment le Canada pourrait s’y adapter pour aligner ses actions et ses engagements climatiques ?

 
AWD : Dans les négociations, il y avait d’abord la lutte contre la désinformation climatique. La déclaration sur l’intégrité de l’information climatique m’a marqué. C’est pour la première fois que les États, dont le Canada, s’engagent à lutter contre la désinformation. On sait que les fausses informations ralentissent l’action. Ensuite, il y a eu l’idée de la protection des forêts tropicales. Cette idée rejoint l’initiative du Président brésilien, Lula, sur la création des Fonds pour la préservation des forêts tropicales. Puis il y a eu le financement climatique. C’est le nerf de la guerre. Les pays vulnérables demandent un accès beaucoup plus rapide au financement, notamment au fonds de perte de dommages. Enfin, il y a eu le sujet explosif : les énergies fossiles. Pour le Canada, je pense qu’il faut avancer le plus rapidement dans les énergies renouvelables, essayer de développer son industrie, permettre une meilleure protection de l’environnement, et éviter de retomber dans les énergies fossiles. L’international vient toujours avant le Canada. 

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