Crédit visuel : Hidaya Tchassanti — Directrice artistique
Article rédigé par Eva-Maria Abi-Nader — Journaliste bénévole
Source d’expression culturelle et sociale, le « nail art », ou l’art de décorer ses ongles, est devenu aujourd’hui un phénomène global où chacun.e peut trouver son style. Alors que les entreprises dans le domaine continuent à fleurir, l’influence des réseaux sociaux et la quête d’expression de soi continuent à révolutionner l’art de la manucure.
L’histoire du design d’ongles et les tendances d’aujourd’hui
Au fil des temps, cet art a marqué son empreinte dans plusieurs cultures. D’après le site web ND24, qui se spécialise en design d’ongles, les premiers ongles artificiels proviennent de la noblesse chinoise. À l’ère de Cléopâtre, les momies avaient des ongles teints pour symboliser un statut élevé. Les Incas de l’Amérique du Sud, quant à eux, exprimaient leurs croyances spirituelles en dessinant sur leurs ongles les animaux qu’ils et elles vénéraient.
L’industrie courante de cette forme d’art est en partie due à la vague d’immigration des populations vietnamienne, coréenne et chinoise en 1990 en Amérique. Annie Pierre Bertin, étudiante à l’Université d’Ottawa (U d’O) et technicienne en onglerie, soutient en effet que la mondialisation de cette forme d’art a commencé en Asie, et que la plupart des bouteilles de gels proviennent de ce continent.
Avec l’ère des réseaux sociaux, Kayla Absi, étudiante à l’U d’O qui se fait fréquemment faire les ongles, mentionne le pouvoir des influenceur.se.s dans le domaine de la manucure. Elle mentionne notamment Hailey Bieber, qui a popularisé le style d’ongles chrome ou miroir, ainsi que les ongles style « glazed donut ».
L’industrie et la clientèle
Bertin raconte avoir commencé son entreprise de manucure située à Orléans après avoir démissionné d’un emploi antérieur. Elle faisait déjà ses ongles en employant la méthode Gel X depuis la pandémie, et pensait qu’ouvrir son entreprise serait une bonne façon de gagner de l’argent. Grâce à Tik Tok, YouTube et ses propres mains, elle a pu apprendre les techniques valables à sa profession.
Elle prend maintenant des rendez-vous via son compte Instagram, @adnxnails. Selon elle, les réseaux sociaux jouent une grande influence dans sa pratique : c’est d’ailleurs sur Snapchat qu’elle fait fait sa promotion. Sans les réseaux, Bertin affirme « qu’elle ne pourrait rien faire ».
Quant à Absi, elle avoue fréquenter son artiste depuis qu’elle a 13 ans, l’ayant sélectionnée grâce à son portfolio sur Instagram, son style et son niveau de précision, qui s’alignent parfaitement avec les ongles qu’elle préfère. Selon elle, les services de manucure sont une forme de self-care et représentent un moment de calme qui lui permettent de se recentrer, de réduire le stress et d’améliorer l’humeur. « Cet impact positif sur ma santé mentale justifie en partie la dépense ! », s’exclame-t-elle. Bertin souligne aussi que l’emphase des services n’est pas seulement sur les ongles comme tels, mais sur l’expérience totale de la conversation entre client.e et professionnel.le.
L’expression féminine et la confiance en soi
D’après les deux femmes, le fait de faire ses ongles permet l’expression de la féminité. Absi aime alterner entre les designs plus subtils qui mettent en avant un côté tendre et des motifs audacieux ou des couleurs intenses qui peuvent révéler une féminité plus assumée et confiante. Elle juge que « cela permet de célébrer l’individualité et la beauté sous toutes ses formes ».
D’après la technicienne en onglerie, cependant, l’aspect d’élégance de cet art décourage les hommes à faire quoi que ce soit avec leurs ongles. Bertin raconte que plusieurs de ses amis garçons ne veulent même pas se faire couper les ongles et ajouter une couche de vernis transparente, puisque cela donnerait selon eux une allure trop « féminine ».
À l’inverse, Bertin raconte ses propres préjugés envers les hommes qui travaillent dans cette spécialité : « Quand je vais dans un salon et que je vois que c’est un homme qui fait les ongles, j’ai moins tendance à aller vers lui et j’attends qu’il y ait une femme disponible. Ce n’est pas parce que je crois qu’il n’est pas capable, mais parce que j’ai seulement vu des femmes être artistiques dans ce domaine ». Bertin espère alors que davantage d’hommes se lancent dans ce domaine, afin d’un jour briser les construits sociaux qui s’y trouvent.