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Éditorial : La grève et l’Université d’Ottawa seraient-elles culturellement inconciliables?

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17 septembre 2012

– Par Vincent Rioux –

L’Université d’Ottawa (U d’O) se dirige-t-elle vers une grève générale illimitée comme on l’a vu au Québec le printemps dernier? Bien que la mobilisation en soit encore à un stade embryonnaire et que nous soyons bien loin d’une première assemblée générale pour en discuter ou même envisager un premier vote de grève, la question se pose. Ottawa, ville sobre et assez terne, où la fonction publique occupe une place considérable dans la vie quotidienne, pourrait-elle devenir, du jour au lendemain, une ville révoltée comme Montréal il y a à peine quelques mois?

Il y a quelques facteurs qui pourraient laisser croire qu’un soulèvement n’est qu’à à un coin de rue.

D’abord, depuis 2006, les étudiants ontariens ont subi plusieurs hausses des frais de scolarité, celles-ci faisant de l’Ontario la province où les étudiants paient le plus cher pour avoir accès à une éducation post-secondaire : on y paye en moyenne 6 640 $ par année, contre une moyenne de 2 519 $ au Québec (Statistiques Canada).

De plus, la Coalition large de l’association pour une solidarité syndicale étudiante (CLASSE) était en tournée en Ontario un peu plus tôt cet été et son ancien co-porte-parole, Gabriel Nadeau-Dubois, semblait avoir charmé plusieurs de nos leaders étudiants.

Enfin, le comité « Étudiant(e)s d’Ottawa en mobilisation » a vu le jour cet été pour sensibiliser la population aux hausses des frais de scolarité et à la transformation des universités en véritables entreprises.

Une question de différence culturelle?

Bien que plusieurs facteurs invitent à croire qu’un soulèvement se prépare à l’U d’O, on ne peut passer sous silence la différence culturelle existante entre le Québec et le ROC (Rest of Canada).

L’année dernière, La Rotonde a publié un article qui exposait très bien le passé plutôt tranquille de l’U d’O. La manifestation du 1er février dernier est un bon exemple de la continuité de cette culture ottavienne, pour ne pas dire  canadienne, de l’immobilisme. L’année dernière, la Fédération des étudiantes et étudiants de l’Université d’Ottawa, conjointement avec la Fédération canadienne des étudiantes et étudiants (FCÉÉ), a organisé une marche « À bas les frais » pour montrer son désaccord avec la hausse des frais de scolarité.

Des 40 000 étudiants qui sont enregistrés à l’Université, seulement une poignée, environ 250, ont participé à l’événement.

Pourtant, la Fédération étudiante avait dépensé une fortune pour en faire la promotion. Des pancartes, des chandails et même des tuques avaient été achetés par la FÉUO pour la marche. La FCÉÉ avait aussi mis en ligne une vidéo dans laquelle plusieurs leaders du mouvement « À bas les frais » de l’Ontario appelaient les étudiants à manifester contre la hausse. Ceux-ci allaient même jusqu’à qualifier la marche de « révolutionnaire » dans ledit enregistrement. Cette pseudo manifestation a eu l’effet d’un pétard mouillé.

Les deux solitudes n’auront ainsi jamais semblé plus distinctes l’une de l’autre qu’au printemps dernier. Pendant que les Ontariens faisaient rouler l’économie en achetant de l’espace publicitaire dans les autobus et tentant de vendre leur campagne « À bas les frais » comme on vend un vulgaire produit, les étudiants québécois secouaient profondément leur peuple et engageaient une véritable discussion populaire sur l’éducation, qui influencera sans doute le direction que prendront les institutions post-secondaires dans les années à venir.

Le Québec a une culture et une histoire marquée par de grandes luttes. Les Québécois ont pris d’assaut la rue alors que les frais de scolarité étaient déjà les plus bas en Amérique du Nord. Ce n’est que la suite normale des choses, diront certains.

Inversement, l’Ontario, bastion du flegmatique héritage monarchique britannique, est demeuré amorphe devant les hausses des frais de scolarités imposées par le gouvernement ontarien, hausses qui se sont succédées sans interruption depuis 2006. Faut-il vraiment s’attendre au même genre de soulèvement de la part d’un peuple qui a rarement, voire jamais, connu l’oppression et la notion de survivance, contrairement aux Québécois?

Voilà des caractéristiques qui sont intrinsèques à l’histoire et à la culture de deux peuples, encore et toujours différents dans leur solitude.

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