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Étudier la pharmacie en français : première cohorte du Pharm. D. en français

Crédit visuel : Jurgen Hoth — Photojournaliste

Article rédigé par Michelet Joseph — Chef du pupitre Actualités

Depuis l’automne 2023, un programme de doctorat de premier cycle en pharmacie vise à former davantage de professionnel.le.s francophones en santé en Ontario et à améliorer l’accès aux soins pour la minorité francophone. Deux étudiantes, Anya Hammami et Sonia Terki, ainsi que la directrice du programme, la Dre Christine Landry, se sont confiées à La Rotonde sur leurs expériences, leurs attentes et leurs souhaits concernant ce nouveau programme.

Un programme inédit pour répondre à un manque criant

En automne 2023, l’Université d’Ottawa (U d’O) a inauguré sa première promotion de doctorat de premier cycle en pharmacie (Pharm. D.) entièrement en français, une première hors-Québec. Pour la Dre Christine Landry, qui dirige ce nouveau programme, la décision de le créer répondait à une nécessité urgente. « Le principal facteur déclencheur a été l’écart croissant entre les besoins en soins pharmaceutiques en français au Canada et le manque de pharmaciens bilingues », explique-t-elle. Cette pénurie d’effectifs a un impact direct sur la qualité et la sécurité des soins, selon elle : « Dans plusieurs provinces, les communautés francophones font face à un accès limité aux services pharmaceutiques en français, ce qui a un impact direct sur la compréhension des traitements et l’équité des soins. »

Pour la Dre Landry, le programme ca au-delà des exigences en matière de langues, ni de simple vente de médicaments : « Le.la pharmacien.ne ne fait pas que compter des pilules ; c’est l’expert.e des médicaments et de la pharmacothérapie. »

Une cohorte pionnière qui étudie pour transformer la réalité francophone

Parmi les premier.ère.s étudiant.e.s, Anya Hammami et Sonia Terki incarnent l’esprit de cette cohorte précurseure. Pour Hammami, la pharmacie est le milieu idéal pour allier sa passion pour les sciences à son désir d’aider les autres. « La pharmacie représente pour moi un parfait équilibre entre la pharmacologie et le contact direct avec les patient.e.s », affirme-t-elle. Elle insiste également sur l’importance d’étudier dans sa langue maternelle : « C’est la langue dans laquelle je suis la plus confortable, et pouvoir offrir des soins en français renforce clairement la relation de confiance ».

Terki partage cette motivation linguistique et identitaire : « Je voulais recevoir une formation scientifique rigoureuse tout en évoluant dans un environnement où ma langue est pleinement reconnue », explique-t-elle. Être membre de la première promotion de cette cohorte dépasse, selon elle,  son propre parcours :

« J’ai le sentiment de participer à la construction d’une nouvelle réalité en santé pour la communauté francophone, et travailler dans un contexte minoritaire fait partie intégrante de ce qui donne un sens à cette formation. »

– Sonia Terki –

Former dans un contexte minoritaire : défis, innovations et expériences marquantes

Mettre en place et lancer ce programme a été un défi colossal pour l’U d’O. La Dre Landry évoque les obstacles rencontrés : recrutement d’un corps enseignant hautement qualifié en français, conception d’un programme novateur basé sur les activités professionnelles fiables (APF), création de simulations et de laboratoires adaptés aux réalités des communautés francophones minoritaires, et obtention des accréditations nécessaires auprès des instances nationales.

Pour les étudiant.e.s, ces défis institutionnels se traduisent dans leur vécu. Hammami souligne que d’évoluer dans un milieu où le français est minoritaire peut les amener à assurer le rôle de médiatrices linguistiques : « Dans certains milieux, nous devons parfois jouer le rôle d’intermédiaire ou de traducteur.rice ». Cette compétence, bien que demandant de l’adaptabilité, du leadership et des habiletés en communication interculturelle, s’avère très utile.

Les simulations éducatives constituent également un pilier de leur apprentissage. Terki raconte une expérience interprofessionnelle marquante où elle devait accompagner un patient francophone ayant perdu la capacité de communiquer en anglais après un AVC, en travaillant en collaboration avec une collègue en médecine qui ne parlait que l’anglais. « C’est dans ce contexte que j’ai véritablement compris la portée de l’offre active », révèle-t-elle.

Les stages représentent un autre pilier de la formation. Hammami exprime son enthousiasme pour son premier stage en milieu hospitalier : « J’ai réalisé à quel point le rôle du pharmacien ou de la pharmacienne est essentiel […] Notre intervention change réellement les choses ». Cette expérience directe avec les patient.e.s renforce sa conviction d’avoir choisi la bonne voie professionnelle.

Former une nouvelle génération de professionnel.le.s engagé.e.s

La directrice du programme et les étudiant.e.s s’accordent sur un point : le doctorat en pharmacie offert à l’Université d’Ottawa ne forme pas uniquement des spécialistes des médicaments, mais également des champion.ne.s de l’égalité d’accès aux soins de santé.

Pour mesurer l’efficacité du programme, Landry explique que la faculté de médecine surveillera plusieurs indicateurs, dont le succès aux examens nationaux, les compétences démontrées pendant les stages pratiques, l’avis des employeur.e.s, et, surtout, la représentation des diplômés dans les régions présentant un besoin accru de services en français.

Les trois femmes interrogées lancent finalement un message clair aux futur.e.s étudiant.e.s. « Foncez sans hésiter », encourage Hammami, qui voit dans cette formation « une chance unique » pour les personnes qui souhaitent aider les autres. Sonia abonde dans le même sens : « Étudier la pharmacie en français en Ontario, c’est contribuer à quelque chose de plus grand que soi ». La Dre Landry conclut avec conviction : « À celles et ceux qui veulent transformer la vie de leurs communautés : la pharmacie est pour vous ».

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