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Opinions

Échec et mat ; le tour de force de la série Le Jeu de la dame

Culture
18 décembre 2020

Crédit visuel: Nisrine Nail – Directrice artistique 

Critique rédigée par Megan Payne – Contributrice

Il est facile de se questionner sur l’intérêt d’une œuvre télévisuelle portant sur les échecs. Pourtant, les sept épisodes de la mini-série Le Jeu de la dame, ont su me prouver que cela pouvait être un sujet passionnant. Réalisée par Allan Scott et Scott Frank, la captivante histoire diffusée sur Netflix depuis le 3 octobre dernier vaut vraiment la peine d’être regardée.

Le parcours de Beth Harmon, incarnée par Anya Taylor-Joy, commence au début des années 1960. C’est dans un orphelinat du Kentucky qu’elle développe son talent, qui la propulse dans l’univers compétitif des échecs. Afin d’obtenir le titre de meilleure joueuse d’échecs du monde, elle devra surmonter des troubles de dépendance de drogues et d’alcool. 

Jeu de regard maîtrisé

Les dialogues sont utilisés judicieusement, et n’embourbent pas l’enchaînement du récit. Mais ce que j’ai le plus apprécié, ce sont les éléments visuels employés dans la série. Qu’il s’agisse des costumes, des décors ou du jeu, ils ne sont pas employés comme objets purement esthétiques ou ambiants, mais comme éléments narratifs subtils et symboliques. 

La performance des acteur.rice.s est le principal point fort de cette série. Puisque les échecs sont si peu verbaux, l’intrigue se construit par le jeu et particulièrement par le regard, dimension parfaitement maîtrisée par l’actrice principale. 

Lors du premier tournoi par exemple, il y a un miroitement remarquable du jeu des acteurs. Dans un premier temps, son opposant Harry Beltik, incarné par Harry Melling, se présente au match en retard et pourtant détendu. Il baille répétitivement ; ce match l’ennuie. Ceci déconcentre Beth, dont les yeux ne se pose plus sur l’échiquier. Mais après un moment d’absence, elle revient à la partie avec un regard traduisant son assurance, plus élevée que jamais. Ce revirement dans le regard frénétique des deux adversaires révèle un changement de la dynamique du jeu. 

Style particulier

Les costumes de la série servent non seulement de point de repère historique, mais aussi de formes d’expression. Les costumes de Beth notamment, tracent l’évolution de son personnage. De sa robe verte brodée dans sa petite enfance, en passant par les uniformes scolaires, jusqu’à un style vestimentaire qui lui est propre et unique ; ses vêtements reflètent les ères de sa vie.

Il faut noter qu’elle défie aussi les stéréotypes selon lesquelles une femme ne peut pas à la fois aimer la mode et être intelligente. Les tenues de Beth communiquent son état d’esprit. Quand elle se sent à l’aise et confiante, ses tenues sont composées de lignes épurées et des couleurs qui contrastent. Quand il y a un manque d’aplomb de sa part, on peut le deviner immédiatement. 

La narration visuelle de la mini-série réussit à captiver son public, en s’appuyant d’abord sur le solide jeu d’acteur.rice pour construire l’intrigue, puis sur les tenues pour caractériser les personnages. Elle invite son public à tomber amoureux avec ce jeu incroyablement complexe et exigeant. Cela m’a même incitée à ressortir mon échiquier, si longtemps oublié.

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