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Éditorial

Les vrai.e.s francophones sont ceux qui veulent parler la langue

Rédaction
21 octobre 2019

Crédit visuel : Andrey Gosse – directeur artistique 

Par Emmanuelle Gingras – Rédactrice en chef

Pourquoi faut-il présentement que l’on vous écrive cet article dans un français soutenu? C’est pour que l’information vous soit véhiculée de façon accessible. Est-ce pour autant LE bon français? Denise Bombardier dirait; oui, peut-être… Mais, vraiment, le « bon » français est celui qui s’assume avant tout.

Tout francophone hors Québec devrait avoir entendu parler du retour tumultueux de Denise Bombardier à Tout le monde en parle. C’est après avoir créé scandale l’année dernière lors d’une première parution déclarant que les francophones hors Québec n’existaient presque plus que la plaie de ses communautés s’est rouverte. 

Pour concilier les avis, Bombardier s’est fait approcher pour faire le tour de communautés francophones hors Québec dans le but de « prouver » qu’elle n’avait pas raison. Et ce, de la part d’un réalisateur lui-même québécois. Ce presque tour du Canada a pris la forme d’un documentaire appelé « Denise au pays des Francos ». 

Après le danger qu’ont connu les Franco-ontariens sous Ford, entre autres, il est évident que la communauté franco-ontarienne, plus que jamais, ait la révolte aux lèvres quant à ses propos. Qu’ils veuillent déverser tout ce qu’ils sont. Pis sérieux, good for them de s’affirmer!

S’armer contre le monde 

Denise Bombardier affirmait à l’émission du 6 octobre toujours être scandalisée par les problèmes au niveau de la qualité du français. Elle parle du problème derrière ne pas se faire comprendre, ce qui n’est pas entièrement illégitime quand on y pense. Ne tentons-nous pas de nous ouvrir à d’autres communautés? Ne sommes-nous pas un heureux mélange culturel? Ne souhaitons-nous pas nous comprendre entre nous pour mieux coexister?

La seule façon que l’on se comprendra entre nous, alias que nous nous écouterons sans jugement, ce n’est que lorsque l’on s’aimera soi-même. Plusieurs ont pointé les commentaires de Bombardier comme raison exacte de l’insécurité linguistique, mais à partir du moment où l’on s’assume, plus rien ne devrait nous atteindre. Bombardier a vulgarisé de nombreux faits alors en quoi doit-on réellement prendre ça à coeur?

L’insécurité linguistique n’existe que si la personne prend le choix conscient et volontaire de ne pas se laisser parler son français. Il y aura toujours des gens pour le commenter, commençons à nous en foutre.  Que ceux voulant parler le français le parle et que ceux ne voulant pas le parler ne le parle pas.

Les médias se déchaînent quant aux propos de Bombardier, ce qui est hypocrite si l’on considère que le français dans lequel ils documentent l’information est soutenu et loin d‘être teinté de leur culture, tout comme à La Rotonde. Nous souhaitons que quiconque parlant le français puisse le lire. Si l’effort d’uniformité francophone n’était pas considéré, ferions-nous même long feu en tant que médias? 

Il n’y a pas de niveau de qualité de français parlé et Bombardier n’a aucun droit de s’attaquer proprement dit à un accent qui retient en lui son contexte.  Ce n’est toutefois pas pour autant qu’il faut négliger une langue et en faire ce que l’on en veut. C’est pourquoi il faut faire la distinction entre son emploi quotidien et, par exemple, son emploi professionnel. Si l’on veut que notre belle francophonie s’étende, il faut la protéger en l’a rendant claire. Il ne s’agit pas ici de cesser d’avoir son accent, de ne plus croire en sa communauté, mais de savoir aussi l’adapter aux contextes.

Qui sont les « vrai.e.s » francophones?

L’anglophone dit au francophone « Speak White», maintenant, les francophones se le disent entre eux. Un « Speak White » devenu « Parle bien le français! ». L’anglais est la langue de la business, une langue « utile ». Maintenant, dans le français, il faut savoir le parler business, le parler « utile », pour se protéger à notre tour. Quelle triste réalité, nous savons…

We speak color, nous parlons couleur, et aimons-nous ainsi. Ceux qui aiment le français doivent comprendre l’enjeu qui l’entoure. Si on le parlait parce qu’on aime le parler et pas parce qu’il « faut » le parler ?

Ce que Bombardier a rappelé n’a pu que nous rappeler de ne pas nous croire entièrement en sécurité. Il faut continuer à s’occuper de sa francophonie comme l’on entretient une relation, l’ausculter, la questionner, la visiter, la rire et la pleurer. La comparaison fonctionne, car, après tout, ne sommes-nous pas la langue de l’amour? 

Les chiffres que représentent les communautés ne sont pas tant importantes. L’important, c’est que ceux qui parlent le français l’assument, le comprenne. Bref, oui, il y a des vrai.es francophones, et ce sont ceux qui aiment leur langue.

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