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Arts et culture

Apprendre les langues dans une galaxie près de chez vous !

Rédaction
18 septembre 2020

Crédit visuel : Céline Chapdelaine

Par Thelma Grundisch – Journaliste

Après avoir sorti deux romans pour adulte, Éric Mathieu, professeur de linguistique à l’Université d’Ottawa, publie maintenant un livre pour la jeunesse intitulé « Capitaine Boudu et les enfants de la Cédille ». Nous avons eu l’occasion de nous entretenir avec lui pour en apprendre un peu plus sur ce voyage dans le langage…

La Rotonde (LR) : Vous avez sorti mercredi dernier votre nouveau livre, est ce que vous pouvez nous parler un peu de ce qu’il aborde ?

Éric Mathieu (EM) : C’est l’histoire de cinq enfants qui se retrouvent sur une station spatiale avec le Capitaine Boudu […], un linguiste et astronaute célèbre. Ils se retrouvent là après une catastrophe sur la Terre […]. Sur cette station spatiale qui vue d’en haut ressemble à une cédille, […] ils s’ennuient un peu, jusqu’au jour où une créature un peu bizarre vient leur rendre visite […] et là commence toute une série d’aventures. 

Je l’avais vu dans un rêve […] étrange avec des enfants qui se sentaient un peu seul.e.s sur une station spatiale, loin de leurs parents, de leur famille. Je suis me suis réveillé avec cette idée de solitude, et je me suis dit « qu’est ce qui se passerait après ? » Je n’ai pas voulu faire un roman triste pour la jeunesse donc il se passe un tas d’aventure, c’est un roman aussi assez comique. […] J’aime bien jouer entre la réalité et les rêves. 

LR : Par le passé, vous avez écrit des livres qui s’adressent aux adultes, qu’est-ce qui vous a donné envie cette fois-ci d’écrire pour les enfants ? Comment votre processus d’écriture a-t-il changé pour ce livre ? 

EM : Comme j’aime vraiment écrire, ça m’intéressait de faire un autre genre de littérature […], je voulais vraiment me tester dans l’écriture. Ce qui est assez différent de mon travail de linguiste, c’est qu’il faut raconter une histoire et non pas la résumer […], il faut créer des scènes, avoir des personnages, des actions […] et ne pas raconter l’histoire au lecteur ou à la lectrice, mais lui faire vivre l’histoire à travers des événements. 

La difficulté supplémentaire par rapport au roman jeunesse c’est qu’on a toujours tendance à faire trop compliqué pour les enfants. La première version était plus longue : trop d’événements, trop de choses, il a fallu simplifier aussi le langage […], faire des phrases courtes, au présent, […] il faut se mettre à la place de l’enfant. 

LR : Quels concepts de linguistique abordez-vous dans ce livre ?

EM :Je voulais pareil, faire simple […], introduire une certaine sensibilité aux langues, à la variation des langues puisqu’il y en a pleins de différentes dans le livre et j’invente même une langue au début.

Ça montre que la langue est un peu comme un code […], et c’est une introduction sur comment les décoder, […] comment on fait pour traduire d’une langue à l’autre.

J’introduis aussi le concept des enfants qui apprennent la langue très facilement et très tôt. Ce sont des petits concepts assez simple qui se retrouvent dans un glossaire à la fin.

LR : Pour vous, comment l’identité est-elle liée au langage ?

EM : Dans le livre, il y a les Picrocholes, une population qui a été colonisée par les Tanguiens. Ils ont perdu leur langue […] et leur culture.

Ça passe aussi par la créativité […], chaque enfant de la cédille à un talent particulier, c’est leur culture. Et là, les Picrocholes ont une envie profonde de culture, de chanter, de danser, mais c’est quelque chose qui est banni par les Tanguiens.

Pour moi, c’est justement ce lien très fort entre la culture et la langue qui forme l’identité. 

LR : Vous abordez tout de même des sujets de société qui sont assez durs : colonisation, déculturation, catastrophe écologique. Comment avez-vous rendu cela abordable pour des enfants ?

EM : J’ai fait attention à ne pas donner de morale, mais plutôt j’ai essayé de montrer certaines choses sans trop donner de détails, ou de jugements, juste de donner des faits. Je donne simplement une situation et c’est au lecteur ou à la lectrice de voir un peu ce qu’il pense de ça.

LR : Est-ce que c’est vous, en quelque sorte, le Capitaine Boudu, ce linguiste qui éduque les enfants ?

EM : Oui, on pourrait penser ça, mais je suis aussi pas mal Félix, le petit garçon qui essaie de trouver ce qu’il va faire de sa vie. C’est un peu moi, […] très jeune, j’avais un intérêt énorme pour les alphabets […] et ce qui m’intéressait, moi, c’était de décoder […] toutes ces écritures un peu étrange.

C’est un peu moi aussi par rapport à l’écriture […] , j’ai mis pas mal de temps à sortir des romans, mais j’ai fait ces deux choses qui me plaisent : l’écriture et la linguistique, depuis très tôt, quand j’étais enfant.

LR : Qu’est-ce que vous essayez de faire comprendre/d’apprendre aux jeunes à travers ce livre ? Pour vous, c’est quoi le message principal que transmet votre livre ?

EM : C’est un livre vraiment sur la créativité […], sur la recherche de la langue, de la culture. Je dirais que le thème principal, c’est la créativité chez les enfants : les encourager à écrire, à dessiner, à raconter des histoires…

Je pense que c’est merveilleux et qu’il faut vraiment encourager ça. Je voulais utiliser aussi les langues, qui de la même manière sont très créatives puisqu’elles évoluent naturellement, elles vivent, elles meurent et sont même ressuscitées parfois.

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