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La descente aux enfers de l’Université d’Ottawa

11 octobre 2016

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Par Yasmine Mehdi

CLASSEMENT UNIVERSITAIRE

Qui dit automne dit divulgation des classements universitaires. Qui dit classements universitaires dit tensions à l’Université d’Ottawa (U d’O). En effet, depuis maintenant quatre ans, l’institution ottavienne voit son rang dans le classement Times Higher Education diminuer continuellement. Cette année cependant, la situation a semblé si urgente, si catastrophique, que les administrateurs ont mis sur pied un Comité spécialement destiné à l’étude des sondages. Son mandat ? Mieux les comprendre pour mieux y performer. Et si l’équation était beaucoup plus complexe que cela ?

Un comité ? Qui, quoi, où, comment, pourquoi ?

L’annonce est faite par le recteur Jacques Frémont lors de la réunion du Bureau des gouverneurs du 26 septembre dernier. L’heure est grave : l’U d’O n’est plus dans les 250 meilleures universités du monde selon Times Higher Education (THE) et elle a perdu 15,7 points sur l’évaluation de sa recherche en un an.

Pas de panique cependant, puisque Frémont présente une solution pour pallier à cette situation : la création d’un Comité spécial présidé par la vice-rectrice à la recherche Mona Nemer. Le choix pourrait sembler provocateur, le salaire de Nemer ayant connu une augmentation de 120% entre 2012 à 2014, menant le syndicat des professeurs à poursuivre l’Université en vertu de la Loi sur la responsabilisation du secteur public de 2010.

Le recteur assure que de tels Comités existent déjà dans d’autres universités, mais aucune précision n’est apportée quant à la composition de ce comité, à son coût ou à son mandat exact.

Interrogée par La Rotonde, Isabelle Mailloux-Pulkinghorn, gestionnaire aux relations avec les médias, a déclaré qu’« aucun autre détail [n’était] disponible, mais [qu’un] des objectifs de ce comité sera d’évaluer les différences majeures dans le rang attribué à l’Université dans les derniers classements THE ».

Un classement faillible?

À en juger par les déclarations de Frémont, qui a qualifié la chute de l’U d’O d’insensée et d’incompréhensible, ou encore par l’intervention de la gouverneure Michelle O’Bonsawin, qui a demandé s’il était envisageable de poursuivre le THE pour atteinte à la réputation, tout porte à croire que l’administration remet en doute la crédibilité du classement.

Patrick Charrette, directeur aux communications institutionnelles, a confirmé que des représentants de l’U d’O rencontreraient ceux du THE dans la semaine : « Nous voulons mieux comprendre leur méthode de calcul, les indicateurs utilisés et surtout déterminer comment fournir les données appropriées afin que la réalité de l’Université d’Ottawa soit mieux reflétée dans ces classements. »

Contacté par La Rotonde, Phil Baty, rédacteur en chef du classement THE, a assuré qu’aucune erreur n’avait été commise. Il a précisé que la méthodologie employée par la publication britannique avait été soumise à un auditeur, et que son objectif était « de demeurer le classement universitaire le plus fiable au monde ». Pour lui, la chute de l’U d’O s’expliquerait surtout par l’arrivée de plusieurs universités asiatiques sur la scène universitaire internationale.

En finir avec les classements une bonne fois pour toute?

Jean-Pierre Couture, professeur en science politique intéressé par l’évaluation de la recherche universitaire, se désole pour sa part de la sacralisation des classements universitaires.

« Le fait qu’il y autant de variations d’une année à l’autre en dit long sur la crédibilité de ces classements », a-t-il souligné. Concernant la création du Comité, Couture a vivement décrié l’approche de l’U d’O : « C’est le monde à l’envers, on va mouler notre institution et nos recherches en fonction de leurs critères. L’objectif n’est donc plus de faire la meilleure recherche, mais de faire celle qui permettra de monter dans le classement. »

Ironie du sort, alors que l’U d’O vantait à qui voulait l’entendre l’excellence de sa recherche et son désir de la promouvoir, on apprenait que plus de 4500 abonnement à des revues scientifiques seraient résiliés pour réaliser des économies. Encore une fois, la conception de la recherche à l’Université d’Ottawa offre un exemple de paradoxe sans pareil.

TABLEAU

Année / Rang / Recherche / Enseignement / International

2013 / 171 / 41.4 / 40.8 / 58.1

2014 /185 /34.8 / 36.5 / 62.4

2015/ 188 / 34.7 / 37.9 / 63.2

2016 / 201-250 / 36.7 / 37.1 / 69.9

2017 / 251-300 / 21 / 38.1 / 71.8

Source: THE

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