Crédit visuel : Hidaya Tchassanti — Directrice artistique
Article rédigé par Tom Chazelle Schulze — Journaliste
Le 30e recteur et vice-chancelier de l’Université d’Ottawa (U d’O), Jacques Frémont, a annoncé le 11 septembre dernier qu’il n’allait pas compléter son deuxième mandat de 5 ans « pour raisons personnelles ». Sa date de départ est fixée pour le 30 juin 2025, soit exactement un an avant la fin de son mandat.
Un bilan mitigé
D’après le rapport du recteur de l’année académique 2022-2023, l’U d’O et le recteur se sont focalisés sur le développement de la recherche, avec 432 millions de dollars octroyés à ces fins. En effet, selon Research Infosource, l’U d’O est à la huitième place dans le classement des meilleures universités de recherches canadiennes.
Jennifer Adams, présidente du Bureau des gouverneurs, souligne « son travail pour l’avancement du mandat francophone ». Le rapport du recteur indique que 30 % des inscriptions sont actuellement dans des programmes en français.
Nombre de programmes anglophones sont en effet disponibles en français. Il ne s’agit pas de tous les programmes : 81 % des programmes de premier cycle anglais ont un programme égal en français. Ce chiffre est de 68 % pour les programmes de maîtrise et de 78 % pour les doctorats.
Frémont a aussi été au centre de plusieurs polémiques durant son mandat à l’U d’O, notamment en 2020, lors de la « crise du mot en n » ou encore lors de l’interdiction de la présence de caméras durant l’allocution de l’ambassadeur de Chine pour le Canada. Après une vague de suicides en 2019-2020, un groupe d’étudiant.e.s avait manifesté devant le bureau du recteur pour réclamer plus de soutien pour la santé mentale.
Delphine Robitaille, présidente du Syndicat étudiant de l’Université d’Ottawa, constate également une « relation tendue entre le corps étudiant et l’administration universitaire ». Elle souligne particulièrement l’inaction récente de l’U d’O face au génocide palestinien .
Processus de recrutement
Suivant une tradition vieille de plusieurs décennies, le ou la prochain.e président.e et vice-recteur.rice sera un.e « anglophone- francophile ».
Le processus de sélection pour ce poste est assuré par un comité de sélection créé à partir des membres du Bureau des gouverneurs. Le comité est chargé d’aider le Bureau à nommer la personne qui correspond le mieux aux exigences du poste de recteur.ice.
Dans un courriel datant du 30 octobre, Adams a annoncé à la communauté universitaire la composition du comité de sélection. Dans ce même courriel a été annoncée la création d’une page sur le site web pour informer et impliquer la communauté universitaire dans le processus de recrutement. À noter que cette page est en cours de création.
Déroulement de la procédure
Lors de ce processus de recrutement, le comité dresse une liste de critères afin de guider la sélection du ou de la nouveau.lle président.e. Il est également tenu de consulter la communauté universitaire quant aux attentes de qualités, d’attributs et d’expérience du.de la candidat.e. Cette liste est soumise au Bureau.
Le poste à pourvoir est transmis aux candidat.e.s par voie d’annonces internes et externes, d’appels de mise en candidature ou encore de demandes d’emploi.
De là, le Comité rédige une courte liste de candidat.e.s, avec lequel.le.s il passera des entrevues. Une fois un.e candidat.e choisi.e, le Comité sollicite l’avis confidentiel des membres du Sénat et du Bureau sur la personne choisie. Le Comité exécutif du Bureau des gouverneurs formule une recommandation au Bureau, qui approuve ou refuse la nomination du.de la candidat.e et en informe la personne retenue, le Sénat et la communauté universitaire.
Le président de l’Association des professeur.e.s de l’Université d’Ottawa (APUO) Dimitri Karmis, exprime en entrevue des réserves quant au fait que le processus de recrutement demeure entièrement contrôlé par le Bureau. Dénonçant l’opacité de ce processus, Karmis souligne que l’administration de l’U d’O n’est pas pleinement disposée à réformer le système de recrutement.
Un grand rôle à combler
La collaboration et la communication transparente de l’administration avec les corps professoral, employé et étudiant composent en partie la mission de l’APUO. L’Association revendique une brisure « de la culture du secret et de l’organisation hiérarchique du pouvoir qui règnent depuis trop longtemps » à l’Université. Karmis insiste sur l’importance d’une réitération des missions de l’U d’O pour la francophonie et le bilinguisme, l’enseignement et la recherche, ainsi que les libertés académique et d’expression.
Robitaille mentionne que même si le nouveau.elle recteur.ice seul.e ne peut pas prendre de décisions unilatérales, ce poste « donne le ton à l’administration de l’Université ». Le ou la successeur.e devra faire face à un « déficit budgétaire important, des secteurs en souffrance, tels que l’infrastructure, la francophonie et l’appui aux étudiant.e.s ». Elle souligne également qu’avec un gouvernement provincial qui « sous-finance chroniquement l’éducation postsecondaire », le.la candidat.e devra établir des priorités claires et défendre fermement l’importance d’une éducation universitaire de qualité.
Dans le cadre de cet article, La Rotonde a sollicité l’Université afin d’obtenir davantage d’informations sur le processus de recrutement. À la date de publication, aucune réponse n’a été reçue. Les différents membres du comité de sélection ont également été contacté.e.s, mais n’ont pas pu fournir de détails en raison d’un accord de confidentialité qu’ils.elles ont signé.