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Arts et culture

Femmes d’influence: Emily Seguin, auteure et comédienne autochtone

Culture
20 octobre 2018

Par: Maeve Burbridge, journaliste

 

Étudiante en théâtre à l’Université d’Ottawa, Emily Seguin est aussi une auteure ottavienne qui fait rayonner la communauté autochtone dans la région, étant représentante des étudiants des Premières nations, Métis et Inuits dans le Conseil d’administration de la Fédération étudiante de l’Université Ottawa. Celle-ci souhaite voir plus de représentation des femmes autochtones dans la communauté.

La Rotonde : Quels sont les enjeux auxquels font face les femmes autochtones à Ottawa et dans sa communauté artistique?

Emily Seguin : Pour la communauté d’Ottawa, je dirais qu’il y a une idée que le monde a qu’il n’y a juste pas de communautés autochtones à Ottawa. J’ai l’impression que tout le monde pense qu’on est pas ici, et que tout le monde qui est Autochtone à Ottawa ne vient pas d’Ottawa. C’est vraiment un choc pour le monde quand je leur dit que je suis une femme autochtone qui vit à Ottawa et qui est est née à Ottawa, puis qui travaille dans le milieu artistique. C’est vraiment au niveau de la représentation. La représentation n’est pas là, en ce moment. Puis, je pense que c’est pour ça que les gens ont l’impression qu’il n’y a pas de communautés autochtones à Ottawa, ce qui n’est pas le cas. Mais quand ça vient au domaine artistique, ça peut être difficile dans le cas où le matériel dont on veut discuter, ça peut être vraiment difficile parce que c’est des vrais problèmes qui existent pour toutes les communautés autochtones du Canada. Puis, on dirait qu’à Ottawa-Gatineau, on vit dans un genre de bulle. Souvent, je trouve qu’on a l’impression qu’on est séparés du reste du Canada. Quand ça vient au théâtre, parce que je suis en théâtre, je trouve du côté positif qu’il y a beaucoup de monde qui veut avoir des artistes féminines qui sont Autochtones pour raconter leur histoires et croyances. Mais la plus grosse affaire c’est de montrer qu’on est là et on a des choses qu’on veut créer, on a des pièces qu’on veut mettre en vedette mais c’est juste qu’on n’est pas visible. Mais c’est vraiment important de reconnaître qu’on devient plus visible, on y arrive. Ça s’en vient, c’est pas comme si il y a pas d’espoir.

LR :  Y a-t-il des enjeux qui touchent les femmes autochtones dans un contexte universitaire spécifiquement?

ES : Moi, je suis vraiment chanceuse. J’ai pas fait face à beaucoup d’enjeux dans mon parcours à l’U d’O. Par contre, il y a certaines choses, et je ne sais pas si ça s’applique seulement aux femmes. Disons, il y a un certain nombre de cours offerts dans le cadre des études autochtones. C’est ouvert à tout le monde, bien sûr. On m’a déjà raconté que certains étudiants Autochtones dans ces cours n’ont pas la même chance d’apprendre parce qu’ils sont traités comme s’ils connaissent déjà le matériel. Il se font utiliser comme outil de matériel, au lieu d’un étudiant. Si le professeur sait que tel étudiant est Autochtone, ces étudiants se sentent souvent visés, parce que le professeur met ces étudiants à part. C’est bien que les professeurs reconnaissent les élèves Autochtones et leur attachement culturel, mais ça peut parfois être problématique pour les étudiants quand ils ont l’impression d’être utilisés pour le cours, et ils ne peuvent pas bénéficier du cours de la même façon que les autres.

LR : Dans les cours d’études autochtones, est-ce que les profs sont habituellement autochtones?

Emily: En ce moment, je crois qu’on a deux professeurs qui sont Autochtones. Mais, non, ce ne sont pas tous les cours autochtones qui sont enseignés par des Autochtones. Il y a souvent les cours d’anthropologie et d’histoire qui sont à propos des Premières Nations mais qui ne sont pas enseignés par quelqu’un de cette culture. Il nous faut absolument plus de professeurs autochtones. On est une grosse population d’étudiants autochtones sur le campus, mais vraiment de ratio de combien d’étudiants autochtones qu’on est versus le nombre d’étudiants (professeurs?) autochtones, c’est vraiment un gros manque. C’est vraiment important d’avoir cette représentation dans cet environnement.

LR : Est-ce que vous trouvez que la situation des femmes autochtones de la région s’améliore, reste pareille ou devient pire?

ES : Je pense que oui, ça s’améliore parce qu’on commence plus à en parler. Dans le passé c’était vraiment caché, c’était un secret. Personne avouait ce qu’il s’était passé. Donc je trouve que ça s’améliore parce qu’on commence plus à en parler, on commence à reconnaître ce qui s’est passé et ce qui se passe présentement. Ce que je trouve est moins idéal c’est que j’ai souvent l’impression que beaucoup de gens pensent que c’est tout dans le passé, que ça ne se passe pas encore, ce sont des choses qui se sont passées, mais dans la réalité il y a quand même des enjeux. Pour toute la région, il manque de la représentation plus tangible. Tu vas partout à Ottawa, il y a des statues de tout le monde qui a participé au Parlement, disons, puis c’est important de les reconnaître, mais il y a pas vraiment rien pour célébrer les leaders et les personnes importantes dans la communauté autochtone. C’est quelque chose de vraiment inspirant et de touchant quand il y a quelque chose pour reconnaître la communauté qui a été ici avant la colonisation. Dans la ville, c’est difficile de trouver des endroits où on se sent accueillis et reconnus. Je trouve que ça manque, quelque chose qu’on peut toucher, voir, visiter.

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