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Full Mental Jacket

Actualités
16 octobre 2017

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Par : Nicolas Hubert

chronique 

 

Depuis 2012, le problème de la santé mentale est de plus en plus visible, ou du moins de plus en plus audible. Sur le campus de l’Université d’Ottawa (U d’O), alors qu’un article de Radio Canada révélait à ce moment que les étudiant.e.s de premiers cycles dépensaient plus de 100 000 $ d’antidépresseurs par an, le Service d’appui au succès scolaire (SASS) et l’Association des Étudiant.e.s Gradué.e.s (GSAÉD) confirmaient que le nombre d’étudiant.e.s sous antidépresseurs était en constante augmentation.

Nouvelle approche pour mesures cosmétiques

Il est alors malheureux de constater qu’en dépit de l’annonce du recteur de l’Université, Jacques Frémont, de faire de la santé mentale LE dossier majeur de cette rentrée universitaire, l’administration de l’Université ne compte pas entreprendre une « campagne » à ce sujet, mais développer « une nouvelle approche globale de sensibilisation de la santé mentale et du mieux-être », selon les termes de Néomie Duval, la Gestionnaire de relation avec les médias de l’U d’O.

Les solutions proposées restent tristement les mêmes. Les résultats en demeureront amèrement similaires. Après la création de la Semaine du mieux-être, d’un comité sur le bien-être étudiant, d’un site internet dédié au sujet, l’U d’O annonce fièrement le prochain lancement d’une série de vidéos sur « la santé mentale et la transition à l’Université ». Mais qu’en est-il des problèmes de fond, des facteurs structuraux qui amènent tranquillement les étudiant.e.s vers les barbituriques, lorsque ce n’est pas un appel à l’aide létal dans une salle de bain du campus ?

Un aveuglement constant sur les racines du problème

La pression scolaire permanente liée non seulement à la réussite, mais également à l’endettement, ou encore à la concurrence académique aux cycles supérieurs, affecte considérablement le moral et l’équilibre psychologue des étudiant.e.s. En effet, les semaines de relâche restent des semaines de lecture, tandis que la réussite aux premiers cycles demeure dans le cadre de l’injonction et non de l’épanouissement intellectuel ou personnel.

La plupart du temps, les étudiant.e.s viennent chercher ce que l’Université leur vend, une attestation de compétence pour une insertion plus aisée sur le marché du travail. Et l’Université le leur rend bien. Elle va chercher les étudiant.e.s pour ce qu’ils sont, un apport financier direct, par les frais de scolarité, ou indirect, par le financement provincial obtenu en fonction du taux de fréquentation de l’établissement.

Mais cet équation ne fait aucune place au prix psychologique (par l’altération de leur bien-être) et financier (par un endettement à long terme) à payer par les étudiant.e.s. Aux cycles supérieurs, si les étudiant.e.s peuvent bénéficier de généreuses bourses d’admission, amorties par le labeur de leurs confrères des premiers cycles, ils demeurent enferrés dans les dynamiques concurrentielles pour l’obtention de bourses d’études ou simplement pour obtenir un poste.

Courbes bénéficiaires pour statistiques démentielles

Ainsi, l’U d’O peut toujours recruter une nouvelle conseillère principale en santé mentale, une promotion entière d’étudiant.e.s en psychologie ou même mettre des distributeurs d’antidépresseurs à la sortie des salles de cours, si nous restons que des chiffres, des courbes bénéficiaires dans des statistiques, nous continuerons à pâtir de plus en plus de ce modèle d’enseignement et de gestion des rapports humains.

On pourrait répondre que l’Université n’agit qu’en fonction des contraintes structurelles auxquelles elle est confrontée, qu’elle est obligée de maintenir un plan de gestion stable indexé sur la rentabilité. C’est vrai. On pourrait répondre que les modèles alternatifs d’enseignement ne sont qu’une utopie, qu’une construction idéologique. C’est également vrai. Mais le modèle de gestion actuel est également une utopie (ou une dystopie, au choix), façonnée par les mêmes contraintes structurelles auxquelles nous faisons face. À comparer à la fois le coût d’une prise en charge médicale et de l’endettement étudiant, il ne nous reste qu’à aller voir chez les autres comment cela se passe… et finir par prendre un aller simple pour Copenhague…

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