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Opinions

Hold-Up et COVID-19 ; entre réalité et complot

Rédaction
23 novembre 2020

Crédit visuel : Hold-Up, retour sur un chaos

Par Thelma Grundisch – Journaliste 

Le documentaire Hold-Up, sorti le 11 novembre dernier, remet en cause la crédibilité de la pandémie mondiale que nous vivons actuellement. Qualifiées de complotistes et rapidement censurées, ces deux heures et quarante-trois minutes de propagande ont provoqué de nombreux débats sur les réseaux sociaux. 

Financé par des campagnes virtuelles, Hold-Up, retour sur un chaos est un film écrit et réalisé par le journaliste et photographe français Pierre Barnérias. Il dépeint la COVID-19 comme étant une conspiration mondialiste organisée par des élites pour manipuler et anéantir une partie de la population, et entend montrer la vérité en mettant à jour les erreurs des gouvernements dans la gestion de cette crise. 

Que ce soit pour les covido-sceptiques ou les covidiots, l’engouement autour de ce film est gigantesque. Malgré sa censure sur de nombreuses plateformes vidéo telles que Vimeo et Dailymotion, le film a été largement commenté, puisque plus de 2,7 millions de personnes l’ont visionné en moins de six jours. 

Propagande complotiste 

Entre théorie de la Grande Réinitialisation, nanotechnologies cachées dans les vaccins, masques faits pour affaiblir notre système immunitaire, et camps d’isolement construits au Canada, le film ne lésine pas sur les informations trompeuses. Si les médias qualifient Hold-Up de documentaire, le caractère didactique qui constitue la définition du mot n’est pas au rendez-vous. Il se rapproche d’ailleurs davantage d’un film de propagande si l’on en juge par les techniques utilisées pour convaincre les auditeur.rice.s de la véracité des propos énoncés. 

Le journaliste Barnérias semble avoir oublié l’importance de l’éthique et de la recherche de la vérité qui devraient se trouver au cœur de son travail. Celui qui présente cette production comme une véritable enquête sur la crise de la COVID-19 ne répond pas aux critères d’un véritable travail journalistique, puisqu’il ne montre qu’une partie de la situation.

En effet, il n’y a aucune contradiction ou confrontation des points de vue des différentes sources, ni remise en question de leur légitimité, et l’on ne précise même pas quelles questions leur ont été posées. Certain.e.s intervenant.e.s du documentaire se sont d’ailleurs rapidement désolidarisé.e.s du film après sa diffusion. Leurs propos auraient été sortis de leur contexte comme l’explique Monique Pinçon-Charlot ; cela devrait mettre la puce à l’oreille au spectateur.rice concernant la qualité du film. 

Vraies questions 

Entre contre-vérités et désinformation, je me demande tout de même si il faut complètement condamner ce film. Malgré un grand nombre d’incompréhensions à caractère complotistes accompagnées d’une mise en scène faite pour attiser la peur et l’angoisse, Hold-Up m’a tout de même poussée à me questionner. Comment se forger une opinion dans un monde où l’on reçoit de nouvelles informations souvent contradictoires tous les jours ? Comment reconnaître les sources crédibles lorsque même les gouvernements et la presse se contredisent ? 

Après avoir vécu la pandémie à moitié en France et au Canada, je sais qu’il ne faut pas être expert.e en la question pour constater des contradictions dans les politiques mondiales. Les masques étaient d’abord qualifiés d’inutiles en France, puis sont devenus aujourd’hui obligatoires sous peine d’amende ; les bars et restaurants ont fermé alors que les écoles restent ouvertes. Les confinements et reconfinements régissent nos vies sans même que l’on comprenne vraiment ce qui les justifie, ou comment les conditions en sont établies. 

Face à de telles incohérences de la part d’institutions qui sont censées assurer notre protection et notre accès à l’information, il est aujourd’hui normal que la population pose des questions. Il est normal de demander si nos représentant.e.s savent réellement ce qu’ils.elles font. 

Liberté d’opinion 

Remettre en question l’imputabilité des gouvernements n’est pas un crime a priori, alors pourquoi ce documentaire provoque-t-il le scandale et la censure ? C’est bien là que se trouve le problème. Censurer les vidéos jugées complotistes, c’est aussi entraver la liberté d’expression, et remettre en question le débat démocratique. Les questions soulevées par le film sont légitimes, mais utilisées à mauvais escient en établissant un lien de causalité qui n’a pas lieu d’être, et en proposant une solution simple et unique à une situation extrêmement complexe.

Pour moi, il s’agit ici de ne pas condamner la remise en cause de certains éléments, mais plutôt de conserver son discernement face aux informations que l’on reçoit, et ne pas accepter bêtement ce que l’on nous dit. Il faudrait alors visionner Hold-Up avec du recul afin d’avoir une opinion nuancée de la situation. 

Il est essentiel de comprendre que nous n’avons pas toutes les informations sur le virus, et nous ne les aurons probablement pas avant plusieurs années. Mais cela ne doit pas pour autant nous faire tomber dans la psychose et la paranoïa qui ne feraient que nous monter les un.e.s contre les autres, au moment où l’on a plus que jamais besoin d’entraide pour surmonter la crise et combattre l’isolement.

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