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La distribution de contreventions aux itinérants : une situation illogique?

Web-Rotonde
5 mars 2012

ITINÉRANCE

Patrick Weldon | Chef de pupitre
@patweldonLR

Les amendes que reçoivent les itinérants pour des infractions mineures seraient un facteur important qui empêcherait leur réinsertion dans le système social. C’est ce que révèle une recherche menée par Marie-Ève Sylvestre, professeure de droit civile à l’U d’O, et Céline Bellot, professeure à l’École de service social de l’Université de Montréal, dans sept grandes villes canadiennes, dont Ottawa-Gatineau.

Une dette judiciaire pour les « invisibles »

La professeure Marie-Ève Sylvestre, de l’U d’O, fait part à La Rotonde des détails de leur recherche, qui a commencé en 2008. Ayant couvert les villes de Vancouver, de Winnipeg, de Toronto, d’Ottawa-Gatineau, de Montréal, de Québec et de Halifax, le duo de chercheuses a dressé un portrait de la réalité judiciaire liée aux infractions commises par les itinérants. « La plupart des infractions sont liées aux espaces publics », explique Mme Sylvestre. « Il s’agit souvent de flânerie, de mendicité, de dormir dans des parcs ou bien d’être sous l’effet de l’alcool en public », poursuit la professeure.

C’est en réalisant des entrevues avec des gens à différentes étapes du processus judiciaire que les professeures ont établi le statut des itinérants au sein du système judiciaire. Mme Sylvestre confirme que les itinérants sont « invisibles dans le système judiciaire » en raison d’un manque de représentation juridique et de participation aux processus administratifs et judiciaires.

D’après la professeure de droit civil, les itinérants accumulent une dette judiciaire importante, étant incapables de payer leurs amendes. Cette dette reste inscrite à leur dossier et nuit grandement à leur possible réinsertion dans la société.

Lynne Browne, de l’Alliance pour mettre fin à l’itinérance d’Ottawa, déplore la situation illogique : « Ces gens ont un revenu très restreint. Même s’ils ont le luxe de se payer un loyer, ils n’en ont pas beaucoup plus à épargner. »

« Le but ultime »

Selon Denis Hull, du Service de police d’Ottawa, les policiers ne donneraient des contraventions que dans les cas d’intoxication dans un lieu public : « Souvent, [les itinérants] ne paient pas et se retrouvent donc devant un juge, qui les oblige à prendre du counselling. Le but, c’est toujours d’aider la personne. C’est le but ultime. »

Changer les choses

Tout en admettant que la Ville d’Ottawa a un très bon réseau de services pour les itinérants et sans-abris, Mme Browne insiste sur le besoin de plus de financement des gouvernements fédéral et provincial : « Nous devons pouvoir créer des espaces pour ces gens plutôt qu’ils utilisent des espaces publics. »

Mme Sylvestre renchérit en expliquant que cette pratique vient ajouter aux problèmes multiples qu’ont déjà les sans-abris. Selon elle, il faudrait arrêter de traiter ces cas dans le système judiciaire afin de mettre en œuvre des changements structurels. Elle cite notamment la possibilité d’ouvrir des toilettes publiques et des espaces de repos, et de restructurer le système de refuges.

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