
Le Liban sous le feu : témoignages d’une crise humanitaire
Crédit visuel : Hidaya Tchassanti – Directrice artistique
Article rédigé par Hai Huong Lê Vu — Journaliste
Le Liban est une fois de plus plongé dans une grave crise humanitaire. Depuis septembre 2024, les bombardements israéliens ont occasionné d’importants dommages. Quel est donc l’impact humanitaire et sociopolitique du conflit actuel sur le Liban ? Comment réagit la communauté uottavienne face à cette situation ?
Les tensions entre Israël et le Liban remontent aux années 1980, marquées par l’occupation israélienne du Sud-Liban et la montée du Hezbollah. En 2024, ces tensions ont resurgi après le soutien du Hezbollah au Hamas lors du conflit avec Israël, déclenchant des frappes et incursions israéliennes dans le Sud-Liban.
Entre résilience et impuissance
Diala Badran est une citoyenne libanaise qui est censée entamer sa troisième année dans la filière francophone de droit à l’Université libanaise. « J’ai perdu des membres de ma famille. […] Il faut rester forts pour montrer que rien ne peut nous briser le moral », témoigne-t-elle en entrevue avec La Rotonde.
Une étudiante en deuxième année en sciences biomédicales à l’Université d’Ottawa (U d’O), qui a souhaité rester anonyme et dont la famille réside toujours au Liban, partage son angoisse et son sentiment d’impuissance face aux événements qui se déroulent dans son pays natal. Elle décrit la peur constante des bombardements, l’incertitude quant au sort de ses proches et la difficulté de suivre les nouvelles de loin sans pouvoir apporter son aide. « C’est difficile de voir toutes les nouvelles de loin, tu ne peux pas aider, il n’y a rien que tu peux faire, et c’est stressant parce que j’ai de la famille là-bas », confie-t-elle.
L’étudiante uottavienne poursuit en soulignant l’absence d’un gouvernement stable et la corruption qui gangrènent le pays, contribuant à l’instabilité et à la souffrance du peuple libanais. Badran, de son côté, renchérit en dénonçant l’inaction de la communauté internationale, qui « permet à Israël de continuer ces crimes de guerre ».
Une crise aux proportions marquantes
Depuis le 23 septembre dernier, le Liban a été frappé dans le cadre de l’opération israelienne « Flèches du Nord ». Dès lors, plus de 1356 personnes ont été tuées, selon un décompte de l’AFP. « Le Liban est confronté à un conflit et à une crise humanitaire aux proportions catastrophiques », alerte l’Organisation des Nations Unies (ONU).
Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugié.e.s (HCR) rapportait le 14 octobre dernier que plus d’un million de personnes ont été déplacées à l’intérieur du pays. « Les centres d’accueil gérés par le gouvernement sont débordés. Le HCR coopère avec ses partenaires humanitaires ainsi que les autorités pour mettre en place au plus vite des abris sûrs pour toutes les personnes qui en ont besoin », indique le HCR dans un article.
May Telmissany, professeure en cinéma et études arabes à l’U d’O, souligne l’impact dévastateur du conflit sur la population libanaise. Elle met en avant la violence et la brutalité de l’invasion : « On est vraiment face à un pays qui est en train d’envahir un autre pays dans le silence total de la communauté internationale », dénonce l’experte.
La professeure critique également le double standard des organisations internationales et des autres pays, qui semblent plus prompts à se mobiliser pour le Liban, pays francophone, que pour la Palestine. « On laisse tomber complètement pendant un an la Palestine. C’est deux poids deux mesures tout le temps », déclare-t-elle.
L’efficacité du droit international en cause
Le conflit au Liban soulève des questions concernant le respect du droit international. L’invasion d’un pays souverain, les bombardements indiscriminés sur des civils et les attaques contre des infrastructures civiles constituent des infractions du droit international humanitaire, selon Badran. « Violer et entrer dans une position des Nations unies est une violation flagrante supplémentaire du droit international », rappelle la Force intérimaire des Nations unies au Liban.
Telmissany exprime sa désillusion quant à la capacité de la communauté internationale à agir de manière efficace. Elle place peu d’espoir dans les organisations internationales, telles que l’ONU et l’Union européenne, et appelle à une résistance sur le terrain. Le seul espoir réside dans la résistance des habitant.e.s sur place, déclare-t-elle.
L’étudiante anonyme souligne l’importance d’un accord de paix juste et durable, qui permettrait de mettre fin au cycle de violences qui afflige la région depuis des générations. « Ils doivent trouver une façon d’arrêter tout cela est de trouver un accord de paix », affirme-t-elle.
En dépit des défis actuels, le Liban garde espoir grâce à des efforts humanitaires inspirants et à la résilience de son peuple. Récemment, l’église Saint-Joseph de Beyrouth a ouvert ses portes pour offrir un refuge aux familles immigrantes. Parallèlement, des organismes locaux s’efforcent toujours d’apporter une assistance matérielle et émotionnelle aux personnes déplacées.