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Le mouvement autochtone bat son plein

Web-Rotonde
4 février 2013

– Par Philippe Pépin – 

La vague de protestations autochtone continue sa mobilisation à travers deux événements majeurs cette semaine. Une première mobilisation, rassemblant plus ou moins 500 personnes, s’est déplacée de l’Île Victoria au Parlement fédéral. Un deuxième rassemblement, plus académique, mettait en vedette la Dre Bonita Lawrence qui venait discuter de son récent livre « Fractured Homeland », traitant des revendications territoriales algonquiennes ontariennes.

Une journée « d’unité et de guérison » sur la Colline

La marche Idle No More de lundi le 28 janvier a su braver la tempête et les vents froids, les manifestants se réunissant d’abord autour de la flamme sacrée des Algonquins, sur l’Île Victoria. Le thème de cette marche: « une journée d’unité et de guérison ». Cette fois-ci, les manifestants ont eu l’occasion d’échanger leur culture et leur sagesse dans un dialogue en image, en musique et en danse. Les deux organisatrices, Tori A. Cress et Lynda Kitchikeesic Juden, se sont d’ailleurs réjouies de l’événement: « les tambours ont tonné, et les danseurs de la guérison nous ont tous éblouis! », s’enchantent-elles.

Après une cérémonie d’ouverture conduite par les gardiens du feu Peter Decontie et Josee Whiteduck, le départ fut donné en direction de la Colline parlementaire.  Sur la Colline, les chants, les danse et les revendications ont animé le tout. Les organisateurs ont à nouveau souligné qu’Ottawa se trouve en terres autochtones, et qu’il importe de respecter la terre.  Josee Whiteduck, accueillant le groupe à la Colline par un grand discours, a remercié Theresa Spence, qui a maintenant terminé sa grève de la faim. « Nos prières sont avec elle, Theresa [Spence] est une combattante et un exemple pour chacun d’entre nous. Nous lui souhaitons un prompt rétablissement », entendais-t-on au sujet de Mme Spence. Ensuite s’en sont suivie plusieurs discours sur les thème du respect de la terre et des valeurs ancestrales, puis de la spiritualité.

Un peuple déchiré

La présentation de la Dre Bonita Lawrence, organisée dans le cadre des conférences des études autochtones, portait sur les demandes territoriales algonquiennes, en Ontario. Sonia Wesche, coordinatrice associée au programme d’études autochtones et organisatrice de l’événement, indique que l’objectif premier dans l’invitation de la conférencière était de sensibiliser la communauté étudiante. « Le discours de Dre Lawrence nous apporte une compréhension toute autre du territoire [sur] lequel on vit[…]. C’est fantastique puisque l’on parle de revendications territoriales au cœur de l’Ontario, donc près de la maison », explique-t-elle.

Le point principal de la présentation de Dre Lawrence est la déchirure du tissu social du peuple algonquien, occasionnée entre autre par la création du Haut-Canada et du Bas-Canada, et par la création des réserves. « Les peuples algonquiens n’ont jamais vraiment adhéré à ces scissions, la transformation s’est faite à travers une lente évolution dans le temps », précise-t-elle. En fait, Dre Lawrence explique que seulement les Autochtones vivant sur une réserve ont été inscrits. Ces derniers étant maintenant sédentaires, ils ont plus rapidement perdu leurs us et coutumes. Les Autochtones vivant hors réserve, donc les non-inscrits, auraient préservé leurs coutumes pour une plus longue période, pour souvent s’établir en ville. « Beaucoup ne savent pas qu’ils sont Autochtones, l’apprendre est souvent un vrai choc pour eux, car nous parlons d’un groupe encore très marginalisé par le racisme », se désole Dre Lawrence. Elle ajoute également que la sédentarisation des Autochtones dans les deux provinces a occasionné, entre autres, une différenciation dans le langage, puisque beaucoup de Premières nations aujourd’hui ne parlent qu’anglais ou français, mais aussi dans leur façon de vivre. En effet, en raison des différences dans les pratiques économiques et du traitement voué aux Autochtones dans les deux provinces, de nouvelles coutumes se sont créées, accentuant ainsi la scission du peuple.

Mme Wesche espère que plus de membres de la communauté de l’Université d’Ottawa (U d’O) vont s’intéresser aux conférences, dont la prochaine devrait suivre vers la fin du mois de février. Elle conclut en soulignant l’importance de la reconnaissance territoriale autochtone. « La première fois qu’on m’a introduite à l’idée de reconnaissance des terres autochtones était lorsque j’ai travaillé en Colombie-Britannique. Avant chaque réunion, il y avait une reconnaissance du fait que nous nous trouvions sur une terre autochtone non cédée. Une pratique inexistante à Ottawa, ce qui est bien dommage », déplore Mme Wesche.

Un comité pour les cinq demandes

Brenda Macdougall, coordinatrice par intérim au programme des études autochtones, a informé La Rotonde que, suite à une rencontre avec la gouvernance de l’U d’O, il a été établi qu’un comité de travail sera formé dans le mois de février. Le comité, composé entre autre de trois ou quatre étudiants, aura pour mandat de résoudre les cinq demandes faites en vue de « décoloniser » l’U d’O. « Certaines demandes vont être faciles à respecter, mais d’autres, telles l’établissement d’une mineure en langue autochtone, pourraient présenter un plus grand défi », explique Mme Macdougall. Il n’est pas encore clair à savoir si une réponse officielle de la gouvernance sera émise pendant le semestre d’hiver ou s’il faudra attendre à l’été. « Jusqu’ici, la gouvernance nous semble quand même favorable à collaborer dans le but de résoudre ces demandes, nous aurons des nouvelles au sujet de la formation du comité avant la semaine d’étude », ajoute Mme Macdougall.

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