Crédit visuel : Sophie Désy — Photographe
Article rédigé par Mireille Bukasa — Cheffe du pupitre Actualités
Une coalition de syndicats et d’organisations communautaires d’Ottawa plaide pour un retour au télétravail. Ce groupe invite les acteur.ice.s communautaires et résident.e.s d’Ottawa à signer une déclaration d’engagement intitulée « Réinventer la ville : s’engager à la transformer par le télétravail ». Le but de cette demande est principalement de stimuler l’économie locale et de résoudre les crises du logement et du transport en commun.
Motivé.e.s par les résultats d’une étude récente de l’Université de Carleton, concluant que le télétravail à temps plein réduit significativement les émissions de gaz à effet de serre, ces défenseur.se.s des droits des travailleur.se.s des gouvernements fédéral et provincial de la région de la capitale nationale ont organisé un débat à ce sujet, le 29 octobre dernier.
L’étude, menée auprès des employé.e.s de Services Publics et Approvisionnement Canada, du Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada et de l’Agence du revenu du Canada, révèle que la diminution du nombre des bureaux fédéraux permettrait de libérer des espaces pour le logement. 45 % des immeubles de bureaux gouvernementaux à Ottawa peuvent facilement être transformés en appartement, d’après les architectes cités dans l’étude en question.
Aménagement de l’espace
Convertir ces bureaux vides en logements et en espaces communautaires n’est pas seulement une politique intelligente, mais un aménagement urbain transformateur qui répond à notre crise du logement, souligne Jenn Carr, présidente de l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada, dans un communiqué de presse transmis à La Rotonde. « Au lieu d’imposer une présence inutile au bureau, nous devrions saisir l’occasion d’investir les deniers publics [argent appartenant à l’État] économisés grâce au télétravail dans des solutions qui profitent à toute la population canadienne », ajoute en entrevue Dany Richard, président de l’Association canadienne des agents financiers.
Ruth Lau MacDonald, vice-présidente exécutive régionale de l’Alliance de la fonction publique du Canada pour la région de la capitale nationale, estime en outre que le télétravail permet aux collectivités d’Ottawa et d’ailleurs de prospérer.
Quant à la déclaration d’engagement, dont la collecte des signatures se poursuit, il s’articule autour de cinq domaines clés : la réduction de la congestion routière, la promotion du transport en commun, la revitalisation des espaces urbains, la stimulation de l’économie locale et le développement de villes durables. D’après Nathan Prier, président de l’Association canadienne des employés professionnels, la région de la capitale nationale est le meilleur endroit pour commencer ce changement, en raison du nombre important de bâtiments fédéraux.
À l’issue de la rencontre de fin octobre, la coalition sollicite un débat plus approfondi sur les effets positifs du télétravail et sur son potentiel à transformer nos villes et les zones urbaines pour les rendre plus accessibles, plus durables et plus agréables à vivre.
Le télétravail, que des effets positifs ?
Philippe Cappeliez, professeur à l’Université d’Ottawa en psychologie, estime qu’il y a du positif et du négatif en ce qui concerne les effets du télétravail sur la santé mentale.
D’après lui, l’employeur y trouve certainement son compte, car les recherches et les données montrent clairement que le télétravail améliore la performance des employé.e.s. De plus, les travailleur.se.s peuvent y voir des aspects positifs, comme une plus grande flexibilité, un meilleur contrôle de son temps et un meilleur équilibre entre travail et vie personnelle, ajoute Cappeliez.
Cependant, poursuit-il, le revers de la médaille révèle qu’il existe également des recherches prouvant que le télétravail s’accompagne d’une surcharge de travail, en particulier pour les femmes. Celles-ci cumulent souvent simultanément les tâches domestiques, le soin des enfants et des personnes à charge. Il y a également des horaires souvent irréguliers et des heures supplémentaires, qui peuvent interférer la qualité du sommeil.
Un autre aspect négatif que pourrait entraîner le télétravail est l’isolement social, avec un risque de dépression. Le professeur précise que ce cas concerne beaucoup plus les personnes qui vivent seules.
Spécialiste en dépression mentale chez les personnes âgées, Cappeliez ne recommande pas l’idée du télétravail à temps plein. Il propose une formule hybride, permettant des interactions en personne pour maintenir la cohésion d’équipe et réduire l’isolement social. Il conclut qu’il est important de faire des pauses, d’impliquer l’activité physique dans son travail et de se donner des occasions de se retirer des écrans pour pratiquer d’autres activités.