Crédit visuel : Nicholas Monette – Directeur artistique
Monsieur le Doyen,
Au nom des étudiant.e.s de la Faculté d’éducation, nous aimerions vous faire part de nos expériences au cours des dernières semaines et des derniers mois afin d’inciter à un réel changement pour notre cohorte ainsi que celles à venir.
La profession d’enseignant.e est l’une des plus essentielles au bon déroulement d’une société. Lors de nos premiers stages, nous avons vu de nos propres yeux l’effort acharné de plusieurs enseignant.e.s qui travaillent bien au-delà des heures pour lesquelles ils.elles étaient rémunéré.e.s. Tous les jours, il est attendu que ceux.celles-ci fassent preuve d’organisation, de communication et de compétence dans leurs domaines d’expertise. La Faculté d’éducation ne peut être digne de ces vertus dans son état actuel.
Présentons d’abord les faits. Lors de la première journée du semestre d’hiver 2023, les étudiant.e.s de premier cycle se sont rendu.e.s au cours à 8h30 et aucun professeur.e ne s’est présenté. La journée suivante, un.e professeur.e nous a contactés pour nous aviser que son cours du lendemain serait repoussé puisqu’il.elle venait d’être embauché.e à midi ce même jour.
Ce n’est que vendredi que le premier cours du semestre a été offert pour plusieurs étudiant.e.s, mais à distance, et deux semaines plus tard que nous avons pu finalement rencontrer tous nos professeur.e.s. Un.e d’entre eux.elles a même confié au groupe que dans ses nombreuses années d’expérience, il.elle n’avait jamais vécu un tel manque d’organisation.
Nous avons donc pris l’initiative de contacter la Faculté afin d’exprimer notre mécontentement. Après quelques échanges par courrier électronique, la vice-doyenne a convoqué une réunion virtuelle avec les étudiant.e.s ainsi qu’un des spécialistes du programme. Si cette rencontre a offert du contexte aux péripéties du dernier mois, notamment le congé maladie soudain de l’adjointe administrative, elle n’a pas pu répondre aux questions sous-jacentes. Comment se fait-il qu’une seule employée ait accès aux informations administratives nécessaires pour offrir nos cours ? Pourquoi les professeur.e.s n’avaient pas été embauché.e.s bien avant le début du semestre ?
Avant tout, pourquoi la Faculté n’a-t-elle pas eu la courtoisie d’aviser ses étudiant.e.s ? On nous répète constamment que la communication est un pilier du système éducatif. Pourtant, la Faculté ne reflète pas cette attente.
Les enseignant.e.s accompagnateur.ice.s – nos mentors de stage – ont également dénoncé le manque d’encadrement de la part de la Faculté. Ils.elles n’avaient pas les renseignements requis et habituels pour faciliter la formation, la participation et l’évaluation des étudiant.e.s dans les écoles de la région. Ajoutons que l’un des professeurs conseillers, chargé de la liaison entre la Faculté et les enseignant.e.s, avait reçu peu ou pas d’informations concernant les stages avant la première rencontre de groupe avec les étudiant.e.s. Si les imprévus font partie de la vie d’un enseignant.e, rappelons que ce sont les étudiant.e.s qui payent pour ces services.
Et ces services, notamment dans l’enseignement et le contenu des cours, nous semblent inadéquats pour une formation à l’enseignement. Certain.e.s ne sont pas formé.e.s dans le domaine ; un.e d’entre eux.elles ne pouvait pas répondre à des questions de base, notamment sur le système de notation ontarien. Ce cas est symptomatique de plus grandes inquiétudes par rapport au programme de formation à l’enseignement. Certain.e.s professeur.e.s œuvrent en recherche, ou sont à la retraite, et n’ont donc plus le contact réel avec le terrain nécessaire pour former des futur.e.s enseignant.e.s. Par conséquent, le contenu est souvent daté et ne reflète pas ce que nous observons sur les bancs d’école.
Nous partageons l’avis qu’un grand nombre de nos cours sont inefficaces, voire inutiles. Si les titres de cours paraissent pertinents, leur contenu peut souvent être résumé en un courrier électronique par semaine. En tant que futur.e.s enseignant.e.s, nous cherchons avant tout de l’expérience et des renseignements pratiques, deux aspects souvent absents dans nos cours universitaires. Il y a un sentiment généralisé de perdre son temps qui s’installe progressivement, surtout si l’on considère que nous pourrions acquérir de l’expérience en faisant de la suppléance, ce qui est officiellement interdit par la Faculté.
Nos expériences reflètent celles de nos prédécesseur.e.s. À vrai dire, les enseignant.e.s dans nos milieux scolaires se lamentent de la Faculté d’éducation qui, selon eux.elles, baignent dans la négligence et dans l’incompétence depuis des années. Lorsque certain.e.s d’entre-eux la qualifie de « faculté affaiblie », il est difficile de ne pas se décourager.
La dure réalité est que la Faculté a un quasi-monopole sur la formation à l’enseignement en français en Ontario. Avec l’exception de l’Université Laurentienne et l’Université de l’Ontario français, presque tou.te.s les enseignant.e.s francophones passent par l’Université d’Ottawa. La Faculté est donc bien positionnée pour offrir un service moindre sachant que les étudiant.e.s n’ont pas suffisamment d’alternatives.
Blâmer uniquement la Faculté pour ce fait serait cependant réducteur. Si elle n’a pas les ressources ni le soutien nécessaire pour offrir des services de qualité, il est fort probable que l’Université d’Ottawa et le gouvernement de l’Ontario ne prennent pas au sérieux la formation des enseignant.e.s francophones. Nous sommes pourtant dans une période de forte pénurie dans le domaine de l’enseignement, surtout dans les écoles franco-ontariennes.
Nous vous demandons donc non seulement d’instaurer auprès de votre Faculté des valeurs d’organisation, de transparence et de compétence, mais de plaidoyer davantage en notre faveur pour vous assurer de nous offrir un service de qualité digne de la profession. Les étudiant.e.s actuel.le.s et ancien.ne.s ont offert des solutions pour résoudre les difficultés qui sévissent la Faculté. Il suffit de les écouter.