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Sports et bien-être

Préservatifs en désamour : l’impact d’une éducation sexuelle incomplète

Tom Chazelle Schulze
29 novembre 2024

Crédit visuel : Hidaya Tchassanti Directrice artistique

Article rédigé par Tom Chazelle Schulze — Journaliste

Un rapport publié par LetsStopAIDS le 6 octobre dernier révèle des tendances alarmantes dans les pratiques sexuelles des jeunes de 18 à 24 ans au Canada. L’analyse constate que, dans cette catégorie d’âge, seulement 24 % des personnes auraient utilisé un préservatif durant leur dernier rapport sexuel, une chute alarmante de 29 % depuis 2020. Cette baisse importante contribue à l’accroissement de la vulnérabilité aux infections transmises sexuellement (ITS) et reflète l’état d’une éducation sexuelle défaillante au pays.

Des comportements à risque pour la santé sexuelle des jeunes

La chute inquiétante de l’utilisation des préservatifs expose les jeunes adultes à un risque accru de contracter des IST, y compris le VIH, le virus causant le sida. Le Canada est d’ailleurs le seul pays du G7 à avoir enregistré une augmentation des taux de transmission du VIH dans les dernières années.

Plusieurs facteurs expliquent cette tendance. Tout d’abord, une perception erronée des risques liés aux ITS joue un rôle déterminant. Selon le compte rendu de LetsStopAIDS, de nombreux jeunes associent encore principalement le préservatif à la prévention des grossesses non désirées, négligeant son rôle crucial dans la protection contre les ITS. 

Cette méconnaissance s’accompagne d’un manque de dépistage régulier : 70 % des jeunes interrogé.e.s déclarent n’avoir jamais été testé.e.s pour les ITS ou le VIH, et parmi celles.ceux qui ont été diagnostiqué.e.s, 34 % n’ont pas cherché de traitement.

Shamin Mohamed Jr., fondateur de LetsStopAIDS, constate que pour beaucoup d’entre eux.elles, les préservatifs sont perçus comme étant dispendieux et difficiles à obtenir. Même sur des campus universitaires, l’accès aux préservatifs peut poser problème, obligeant les étudiant.e.s à se rendre à des lieux spécifiques, comme les centres de santé ou les centres étudiants, pour obtenir des préservatifs gratuits. De plus, il évoque la gêne ou le manque de confiance des jeunes adultes lorsqu’il s’agit d’acheter des préservatifs, ce qui les dissuade davantage de les utiliser.

Jessica Wood, responsable de la recherche et du développement de projets pour le Conseil d’information & éducation sexuelle du Canada (SIECCAN), explique qu’un nombre croissant de jeunes semblent se soucier de moins en moins des ITS, ce qui pourrait expliquer le déclin dans l’utilisation des préservatifs. Par ailleurs, nombre d’entre eux.elles se tournent vers d’autres méthodes contraceptives, telles que des contraceptions hormonales. Cependant, ils et elles ne seraient pas toujours au courant que ces moyens de contraception ne protègent pas forcément contre les ITS.

Les lacunes d’une éducation sexuelle en déclin 

D’après les constats de Mohamed Jr., le problème se trouve dans l’éducation sexuelle dans les écoles canadiennes. En effet, les informations relayées dans ces cursus sont souvent basées sur des discours alarmistes, qui instaurent une peur de la grossesse et des ITS. Les renseignements ne sont pas présentés de façon engageante ou pertinente pour les jeunes, ce qui peut mettre un terme aux conversations et entraver le développement de relations saines.

Similairement, Wood décrit une éducation inconstante à travers le pays. L’éducation sexuelle n’étant pas standardisée, elle varie fortement entre les régions et institutions éducatives. Cette incohérence pourrait participer aux lacunes dans la connaissance et la compréhension des sujets liés à la santé sexuelle, notamment le consentement, la prévention des ITS et les pratiques sexuelles sûres. 

Elle cite la pandémie de COVID-19 comme un facteur clé affectant la qualité de l’éducation sexuelle. En effet, la pandémie aurait interrompu l’accès à une éducation sexuelle adéquate, avec l’annulation de nombreux programmes ou leur relégation au second plan, afin de privilégier d’autres besoins éducatifs jugés plus importants. Une cohorte importante de jeunes a donc été privée d’informations cruciales pour une bonne santé sexuelle. Ce groupe aurait besoin d’une éducation et de ressources supplémentaires pour combler ce manque. 

Agir pour inverser la tendance

Pour contrer la tombée alarmante de l’utilisation des préservatifs et les risques accrus d’ITS, les deux experts affirment qu’il serait impératif d’agir rapidement et efficacement. Une première solution consisterait à rendre les préservatifs gratuits et accessibles dans des lieux fréquentés par les jeunes, comme les campus universitaires, où les barrières financières et l’embarras social limitent leur utilisation. LetsStopAIDS recommande une distribution ciblée pour encourager leur adoption.

D’après les deux organismes, l’éducation sexuelle doit être réformée pour répondre aux besoins des jeunes. En intégrant des programmes inclusifs et interactifs, comme ceux de LetsStopAIDS, qui adoptent des approches ludiques et engageantes, il serait possible d’améliorer significativement la compréhension des enjeux liés aux ITS et à la prévention du VIH. D’après Mohamed Jr., ces ateliers « montrent une hausse notable des connaissances sur le VIH, passant de 31 % à 72 % chez les participant.e.s ».

Enfin, d’après Wood, il est crucial de combattre la stigmatisation qui entoure la sexualité et les ITS, notamment par des campagnes de sensibilisation. « L’inclusion de la littératie numérique dans l’éducation sexuelle pourrait permettre aux jeunes de décrypter les messages erronés véhiculés en ligne et dans les médias, renforçant ainsi leur capacité à faire des choix informés », indique-t-elle.

D’après les experts, une approche coordonnée, impliquant les écoles, les organisations de santé, les familles et les gouvernements, est essentielle pour construire un environnement propice à des comportements sexuels responsables. En combinant ces efforts, le Canada pourrait inverser la tendance actuelle et garantir une meilleure santé sexuelle à sa jeunesse.

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