– Par Émilie Deschamps –
Afin d’en savoir plus sur la Semaine de l’Apartheid, La Rotonde s’est entretenue avec Andréa Sarkic, présidente du UOttawa Israel Awareness Committee, un groupe qui cherche à informer la population étudiante sur la situation, en Israël en plus de faire la promotion des relations israélo-canadiennes, et avec Alex Thumm, coordinateur aux affaires externes de l’organisme Solidarity for Palestinian Human Rights (SPHR), un groupe qui promeut les droits des palestiniens.
Pour Mme Sarkic, le nom même de la Semaine est problématique. « Apartheid est une façon tout à fait incorrecte de nommer la situation. […] Utiliser ce terme pour décrire Israël n’est pas seulement faux, c’est une insulte aux souffrances engendrées par le vrai apartheid, [celui] en Afrique du Sud. […] De plus, dire qu’Israël est un État d’apartheid est une attaque à la légitimité même du pays. »
Mais selon Alex Thumm, il s’agit d’une mauvaise compréhension de l’emploi du terme apartheid. « Certains croient que l’utilisation du mot apartheid veut dire que la situation en Israël est la même que celle qui avait cours en Afrique du Sud. Mais ce n’est pas ce qu’on dit, c’est devenu un terme légal reconnu par l’ONU, qui qualifie un régime dans lequel il y a une séparation intentionnelle contre un groupe ethnique. »
« Le but n’est pas […] de dire qu’il ne doit pas y avoir un État israélien. L’objectif c’est de dire que le régime actuel est illégitime, mais pas l’état ou le peuple. Ce n’est pas un peuple d’apartheid ou une religion d’apartheid, et c’est de là que vient la majorité de la mécompréhension », explique Alex Thumm, en guise de réponse aux propos de Mme Sarkic. Il ajoute aussi que ce terme est déjà employé par bon nombre de militants.
Mais Mme Sarkic est catégorique: « La Semaine de l’Apartheid est un affront aux Palestiniens et aux Israéliens modérés qui cherchent à atteindre un compromis et une reconnaissance mutuelle. »
Dialogue sur la possibilité de dialoguer
Alors que le groupe SPHR affirme que la Semaine de l’Apartheid est une occasion d’ouvrir le dialogue, Mme Sarkic considère que cet évènement n’est pas productif du tout. « Ça tend à être un évènement toxique et malhonnête qui divise les étudiants plutôt que de fournir des solutions constructives et un dialogue. La Semaine de l’Apartheid israélien simplifie les choses à outrance et donne une fausse représentation des réalités complexes du Moyen-Orient » ajoute-t-elle.
« Cela n’a pas de sens pour moi de dire que c’est contre-productif », soutient le coordinateur aux affaires externes du SPHR. « On invite ceux qui ne sont pas du même avis que nous à venir nous parler. Ce n’est pas mal d’avoir des opinions. On a nos positions, mais on peut discuter », soulève-t-il.
Il explique aussi que cette année, la Semaine de l’Apartheid s’est voulue un évènement multidisciplinaire. Les organisateurs ont planifié des évènements qui confrontaient la situation au Moyen-Orient avec celles d’autres communautés militantes. « Mardi soir, on avait un forum de comparaison de la situation de la lutte autochtone au Canada et de la situation des Palestiniens. L’idée était de montrer que c’est possible de vivre dans un état démocratique sans avoir une pleine participation au débat », énonce M. Thumm.
Finalement, le vendredi 8 mars, a eu lieu le lancement de la campagne de boycott culturel d’Israël à Ottawa, une campagne qui a déjà cours dans plusieurs grandes villes. L’objectif de cette campagne, selon M. Thumm, est que « les artistes ne collaborent pas avec des évènements organisés par l’État d’Israël ou par des organisations qui soutiennent l’armée israélienne.
Le Israel Awarenness Committee n’a pas souhaité tenir d’évènement parallèle à la Semaine de l’Apartheid afin d’éviter les « rencontres agressives », selon les dires de sa présidente. Mais cette dernière souligne que son groupe tient plusieurs tables au cours de l’année afin de « fournir de l’information sur tous les aspects d’Israël, pas seulement sur le conflit, mais aussi sur la culture, le tourisme, la politique israélienne, etc. »
« Nous voulons seulement que les gens voient Israël au-delà du conflit, tout en ayant une meilleure compréhension de tous les aspects de la situation », conclut Mme Sarkic.