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Opinions

Survol historique

Web-Rotonde
11 avril 2012

LETTRE

 

Michel Prévost, archiviste en chef de l’Université d’Ottawa

Le 80e anniversaire de La Rotonde s’avère une date très importante pour les journaux étudiants de l’Université d’Ottawa et la francophonie canadienne. En effet, La Rotonde s’illustre comme étant le plus ancien journal francophone universitaire à l’extérieur du Québec. En fait, La Rotonde occupe une place unique dans la vie étudiante du campus et nous profitons de cet anniversaire pour faire un survol historique.

Le premier numéro de La Rotonde est publié, le 21 novembre 1932, par la Société des débats français. Il s’agit du premier journal étudiant entièrement rédigé en français à l’Université d’Ottawa, puisque le journal précédent, le V.A.R., publié de 1926 à 1928, était bilingue. Le bimensuel compte quatre pages et un abonnement annuel coûte 50 sous. En 1936, le journal devient un mensuel, mais est à nouveau édité deux fois par mois dans les années 1950 et, à partir de 1964, une fois par semaine durant l’année scolaire.

Au cours des premières années, La Rotonde s’attarde aux activités de la Société des débats français, des autres associations étudiantes et aux évènements touchant l’établissement, ses dirigeants et ses professeurs. Le journal s’intéresse également aux questions concernant la jeunesse catholique et condamne vigoureusement le communisme et l’athéisme. En fait, La Rotonde se veut très respectueuse de l’ordre établi.

Les revendications étudiantes

La Rotonde devient, en 1943, l’organe de l’Association des étudiants de langue française de l’Université. À partir de 1947, elle relève de la Fédération étudiante. L’administration centrale, dirigée par les pères oblats, maintient néanmoins un regard attentif sur les affaires du journal. Cette ingérence ne pose cependant pas de problèmes au cours des premières décennies. Toutefois, après la Seconde Guerre mondiale, la société change et au milieu des années 1950, les étudiants réclament plus d’autonomie. En 1956, La Rotonde est même proclamée, lors des assises de la Presse universitaire canadienne, le journal le plus censuré du Canada. À la suite de cette déclaration, le directeur de La Rotonde exige la liberté de presse.

Ces revendications entraînent des frictions croissantes entre les dirigeants du journal et ceux de l’Université. La publication de La Rotonde est d’ailleurs interdite à quelques reprises. Les tensions atteignent un paroxysme en octobre 1958, lorsque les trois membres de la direction de La Rotonde sont démis de leurs fonctions pour avoir publié un rapport qui mécontente fortement l’administration. Le journal cesse d’être publié. Cette destitution spectaculaire soulève la colère des milieux étudiants du pays, qui considèrent cette décision comme une atteinte à la liberté de presse.

La Fédération des étudiants demande à la direction de revenir sur sa décision, mais cette dernière rejette catégoriquement la requête, ce qui entraîne la démission du président de la Fédération, Marcel Prud’homme. En somme, ce conflit confirme hors de tout doute l’autorité de l’administration centrale sur le contrôle des journaux étudiants. La Rotonde reprend sa publication, avec de nouveaux directeurs, le 30 janvier 1959. La crise est terminée.

Fait intéressant à noter : les relations entre l’administration oblate et les directeurs du journal étudiant de langue anglaise, The Fulcrum, s’avèrent beaucoup plus harmonieuses. En effet, il semble que les étudiants anglophones respectent beaucoup plus l’autorité et les décisions des dirigeants de l’établissement.

Après la restructuration de 1965

Après la restructuration de l’Université en 1965, le corps étudiant contrôle totalement ses journaux. À la fin des années 1960, toutefois, ces derniers ne parviennent plus à intéresser la population étudiante. En février 1969, l’Association générale des étudiants supprime La Rotonde et le journal étudiant anglophone, The Fulcrum, pour les remplacer par une revue bilingue, Id. Le mensuel ne connaît cependant pas le succès espéré et il disparaît rapidement. En septembre 1970, La Rotonde renaît après plusieurs mois d’absence.

Le contenu de La Rotonde évolue considérablement après 1965. Certes, le journal continue de s’intéresser de près à la Fédération étudiante et, plus récemment, à l’Association des étudiants diplômés, mais il s’arrête moins aux corps administratif et professoral. En réalité, La Rotonde traite maintenant de tous les sujets tels que le nationalisme québécois, la condition féminine, l’homosexualité, l’environnement, les frais universitaires et le sida. Les évènements culturels du campus et de la région de la capitale, ainsi que les exploits sportifs des équipes universitaires, occupent aussi une place importante.

Par ailleurs, on remarque de nombreux articles et éditoriaux traitant du bilinguisme et des droits franco-ontariens. De plus, le journal n’hésite pas à critiquer sévèrement certaines décisions et orientations de l’administration universitaire, mais aussi des associations étudiantes. En fait, La Rotonde jouit d’une totale indépendance, même si une partie de ses fonds proviennent de la Fédé et de l’Association des étudiants diplômés.

Bref, La Rotonde, publiée actuellement à 2000 exemplaires, contribue depuis près d’un siècle à informer la population étudiante et la communauté universitaire. De plus, ce journal contribue de façon tangible au rayonnement de la francophonie à l’Université d’Ottawa.

En terminant, nous tenons à remercier tous ceux et celles qui ont œuvré bénévolement, au fil du temps, au développement de ce journal unique, non seulement à l’Université d’Ottawa, mais en Ontario français. C’est grâce à votre engagement exceptionnel que La Rotonde est présente depuis si longtemps sur le campus. Longue vie à La Rotonde et bonne route vers votre centenaire.

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