Par Yasmine Mehdi
Lumière bleutée et musique d’ambiance accueillaient les habitués de La Nouvelle Scène le 10 mars dernier. Nombreux s’étaient déplacés par curiosité, intrigués par le concept du Théâtre du Trillium de laisser carte blanche à un auteur émergent. Ce soir-là, c’est la pièce On Verra qui est jouée, écrite par Philippe Landry et mise en scène par Éric Perron. Catapultés dans la vie amoureuse d’un jeune couple, c’est une prestation mémorable qui attend les spectateurs. Après tout, comme le dit un des personnages, quand on donne carte blanche à un artiste, on ne peut qu’obtenir « un show de fuckés ».
HISTOIRE D’AMOUR DU XXIe SIÈCLE
Ils se rencontrent sur Tinder, mais l’alchimie n’est pas au rendez-vous. Ils devront se recroiser dans un bar, puis à une pièce de théâtre avant de réellement donner le coup d’envoi à leur histoire.
Lui, il manque d’assurance, terrifié qu’elle le quitte. Elle, elle est indépendante, a besoin d’être seule avec ses secrets. Et pourtant, ils se retrouvent contre toute attente et partagent Pop Tarts et batailles de chatouilles, mais aussi malentendus et exaspérations.
Un matin, elle lui montre un test de grossesse : un petit plus indique qu’elle est enceinte. Si cette annonce est inattendue, cela n’empêche en rien les futurs parents de débattre du nom de l’enfant à venir – elle rêve d’un Rogassien alors qu’il penche pour un Éric.
Et pendant toute cette histoire, des questions universelles persistent : « On s’embarque tu vraiment là-dedans? », « Est-ce qu’on est normal? », « Pourquoi est-ce qu’on reste ensemble? »
Les spectateurs ne sont pas passifs dans On Verra. La quarantaine de sièges est divisée de part et d’autre de la scène, collée à l’action. Un sentiment de voyeurisme se dégage auprès du public, qui se retrouve à observer les ébats amoureux des personnages à quelques mètres à peine de ceux-ci.
ET LES TABOUS MORDIRENT LA POUSSIÈRE
On Verra, c’est aussi un véritable bulldozeur de tabous. Les acteurs sont souvent en sous-vêtements, fument des Macdonald ou des joints, sacrent souvent et abordent des sujets tabous.
On pense à la scène où il la surprend en train de regarder de la pornographie, mais surtout, au monologue de la jeune femme, qui relate une relation sexuelle non-consensuelle. « Hier soir, j’ai dit non. », « Pourquoi tu m’as laissé continuer? Est-ce que tu m’aimes encore? », « Je t’ai laissé continuer parce que je t’aime. »
On Verra, c’est un peu une antithèse de la comédie romantique. C’est maladroit, trop cru et très peu sentimental. Et pourtant, l’erreur serait d’y changer quoi que ce soit.