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Une fine ligne entre discours médiatique et racisme anti-asiatique

Mabinty Toure
7 avril 2023

Crédit visuel : Marie-Ève Duguay – Rédactrice en chef 

Article rédigé par Mabinty Touré — Journaliste

La relation Chine-Canada fait souvent la une dans la presse canadienne. En novembre dernier, l’Université d’Ottawa (l’U d’O) avait accueilli l’ambassadeur de Chine, ce qui avait créé son lot de controverses. Au mois de février, l’ambassadeur de Chine avait été convoqué à Ottawa pour expliquer « la présence d’un ballon de surveillance ». Enfin, pendant le mois de mars, les médias ont traité des accusations d’ingérence de la Chine dans le processus électoral au Canada. Quels impacts ont eus ces discussions sur les communautés asiatiques ?

Une relation qui a toujours été tumultueuse ?

Plusieurs articles dans les journaux, comme Le Droit, Radio-Canada, Le Devoir et bien d’autres, font référence aux différentes situations qui engagent les gouvernements chinois et canadiens. Comme le mentionne un article de La Rotonde, « on peut lire des titres sensationnalistes sur l’allégation, où l’on parle du péril auquel ferait face le Canada ». Au cours de sa discussion avec le journal, Dan Stanton, ex-agent de renseignements du SCRS, soulignait « l’importance de ne pas tomber dans la xénophobie et le profilage racial ».

En février 2022, La Presse rapporte un incident de racisme anti-asiatique, durant lequel une femme a crié à un individu : « la pandémie est à cause de vous, les Chinois ». Le racisme anti-asiatique a donc été exacerbé durant la pandémie, comme on a pu l’observer à plusieurs reprises dans la presse.

Pour le professeur Yongjin Zhang, les « tensions diplomatiques actuelles entre le Canada et la Chine » peuvent impacter les communautés chinoises et asiatiques en raison d’un manque de distinction entre un gouvernement, un pays, et un peuple. Il illustre ces propos en affirmant que le Canada est un pays, mais que les Canadien.ne.s peuvent avoir différentes origines. Le professeur de politique rappelle que dans chaque pays, certains membres de la société ont des opinions qui diffèrent de celles de leur gouvernement.

Une confusion qui peut mener au racisme

Emma Trinh, étudiante dans le programme de psychologie à l’U d’O, discute du fait qu’une certaine méfiance peut naître face aux discours médiatiques. Elle déplore que « lorsque ce type de méfiance et de préjugés se forme à l’égard d’un pays dans une sphère politique, certaines personnes n’hésitent pas à associer les actions et les idéologies d’un gouvernement à des individus de cette nationalité ou de cette ethnie ».

Pour elle, ces stéréotypes ne sont pas nouveaux et ont été observés dans l’histoire du Canada pendant des années, comme lors des camps d’internement pour les Canadiens japonais pendant la Seconde Guerre mondiale, dans lesquels ces derniers ont été aliénés, volés et déplacés. Un autre exemple est la loi de 1923 sur « l’exclusion des Chinois », qui interdisait les personnes issues de ce pays d’immigrer au Canada.

Trinh pense qu’en raison de ces sentiments, certaines personnes finissent par faire des suppositions sur les Chinois.e.s et les Asiatiques en général. Elle dit elle-même avoir remarqué que beaucoup d’internautes font des commentaires stéréotypés et nuisibles sur les personnes chinoises. Heureusement, l’étudiante dit n’avoir jamais expérimenté d’épisodes xénophobiques à l’U d’O.

La responsabilité des médias

Selon Zhang, la montée des mouvements antiracistes, des politiques sur l’équité, la diversité et l’inclusion (EDI), et des outils de révolution sociale améliorent la société. Il apprécie la diversité d’étudiant.e.s à l’U d’O qui travaillent dur sur ces sujets et apportent une variété de cultures, d’éthiques de travail, de langues, etc., au sein de l’établissement.

Trinh préconise un changement dans la manière dont les médias « présentent toute une série de choses ». En effet, l’étudiante exprime que « les médias peuvent être biaisés de tous les côtés de l’échiquier politique et les reportages sont faits pour attirer l’attention ». Cela, malheureusement, se fait au détriment d’un grand nombre de personnes, conclut-elle.

Le professeur indique que « toute politique est sale ». Il informe que le milieu médiatique implique « toutes sortes de jeux délicats, de campagnes de persuasion ou d’information ». Il dénonce le fait que dans plusieurs pays d’immigration, le public ne fasse pas la différence entre les différents pays asiatiques comme la Corée, la Chine et le Japon. Enfin, il rappelle que ces personnes représentent d’abord une culture, et non la politique de leur gouvernement.

Le racisme anti-asiatique reste présent dans la société canadienne, comme le démontre un sondage de l’institut Angus Reid, qui révèle que 58 % des Canadien.ne.s d’origine asiatique disent avoir subi de la discrimination. Un article de Radio-Canada sur le racisme anti-asiatique mentionne « la sous-dénonciation des actes de racisme et de discrimination envers les membres des communautés d’origine asiatique », notamment en raison du manque de connaissance des ressources de protection. Selon le professeur Zhang, une meilleure éducation et un apprentissage du bon comportement à avoir en société sont nécessaires.

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