Inscrire un terme

Retour
Actualités

Le 8 mars, une journée anodine

Actualités

Par : Nicolas Hubert

Personne n’a pu le manquer. Aujourd’hui institutionnalisé et ancré dans les mœurs, le 8 mars est devenu un sujet d’actualité à récurrence annuelle. Au même titre que le jour de la marmotte ou la Saint-Valentin. Pourtant, le 8 mars ne se distingue plus que par sa banalité, son caractère anodin et l’indifférence aux enjeux que soulève pourtant la création de cette journée de célébration.

Quelques jours auparavant, une amie me confiait son appréhension face à cette journée ainsi que sa résolution de ne pas ouvrir les réseaux sociaux tout au long du 8 mars. Ceci afin de ne pas être confrontée aux inepties médiatiques et partages en tout genre de formules de bien-pensance. Afin de ne pas être spectatrice de l’apathie médiatique. Sa plus grande peur : qu’on lui souhaite bonne fête.

Il est en effet important de rappeler que le 8 mars n’est pas la fête des femmes, mais la Journée internationale des droits des femmes. Une nuance importante. Cette journée n’est pas destinée à célébrer les femmes, mais à rappeler que parmi la multitude de discriminations, d’injustices, de violences et d’inégalités à travers le monde, les femmes en demeurent les principales cibles et les premières victimes.

Il est alors des plus navrant, des plus enrageant, d’observer la banalisation continue de cette journée et avec elle, celle du féminisme et des luttes contre les discriminations genrées. Aujourd’hui, nous ne sommes témoins que du consensus, de la validation de revendications vidées de sens.

Le féminisme a été coopté, absorbé par les mécanismes de domination et de gestion de notre environnement social. Il s’est capitalisé. Il est garant du politiquement correct, du faire valoir. Il devient une valeur ajoutée et se mesure désormais par son potentiel économique et commercial.

Le féminisme est désormais mainstream. Ce qui le rend largement plus inefficace que lorsqu’il demeurait en marge de la société, porté par des femmes qui faisaient de l’engagement social et politique une vocation contraignante, et non un style de vie en vogue.

Je n’ai ainsi pas été surpris de l’absence totale du 8 mars sur le campus, en tout cas de sa visibilité. Pourtant, existe-t-il une réelle parité dans la haute administration de l’Université ? Ou au sein du corps professoral ? Une apathie consternante, alors qu’au Québec, plus de 30 000 étudiant.e.s ont observé une journée de grève à cette occasion.

Si les nouvelles générations éduquées semblent avoir intériorisé ces enjeux, comme le démontre la constitution des exécutifs des fédérations étudiantes, il est important de souligner que ce n’est pas le cas de l’ensemble du campus universitaire, et encore moins de la société.

Pour ma part, j’aurais tant aimé voir la même ferveur et la même mobilisation sur notre campus que celles portées par les militantes espagnoles, qui ont tenu une journée de grève générale réunissant 5 millions de personnes pour dénoncer la persistance du patriarcat, les violences à caractère sexuel ou genrées, les féminicides ainsi que l’inégalité des salaires. Celles portées par les militantes turques, qui ont organisé des rassemblements à l’échelle nationale pour dénoncer les violences conjugales. Ou encore celles portées par les militantes iraniennes, qui risquent jusqu’à deux ans de prison pour manifester publiquement leur opposition aux contraintes vestimentaires qui leur sont imposées.

Inscrivez-vous à La Rotonde gratuitement !

S'inscrire