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Photo de plats cuisinés dans la salle à manger de l'Université d'Ottawa
Actualités

Accommoder les étudiant.e.s musulman.e.s durant le Ramadan : que fait l’Université d’Ottawa ?

Stella Chayer Demers
30 mars 2022

Crédit visuel : Dereck Bassa – Photographe

Article rédigé par Stella Chayer Demers — Journaliste 

Cette année, la fête religieuse musulmane du Ramadan se déroule du 1er avril au 1er mai, soit en pleine période d’examens de l’Université d’Ottawa (U d’O). Plusieurs étudiant.e.s ont exprimé leurs inquiétudes et leur mécontentement quant au fait que le service alimentaire de l’Université ne modifie pas ses heures d’ouverture pour accommoder les étudiant.e.s jeûnant.

La salle à manger de l’U d’O, qui était autrefois ouverte 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, a réduit en mars 2020 ses heures d’ouverture face à la pandémie. Cela pose un problème à certain.e.s étudiant.e.s musulman.e.s qui, pendant le Ramadan, jeûnent du lever au coucher du soleil.

La raison derrière la réduction

La réduction des heures d’ouverture de la salle à manger est l’une des multiples mesures adoptées par l’Université en temps de pandémie. Suite au relâchement des mesures du port du masque et du passeport vaccinal partout dans la province, l’U d’O a annoncé le maintien de ses mesures, incluant les heures de la salle à manger, jusqu’au 1er mai, soit le restant du semestre d’hiver.

Philippe Demers, gestionnaire au service à la clientèle pour les affaires étudiantes et chargé des opérations pour les services alimentaires sur le campus, explique que la salle à manger ne reprendra ses opérations habituelles qu’en septembre prochain, soit pour le semestre d’automne.

Deux raisons justifient selon lui ce choix, la première étant le manque de personnel, et la seconde, le besoin de désinfecter. Demers explique qu’« au début de la COVID-19, c’était vraiment inquiétant d’avoir un cas positif dans l’équipe des charges alimentaires. À la fermeture, on faisait un nettoyage en profondeur de tous les espaces actifs puis de la cuisine en bas, des salles de bain et des cases ». Le manque de personnel est toujours aujourd’hui un grand défi auquel l’Université doit faire face.

Ramadan et demande d’accommodation

Selon Leyla Fall, étudiante en première année en sciences infirmières, l’U d’O ne fait pas grand chose pour accommoder ses étudiant.e.s musulman.e.s. Elle précise qu’au niveau académique, l’Université se montre pourtant très accommodante : il suffit d’envoyer un courriel à son.sa professeur.e pour être excusé.e en raison d’une fête ou obligation religieuse.

Cependant, « lorsqu’il s’agit de quelque chose d’aussi simple que de fournir de la nourriture, qui est essentielle à notre santé, ils.elles ne sont pas conciliant.e.s », déplore Fall. Elle souligne l’importance pour les étudiant.e.s de rester en bonne santé pendant la période des examens. Selon l’étudiante, les efforts dont font preuve d’autres universités témoigne que la demande d’accommodation est une chose à laquelle il faut s’attendre.

En effet, l’Université de Toronto a mis en place un programme de boîte à déjeuner offert aux étudiant.e.s durant le Ramadan. Les étudiant.e.s de foi musulmane enregistré.e.s au programme pourront récupérer une boîte contenant un déjeuner la veille, de 17 h à 19 h. Un programme similaire a été mis en place à l’Université Laurier, par l’aumônerie musulmane.

La réponse de l’U d’O

Demers a connaissance des inquiétudes des étudiant.e.s musulman.e.s, ayant reçu plusieurs questions et commentaires à ce sujet durant les deux dernières semaines. Il affirme que le service alimentaire essaie de remédier à la chose en mettant en place des solutions pour les étudiant.e.s, telles que des recommandations de plats et l’option de plats à emporter, un service déjà offert au corps étudiant.

Demers affirme que le contenu des menus a été modifié et que des suggestions ont été faites aux élèves musulman.e.s pour les aider pendant le Ramadan. Selon lui, l’Université compte « s’ajuster de plus en plus, sachant que, dans les années futures, le Ramadan tombera probablement aussi en même temps que l’année scolaire ».

Fall est l’une des multiples étudiantes à avoir contacté les services alimentaires de l’Université, et à avoir invité d’autres à en faire de même à travers une publication sur Reddit. La réponse qu’elle a reçue de la personne responsable des services de la salle à manger l’a cependant déçu : « Elle a essentiellement dit qu’ils.elles s’assureraient que des légumes et des options végétaliennes soient disponibles, et qu’ils.elles ne prolongeraient pas les heures d’ouverture, mais que nous pourrions utiliser nos boites vertes (à emporter) pour ramener de la nourriture à la maison lors de la fermeture. »

Selon elle, c’est comme si le service de la salle à manger n’avait rien fait, puisque ces options sont déjà disponibles en temps normal. Pour l’étudiante, « ils.elles voulaient donner l’impression d’avoir fait quelque chose, mais n’ont rien fait en réalité pour nous accommoder ».

Des prix qui ne reflètent pas la valeur

Outre la question du Ramadan, plusieurs étudiant.e.s ont, selon Demers, exprimé leur mécontentement face aux prix des repas à la salle à manger. En effet, les prix pendant la pandémie sont restés les mêmes. Selon Demers, l’Université tente de compenser en organisant plus d’événements pendant la journée, « pour que les gens aient le sens d’avoir la valeur pour laquelle ils.elles ont acheté un forfait alimentaire 24/7 ».

Fall souligne que la rentabilité du forfait alimentaire sera encore pire pendant le Ramadan, « car nous allons manger seulement une ou deux fois par jour ».

Alors que feront les étudiant.e.s musulman.e.s sans accès à la salle à manger au moment de l’iftar, le repas qui rompt le jeune, et avant le lever du soleil ? La réponse n’est pas simple. Fall mentionne qu’elle n’aura pas d’autre choix que de faire l’épicerie, mais que ce n’est pas une option possible pour tout le monde : tou.te.s les étudiant.e.s n’ont selon elle pas le luxe de pouvoir acheter des produits d’épicerie en plus du prix du forfait alimentaire.

La décision de l’Université semble être prise et finale. Les élèves musulman.e.s détenteur.ice.s d’un plan d’alimentation à la salle à manger devront donc se résoudre à utiliser leurs boîtes à emporter ou à se procurer de la nourriture hors campus.

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