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Acheter local, pas si anormal !

Rédaction
13 juin 2021

Crédit visuel : Pixabay

Article rédigé par Aïcha Ducharme-Leblanc et Miléna Frachebois – Co-rédactrices en chef

Les étudiant.e.s mènent un train de vie alimentaire très particulier. Faute de temps, ils.elles commandent et achètent des plats préparés. Pourtant peu d’entre eux.elles savent définir : qu’est ce que manger « local » ? Comment le faire ?   

Pour certain.e.s consommateur.rice.s ou producteur.rice.s, comme Brett Weddle, agriculteur et gérant du Main Farmer’s Market, acheter « local » désigne acheter des aliments cultivés dans une certaine région. 

Qu’est-ce que le local ? 

Comme le fait remarquer Weddle, les 15 fournisseurs qui vendent leurs produits au Main Farmer’s Market se trouvent dans un rayon de 100 milles de la région d’Ottawa. Melanie Anderson, gestionnaire des marchés publics de Byward et Parkdale à Ottawa, fait écho à ce constat. Anderson affirme que la grande majorité des producteur.rice.s aux marchés Byward et Parkdale sont basé.e.s dans la région ottavienne. 

Cependant, manger ou acheter local peut se faire de différentes façons comme le témoignent les deux gestionnaires. Si plusieurs privilégient les marchés, d’autres comme Cécile Planchon, docteure en sociolinguistique et professeure à l’Université Carleton et l’Université d’Ottawa, s’investissent dans d’autres initiatives promouvant l’achat local. Cette dernière achète depuis six ans des « paniers bios » de la Ferme aux pleines saveurs à Gatineau. C’est-à-dire qu’elle paie à l’avance pour un certain montant de semaines afin de recevoir des paniers remplis d’aliments saisonniers provenant de la ferme. Selon Planchon, « le principe de ces paniers, c’est d’être solidaire avec des fermier.ère.s loca.ux.les », de leur permettre d’étaler leur revenu au cours d’une saison. 

C’est important !

Weddle estime qu’un.e consommateur.rice responsable est quelqu’un qui fait un effort conscient pour s’informer sur l’origine de ses aliments et qui « parle directement et cherche à connaître le.la producteur.rice ou fermier.ère auprès duquel.de laquelle il.elle achète. ». Il qualifie l’achat de nourriture locale de « vital » de nos jours dans le cadre d’une consommation responsable. Selon le fermier, il y a beaucoup de coûts externalisés et cachés dans le cadre de l’achat des produits internationaux, notamment au niveau de l’environnement. Selon Jonathan Rausseo, gestionnaire du Bureau de développement durable de l’Université d’Ottawa, il s’agit de comprendre que nos achats ont un impact. Cette compréhension à elle seule ne qualifie pas un.e consommateur.rice responsable  : « Il suffit aussi de choisir des produits qui vont minimiser cet impact là », ajoute-t-il. 

À tour de rôle, les coûts des produits locaux sont pris en charge uniquement par le.la consommateur.rice, précise Weddle. Il poursuit:  « [Acheter local], c’est une grande opportunité de changer notre économie d’une manière qui sert la communauté plutôt que les entreprises ou les formes centralisées de pouvoir. »

De son côté, Planchon est davantage préoccupée par le coût environnemental de l’achat et de l’importation de produits internationaux. « Ce n’est pas que les produits à l’international ne sont pas bons; l’impact que [le transport, l’importation] a sur la planète ne vaut absolument pas le coup » signale-t-elle. 

Pour Anderson, acheter local s’agit d’une nécessité et « les fermes locales sont un service pour le public qui doit être plus valorisé ». Pour illustrer ce point, Anderson évoque la pandémie, dans laquelle à certains moments l’approvisionnement international d’aliments a été complexe. Elle explique que l’accès à la nourriture devient compliqué dans une telle situation si la population générale ne soutient pas les fermes locales, comme c’est le cas actuellement.

Budget serré, pas de problème 

L’argent est une question fondamentale pour une consommation locale. Rausseo affirme que celle-ci revient souvent dans les discours. Selon lui, certaines personnes voulant acheter local ne s’y prennent pas de la bonne façon. Il prend pour exemple les marchés. Si en théorie c’est un bon moyen d’exposer différents producteurs locaux, il précise que les prix peuvent monter plus facilement à cause des frais causés par l’emplacement. Il conseille donc d’aller directement commander de la ferme.  « Il y a quelques années, un étudiant a fait une comparaison : il a vu une baisse annuelle de 400 $ en allant directement chercher sa nourriture chez le fermier », insiste-t-il. 

Rausseo ajoute qu’il faut être conscient et s’informer sur son environnement extérieur. Il prend pour exemple le gel qu’il y a eu au mois de mai, qui a eu un grand impact sur les fraises à Ottawa. D’après lui, ces intempéries vont impacter les prix des fraises, c’est pourquoi il faut toujours être à l’écoute pour éviter d’acheter des produits hors budgets. 

Weddle et Anderson insistent sur le fait que lorsque l’on cuisine avec des ingrédients bruts ou que l’on planifie ses repas, il est possible de préparer des repas très sains à partir d’ingrédients locaux. Et ce, pour un prix inférieur à celui des autres options populaires auprès des étudiant.e.s, comme Uber Eats. Weddle reconnaît que certains ingrédients locaux reviennent plus chers. Cependant il croit fermement que si quelqu’un veut « soutenir le local, il.elle peut changer son style de vie pour être plus proactif.ve dans la planification de ses repas » et parvenir à acheter local même avec un budget limité. 

Être locavore demande un certain investissement, remarque Anderson, mais pas nécessairement au niveau économique. Un changement de priorités et de sa conception du « cher » s’impose, selon elle. 

« Si j’achète une tonne de viande au marché, bien sûr que ce sera plus cher qu’à l’épicerie […] mais si j’achète un peu de viande au marché pour me faire plaisir et je la fais durer une semaine, cela revient moins cher que d’acheter un hamburger chez McDonald’s chaque jour par exemple », rappelle-t-elle.

D’après  Anderson, c’est par de petits gestes comme ça que l’on peut modifier ses priorités en matière de consommation alimentaire et faire de la place pour l’achat local. 

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