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Éditorial

Une ode à la presse étudiante

Web-Rotonde
6 mars 2017

Éditorial

Par Frédérique Mazerolle — Rédactrice en chef

Coupes. Coupes. Coupes.

Coupes du revenu publicitaire.

Coupes du nombre d’éditions.

Coupes des ressources humaines.

Coupes au cœur de la presse.

On ne se le cachera pas, l’état de santé de la presse aura vu des jours plus doux, surtout depuis les débuts du virage numérique. Il n’y a pas une journée où les journalistes, peu importe leur employeur, ne sont pas soumis.e.s aux multiples pressions du métier, où votre emploi pourrait bien passer à l’abattoir, comme l’on coupe l’herbe sous le pied. « Pas assez de pubs », on vous dira, en claquant la porte derrière vous. Les coupes sont à la mode ces temps-ci, alors que le journalisme de qualité ne l’est malheureusement plus. Et pourtant, ce n’est que la pointe de l’iceberg.

Bien évidemment, il va sans dire que sa cadette, la presse étudiante, ne va clairement pas nécessairement mieux. Loin des conglomérats médiatiques, des pressions éditoriales et du CRTC, celle-ci peut, dans la majorité des cas, bénéficier de l’indépendance la plus innocente qui soit. Cela étant dit, l’indépendance ne paie pas une fortune et le peu de fonds avec lequel travaillent les journaux étudiants se reflète tôt ou tard dans les publications.

Le 25 février dernier, l’Association de la presse étudiante francophone (PRÉF) se rencontrait dans le cadre de son colloque annuel pour discuter de l’avenir de la presse à l’ère des faits alternatifs et des fausses nouvelles. Alors que les problèmes associés à ces thématiques sont des problèmes en soi, un avenir encore plus sombre est réservé aux journalistes en herbe. Entre conférences et vins et fromages, anecdotes et inquiétudes, il est clair que le constat est le suivant : la presse étudiante se meurt à petit feu. Le verdict n’est pas finalisé, mais la peur est ressentie parmi plusieurs journaux étudiants.

On parle de 20, 30, voire 50 ans de presse étudiante francophone chez nos voisin.e.s québécois.e.s. La Rotonde, qui a fêté ses 80 ans en 2012, est la petite vieille du groupe. Quatre-vingts années de combats, de controverses et d’encre qui coule encore à flots. Sage et ancienne, elle se tient encore debout aujourd’hui, malgré ses hauts et ses bas. Quel est donc son secret pour rester aussi jeune et vive d’esprit dans un monde où les journaux tombent comme des mouches?

Ledit secret n’existe tout simplement pas. Malgré ses succès, La Rotonde peine également à exister, sur un campus à majorité anglophone, où les étudiant.e.s préfèrent vivre leur vie sans s’ouvrir les yeux sur la triste réalité uottavienne, ou faire taire la presse quand celle-ci parle d’enjeux sensibles qui pourraient les mettre dans l’embarras. Le grand auteur britannique George Orwell nous rappelle, dans ses temps difficiles, que le journalisme sert à exposer ce que les gens ne veulent pas voir sur papier et que tout le reste relève des relations publiques ». Ça, on le laisse à La Gazette.

Je suis lu.e., donc j’existe

La Rotonde, comme n’importe quel journal étudiant, reste une école d’apprentissage pour les curieux et les curieuses, les fauteurs et les fauteuses de trouble et les septiques des rouages de la politique étudiante et de l’administration de l’U d’O. De grands noms y auront passé, comme Daniel Leblanc du Globe & Mail et Patrick Lagacé de La Presse. Une petite recherche Google vous montera rapidement que ceux-ci étaient déjà fanatiques du journalisme d’enquête sur les bancs de l’école uottavienne. Plusieurs vous diront que la piqure est facilement pognée, lorsque l’on est plongés dans la bulle qu’est le campus de l’Université d’Ottawa.

Entre heures interminables, rédaction à ne plus finir, entrevues incisives et publications controversées, on peut parfois se demander si tout le travail en vaut nécessairement la peine.

À  quoi bon, personne ne lit La Rotonde. À en voir les présentoirs remplis à craquer et les étudiant.e.s qui font la va-et-vient devant ceux-ci, on pourrait bien y croire. C’est bien ce que nous aura autrefois dit un membre actuel de l’exécutif de la Fédération étudiante de l’Université d’Ottawa — à vous de deviner le ou la coupable.

Il ne faut pas oublier que sans la présence de la presse étudiante, on ne parlerait pas ouvertement aujourd’hui de la violence sexuelle sur les campus nord-américains. Des coupes faramineuses que l’on demande aux facultés et les services, alors que l’Université baigne dans une mer verte. Des élections douteuses de la Fédération étudiante de l’Université d’Ottawa, qui n’auraient pas leur place dans le monde des grand.e.s.

On ne parlerait pas des sujets qui sont importants, nécessaires, qui touchent la population de la minisociété que constitue le campus de l’Université d’Ottawa et ses alentours.

La Rotonde tient donc à offrir son soutien sans limites aux journaux étudiants dont les aspirations sont plus grandes que le budget et qui sont incertains du futur qui les attend. Que vos enquêtes soient fructueuses et que votre lectorat se réveille. Malgré la tempête qui s’annonce tôt ou tard, vos reportages rayonneront par eux-mêmes.

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