Crédit visuel; Viktor S. Device
Par Clémence Roy-Darisse – Cheffe du pupitre Arts et culture
Le burlesque se désigne par un mélange de danse et de théâtre où le performeur met en valeur son corps de façon artistique. La Rotonde vous présente un portrait de cet art qui gagne en popularité tout en restant peu connu.
Dans la région d’Ottawa, il y a l’Ottawa Burlesque Academy, le Ottawa International Burlesque Festival et quelques bars populaires comme The Bourbon Room et The Rainbow Bistro qui accueillent cette forme d’art.
À Gatineau, cet art demeure moins présenté. Il y a la salle Propulsion scène qui a exposé, le 20 septembre 2019, « L’ABC du burlesque ». C’est une « célébration du corps à travers l’effeuillage » explique la productrice, l’interprète et l’enseignante de burlesque Mimi Violette.
Pourquoi le burlesque ?
C’est par curiosité que Mimi Violette s’est lancée dans le burlesque. « J’avais entendu parler du Ottawa International Burlesque Festival », elle a ensuite assisté à quelques spectacles puis est tombée en amour avec le style, la forme d’art.
Certain.e.s se lancent dans cet art suite à des expériences personnelles douloureuses, c’est le cas de l’artiste Robyn Ravenous. Elle raconte qu’après avoir vu un spectacle burlesque, des événements difficiles se sont enchaînés dans sa vie et elle sentait le besoin de se redéfinir afin de sortir d’une position de victime.
Le burlesque l’a aidé à réaliser cet objectif ; « l’ambiance girl power qu’on retrouve dans les cours m’a beaucoup aidé à oser, me dépasser et réapproprier mon corps ».
Le spectacle burlesque varie énormément en fonction de l’individu. Certain.e.s rendent leur numéro comique, d’autres dramatique. Certain.e.s dansent, d’autres jouent, d’autres font les deux.
Mimi Violette, possédant une formation en théâtre, interprète un personnage qui se transforme au fur et à mesure. Chacun de ses numéros comporte une trame narrative plus ou moins prononcée.
Un de ses numéros mettait en scène trois chansons de l’album Darlène d’Hubert Lenoir et racontait l’histoire d’une fille enchaînée à ses peines d’amour, traînant un boulet avec elle et se libérant en enlevant ses vêtements.
Célébration du corps
L’ambiance d’un show burlesque est « festive, solidaire et chaleureuse » partage Robyn Ravenous. Ici, « tous les corps sont de beaux, de « bons » corps désirables, et ce, peu importe l’identité de genre ou les capacités physiques ou la taille », ajoute-t-elle.
Le burlesque serait un art « intrinsèquement politique » précise Mimi Violette. Il viserait à célébrer le corps par deux techniques ; en le glamorisant et en le ridiculisant. Il rend le corps beau par le costume extravagant, les paillettes, les plumes et le boa et en célèbre sa beauté. Il le ridiculise en riant de ses imperfections, en les banalisant.
« Un bon show burlesque c’est un show où dans la salle tout le monde peut s’identifier à un performeur (…) et se dire « je ressemble à cette personne-là », moi aussi j’ai le droit de me sentir sexy » souligne Mimi Violette .
Elle explique que c’est aussi très thérapeutique pour soi-même que de se regarder dans un miroir pendant une heure à faire des mouvements sexy.
L’artiste Robyn Ravenous rapporte l’effet direct que cet art a eu sur elle. « Ayant des problèmes d’image corporelle depuis l’adolescence et des problèmes de mobilités aux jambes, j’ai eu à réapprendre à apprécier mon corps pour ce qu’il me permet de faire et pas seulement pour son apparence. […] Ma confiance en moi s’est grandement développée depuis mes débuts », confie-t-elle.
Ravenous se rappelle avoir entendu : « wow, elle est vraiment courageuse, pour une fille taille plus ». « Comme si le talent, les habiletés physiques, la théâtralité, l’expertise prenaient le bord et ne valaient pas la peine d’être soulignés dès que l’artiste n’a pas un corps qui suit les standards de beauté » répond-t-elle.
Selon Robyn Ravenous, le changement social se fera, un numéro à la fois ; « j’ose croire que l’on peut déconstruire ce paradigme, j’ose croire que je contribue aux changements de perception ».
Burlesque à Ottawa-Gatineau ?
Les spectacles burlesques restent sporadiques et auto-financés, laissant les artistes le pratiquant en situation de précarité. Les professionnel.le.s du burlesque ne possèdent pas l’encadrement propre pour vivre de leur art ; comme une salle permanente de spectacle ou des locaux de répétition.
Mimi Violette espère un jour créer une compagnie de théâtre burlesque dans la région d’Ottawa-Gatineau.
Cette dernière aurait le mandat de : « sortir le burlesque des bars et l’amener dans le milieu du théâtre, le professionnaliser, explorer le rapport entre le théâtre et le burlesque […], donner [aux artistes] un cadre professionnel [et] un espace de création » conclut-elle.