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Les étudiant.e.s disent non à la scientologie sur le campus

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30 janvier 2020

Crédit visuel : Loïc Gauthier Le Coz – Photographe 

Par Yasmine Hursault – Cheffe du pupitre Actualités 

 

L’Université d’Ottawa (U d’O) accueille, depuis lundi 27 janvier, une exposition de la Commission des citoyen.ne.s pour les droits humains (CCDH) intitulée Psychiatrie : une industrie de la mort.

L’exposition est prévue jusqu’au vendredi 31 janvier prochain. Elle est gratuite et ouverte tous les jours, de 8 h à 22 h, au Centre universitaire Jock-Turcot, devant le Carrefour francophone. 

Les panneaux de l’exposition indiquent : « soyez là et obtenez les faits ». Ils questionnent aussi la source des abus en santé mentale.

L’exposition est accompagnée de trois séminaires organisés par des membres de la CCDH : le mardi 28 janvier à 19 h, « Que peut cacher une étiquette ? », le mercredi 29 janvier à 19 h « Sommes-nous tous fous ? » et le jeudi 30 janvier à 19 h « Electrochoc ; thérapie ou torture ? ». 

Pourquoi cette exposition ?

Sur son site internet, la CCDH se présente comme un organisme de surveillance de la santé mentale qui informerait le public et alerterait les autorités sur des abus dans le domaine.

Robert Dobson-Smith, président de la CCDH explique que la Commission a été établie par l’Église de Scientologie. Il précise qu’elle a ses propres activités sans aucune influence de l’Église. « Nous avons notre propre personnel. Des scientologues nous aident et nous l’apprécions », décrit-il. 

Dobson-Smith présente l’exposition comme intemporelle, itinérante et mondiale. Il raconte que c’est en 2007 qu’un DVD a été créé sur le même thème, et que ce serait à ce moment-là que l’exposition est née. Selon lui, l’exposition couvre un large spectre historique de la psychiatrie. « Tout est documenté, nous avons fait des recherches, cela a pris des années », précise-t-il.

Selon Yvette, scientologue présente à l’exposition, son but est d’informer sur les crimes en psychiatrie. Le président déclare que « partout dans le monde, des personnes sont traitées sans demande ou obtention d’informations de la part des médecin.e.s, concernant les médicaments et les traitements qu’elles reçoivent ».

Le président affirme que les psychiatres ne s’appuieraient pas beaucoup sur la science mais particulièrement sur le Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux. 

L’U d’O aurait été choisie comme lieu pour présenter l’exposition, car la Commission souhaite la situer dans une partie centrale de la ville et qu’il aurait été très difficile à la CCDH de trouver un local à louer en raison de sa taille importante. 

Protestations des étudiant.e.s 

Une mobilisation étudiante aurait débutée sur l’application mobile Reddit. Plusieurs manifestations étudiantes ont eu lieu devant l’exposition dont mardi le 28 janvier, à 17 h et mercredi le 29 janvier, à partir de 13 h. Des étudiant.e.s portaient des panneaux avec des mentions comme « stop à la propagande du fear mongering ».

Une pétition contre l’exposition a aussi été lancée lundi 27 janvier par Avery Monette, sur le site internet Change.org, à l’adresse de Jacques Frémont, recteur de l’U d’O. Le but de la-dite pétition est de « bannir les scientologues du campus de l’U d’O ». Elle a atteint les 900 signatures à 16 h 30, mercredi 29 janvier. 

La pétition avance que l’exposition est dangereuse car elle serait fausse dans ses affirmations. Elle demande l’interdiction d’expositions et de séminaires organisés par l’Église de Scientologie et ses affilié.e.s.

Une prise de mesures pour éviter la reproduction de « ce genre d’événement », ainsi que la mise en place par l’Université d’un comité composé d’étudiant.e.s et de « membres approprié.e.s de l’administration » pour appuyer la santé mentale des étudiant.e.s, a aussi été exigée. 

Zachary Robichaud, étudiant en troisième année en sciences politiques et communications, raconte que l’exposition présente la psychiatrie comme la racine du mal dans le monde. « [La peur incitée] sur le domaine pourrait facilement pousser les étudiant.e.s à ignorer leur santé mentale et pousser des étudiant.e.s dans des situations dangereuses », explique-t-il. Il espère que la pétition puisse mener à l’élimination de l’exposition et rappelle que tout demeure entre les mains de l’Université.

Carolina Muñoz, raconte que l’exposition l’a choquée par ses images graphiques. Elle affirme qu’un lieu comme le Centre universitaire ne convient pas car « il s’agit d’un espace public destiné aux activités et aux clubs d’étudiant.e.s, et ce groupe ne fait partie d’aucune liste de clubs approuvés par le Campus Vibez uOttawa (CVUO) [et] n’est associé aux étudiant.e.s d’aucune manière». Elle soupçonne l’Église de Scientologie d’avoir versé à l’Université une somme d’argent importante pour occuper le lieu.

Kateryna Bezsalova, étudiante en deuxième année en beaux-arts raconte avoir eu une conversation avec le recteur de l’U d’O, Jacques Frémont, mardi 28 janvier. Frémont lui expliquait que l’exposition avait été proposée à l’Université comme une « présentation de sensibilisation à la santé mentale » et non sous son réel titre. Selon lui, il serait inapproprié de rompre le contrat passé avec la Commission.

Dobson-Smith n’est pas alarmé par la contestation étudiante. Il raconte s’être entretenu avec certain.e.s d’entre eux et trouve leurs points de vue intéressants. Il explique que l’exposition a été organisée pour attirer l’attention. « Nous profitons de la controverse », affirme-t-il.

La parole de l’Université 

Isabelle Mailloux-Pulkinghorn, gestionnaire des relations avec les médias de l’U d’O, indique que l’Université « connaît l’existence de cette exposition et n’appuie aucunement les positions véhiculées par la CCDH ». Elle ajoute que l’Université est attachée à la « recherche basée sur les faits, telle que menée par son programme de psychiatrie de la Faculté de médecine ».

Elle fait connaître que l’Université encourage les débats respectueux au nom de sa politique sur la liberté d’expression qui stipule que : « l’Université reconnaît que sa valeur la plus fondamentale est celle de la liberté académique. Elle prise et protège la liberté d’enquête et la liberté d’expression sous toutes ses formes ; elle refuse donc de s’interposer entre la communauté et les vues jugées controversées ou répréhensibles, et ne permet aucune répression de la libre expression de la gamme complète de la pensée humaine, à l’intérieur des limites imposées à l’Université par la loi du Canada et de l’Ontario ».

Mailloux-Pulkinghorn précise que l’Université reste engagée à soutenir le mieux-être des étudiant.e.s, des professeur.e.s et des employé.e.s, à travers des services de santé mentale qui reposent sur des faits scientifiques.

Selon des membres de la CCDH, l’Université aurait bloqué le site internet de la Commission dans la zone de l’exposition, sans en informer celle-ci. 

Le Syndicat étudiant de l’U d’O (SÉUO) a publié un communiqué sur sa page Facebook, le mercredi 29 janvier condamnant l’exposition de la CCDH. Celui-ci manifeste son soutien aux manifestations étudiantes. Le communiqué présente également une liste de ressources en matière de santé mentale que vous pouvez consulter.

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