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Sports et bien-être

Se masturber pour briser le tabou de la sexualité

Dawson Couture
27 mars 2021

Crédit visuel : Nisrine Nail – Directrice artistique

Article rédigé par Thelma Grundisch – Cheffe du pupitre Sports & bien-être

Alors que les conversations sur le plaisir intime se font de plus en plus ouvertement dans les médias, la masturbation est toujours considérée comme un sujet qu’il faut taire. Afin de démystifier l’acte et d’éliminer le stigma qui l’entoure, il convient de revenir aux origines de cet interdit et d’en analyser les bienfaits. 

La masturbation existe depuis toujours et s’observe même chez les bébés dans le ventre de leur mère, indique Leathicia Turgeon-Dalpé, sexologue spécialisée dans les relations amoureuses. Pourtant, ces comportements ont pendant longtemps été passés sous silence, voire proscrits, notamment à cause de l’enseignement religieux, ajoute-t-elle.

Pour Léa Gakima et Ariane Gacionis, deux étudiantes à l’Université d’Ottawa et bénévoles pour le Centre de santé sexuelle de l’Université d’Ottawa, le tabou autour de la masturbation révèle un plus grand problème. Elles affirment que le système sociétal actuel lui-même est basé sur des principes de répression de la sexualité féminine. 

Bienfaits variés 

La masturbation est un tabou complexe, confie Turgeon-Dalpé, parce que « d’un côté ça fait du bien et ça provoque du plaisir, mais de l’autre, on le cache, on ne sait pas comment en parler et on se sent mal ». Il s’agit alors de se concentrer sur ce que la pratique peut apporter afin d’éliminer le stigma qui l’entoure, fait-elle remarquer.

Il est tout d’abord important de souligner que la masturbation permet une libération d’hormones, les endorphines, qui apaisent et rendent heureux.euses, indique la sexologue. Elle ajoute que ses effets positifs sont visibles au niveau de la santé physique, mais aussi mentale des individu.e.s. La pratique du sexe par soi-même est d’ailleurs souvent recommandée pour rétablir tout ce qui est mode ou mécanisme d’excitation, comme l’anorgasmie, l’impuissance, l’éjaculation précoce ou tardive, mentionne Turgeon-Dalpé.

Elle peut aussi être recommandée face à certains cas de traumatismes sexuels. Gacionis explique qu’il s’agit d’un moyen potentiel de se réconcilier avec son corps et de reprendre le contrôle sur sa sexualité. Gakima la rejoint en soulignant que pour les femmes, la sexualisation se fait souvent par autrui, et se masturber reste un moyen d’apprivoiser son corps. Elle ajoute qu’« on devient [alors] un être sexuel, au-delà d’un être sexualisé ».

Déconstruire les préjugés

Gacionis fait remarquer que c’est à cause du patriarcat et du capitalisme que s’est répandue cette stigmatisation. Dans ce système, la femme est présentée comme « pure, pudique, sans réflexion personnelle et seulement là pour satisfaire l’homme », ajoute Gakima.

Les deux étudiantes s’accordent pour dire qu’il existe un décalage dans la façon dont le sexe est abordé pour les garçons et les filles. Selon elles, le peu de discussion qui a lieu, chez les jeunes, autour de la sexualité se fait au profit des hommes, ce qui peut devenir un danger. Il est donc nécessaire, d’après Turgeon-Dalpé, de s’attaquer à déconstruire ces préjugés au plus tôt, en offrant aux enfants la possibilité de poser des questions entourant la sexualité. 

En effet, la sexologue explique que les pressions de la vie de tous les jours vont déjà leur faire découvrir des sensations en rapport avec leurs organes génitaux, et qu’il est donc important de les leur expliquer. Elle souligne d’ailleurs que le fait de ne pas aborder ces sujets invite à réprimer l’enfant, qui commence pourtant à découvrir son corps, le tout pouvant nuire à son futur épanouissement sexuel.

Passer le cap

Outre ses aspects thérapeutiques, la masturbation peut être la clé d’une vie sexuelle saine et épanouie avec l’autre, révèle Gakima. En effet, Turgeon-Dalpé soutient que se masturber est le meilleur moyen d’apprendre à se connaître, de se sentir bien dans son corps, et surtout de prendre confiance en soi.

Pour Gacionis, c’est en expérimentant avec soi-même que l’on détermine ce qu’on aime et ce que l’on n’aime pas, mais aussi ce avec quoi l’on est à l’aise, afin de pouvoir fixer des limites dans une relation. Gakima suggère que cela permet aussi de tenter de nouvelles choses et de varier les plaisirs afin de rompre les scripts sexuels traditionnels et d’atteindre l’orgasme.

C’est avec une véritable éducation sexuelle que les mentalités finiront par évoluer, poursuit Turgeon-Dalpé. C’est un travail qui se fait lentement, mais sûrement, assure-t-elle.

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