Inscrire un terme

Retour
Actualités

Une bataille pour l’âme des Francos ?

Rédaction
27 juin 2022

Crédit visuel : Harry Spink – Unsplash 

Chronique rédigée par Nicolas Michaud – Contributeur

Le 20 mai dernier, le documentaire de Francine Pelletier, intitulé Bataille pour l’âme du Québec , fut dévoilé au grand public sur Tou.tv. Celui-ci tentait de « raconter l’histoire du nationalisme québécois, des années 1960 à aujourd’hui », tel que présenté dans le résumé de Radio-Canada. La documentariste a ainsi interviewé de nombreuses personnalités, dont des professeur.e.s d’universités, des célébrités, des activistes et des politicien.ne.s. 

Le documentaire vise à démontrer, en analysant les différents événements qui ont marqué le Québec lors des dernières décennies, comment le souverainisme de René Lévesque, souvent considéré comme inclusif et progressiste, s’est transformé en un nationalisme conservateur avec le temps. Pour Jean-François Lisée, ancien chef du Parti Québécois (PQ), affirmer que le climat politique de la province est maintenant dominé par un nationalisme conservateur serait une manière de « torturer l’histoire du Québec ».

D’après lui, le PQ et le nationalisme québécois se seraient réconciliés avec les minorités de la province grâce à l’élection de Pauline Marois à la chefferie du parti en 2007.  En ce sens, le « nous » qu’elle employait lors de ses prises de paroles se voulait, selon lui, supposément inclusif. Pourtant, ceci ne l’empêcha pas, lorsqu’elle fut élue, d’introduire la Charte des valeurs québécoises à l’Assemblée nationale, qui visait notamment à interdire notamment le port du hijab et autres signes religieux par les employé.e.s de l’État en position d’autorité. Même s’il fut rejeté suite à la défaite du PQ lors des élections de 2014, ce projet de loi fut repris par le gouvernement Legault sous le nom de la Loi 21.

Quelle utilité pour le.la Québécois.e moyen.ne ? 

Certain.e.s, comme dans le documentaire de Francine Pelletier, diront que cela donne le sentiment vide d’avoir du pouvoir. Ont-il.elle.s tort? D’après eux, le développement de cette législation serait lié aux échecs référendaires et à la cible facile que représentaient plusieurs minorités visibles, telles que les femmes musulmanes.

Alors qu’on prononçait un discours au nom de l’importance de la laïcité, on refusait tout de même d’enlever le crucifix à l’Assemblée nationale, qui fut pourtant mise en place pour symboliser l’union entre l’État québécois et l’Église catholique. Et même après son retrait, le Premier ministre du Québec n’hésita pas à se référer à Maurice Duplessis de manière positive. Cet ancien Premier ministre était tout de même reconnu dans le discours public pour son attachement à l’influence de l’Église dans plusieurs sphères de l’État québécois.

Dans le même sens, la nouvelle Loi 96, récemment adoptée par l’Assemblée nationale, vise de nouveau, et de manière disproportionnée, les minorités. Pensons notamment aux nouveaux.elles arrivant.e.s, qui doivent apprendre le français en moins de 6 mois et aux Autochtones n’ayant pas réussi à obtenir les amendements souhaités.

Le gouvernement a-t-il déjà considéré que ces décisions étaient peut-être plus néfastes qu’autre chose pour les Québécoi.se.s ? La Loi 21, par exemple, prive l’éducation d’enseignantes portant le hijab alors qu’une pénurie sévit dans les écoles du Québec. De plus, la Loi 96, qui cherche à imposer le français par la contrainte, est venue provoquer la grogne de nombre d’allophones.

Des lois contre-productives pour la francophonie canadienne ?

Ces lois discriminatoires viennent ainsi associer à l’image du Québec, province représentant une part importante de la francophonie canadienne, celle d’un nationalisme conservateur. Qu’on le veuille ou non, elles pousseront sans doute plusieurs à se sentir exclu.e.s du fait français au Québec, et dans le reste du Canada. Cette législation aura finalement et ironiquement pour effet d’orienter les nouveaux.elles arrivant.e.s vers l’anglais. 

Pourtant, on retrouve à l’Assemblée nationale plusieurs député.e.s ayant des origines extérieures au Québec et qui ont une maîtrise excellente du français : Dominique Anglade, Ruba Ghazal, Andrés Fontecilla, pour n’en nommer que quelques-un.e.s.

En tant que francophone vivant hors-Québec, qui tente de faire la promotion du fait français en milieu minoritaire, je subis sans cesse cette association avec le nationalisme conservateur défendu par la Coalition avenir Québec. D’une part, c’est insultant, mais de l’autre, il est difficile de ne pas les comprendre lorsque le dernier Premier ministre du Québec à avoir initié un référendum sur la souveraineté a blâmé sa défaite sur « l’argent et les votes ethniques ».

La Loi 96, sous sa forme actuelle, impose des attentes injustes envers les allophones par rapport à l’apprentissage du français, qui devient, dans ce cas-ci, quasiment humiliant. Après l’avoir subi pendant des siècles, les Québécois.e.s devraient savoir plus que quiconque qu’imposer une langue par la force est voué à l’échec.

 

Inscrivez-vous à La Rotonde gratuitement !

S'inscrire