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Entrevue avec Denis Vaillancourt – président de l’AFO

Web-Rotonde
5 octobre 2014

Sans titre– Par Clémence Labasse –

La Rotonde a rencontré Denis Vaillancourt, président de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), l’organisme porte-parole des francophones de la province, pour qu’il nous explique les enjeux abordés lors du sommet des États généraux.

La Rotonde : Qui sont exactement les Franco-Ontariens?

Denis Vaillancourt : À l’AFO, on dit que si vous parlez français et que vous vivez en Ontario, vous êtes franco-ontarien! À l’origine, on disait que la francophonie ontarienne était composée de « francophones de souche », mais de nos jours, la communauté s’est diversifiée. Elle a évolué, c’est une francophonie plurielle. La communauté est unie par la langue mais diversifiée de par sa culture et sa géographie. On est présents aux quatre coins de la province, des régions les plus isolées au plus populeuses. Franco-ontarien ou francophone de l’Ontario, pour moi, les mots sont interchangeables.

LR : D’où vient la nécessité de créer une université franco-ontarienne?

DV : C’est le maillon manquant pour parachever un système d’éducation qui a commencé à être mis en place dans les années soixante. Aujourd’hui, il existe 80 établissements secondaires francophones en Ontario, avec près de 100 000 étudiants qui les fréquentent, dans toute la province. Mais les jeunes qui sortent de ces établissements n’ont pas de quoi continuer leur éducation dans la langue de leur choix. Les universités bilingues sont un milieu où nous sommes toujours minoritaires et où l’anglais a tendance à prôner, ce sont des foyers d’assimilation.

La notion d’être « chez nous », de gérer nos propres institutions, c’est le principe qui a guidé l’établissement des conseils scolaires en français. Il manque cette institution-là au niveau postsecondaire. Je pense que les États généraux et les consultations effectuées depuis un an ont permis de vérifier si l’université francophone est quelque chose qui est désiré et qu’on devrait faire. Le consensus a été très large sur ce sujet. Je dirais qu’il y a 1000 personnes, étudiants, jeunes, professeurs et membres de la communauté, qui se sont réunis pour dire « oui » au projet.

LR : Depuis combien de temps ce processus a-t-il commencé?

DV : Il y a deux ans, en 2012, lors d’une assemblée générale, les étudiants du Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO) ont soulevé la question du postsecondaire. Un mandat a été donné à l’assemblée par des délégués et le dossier a été pris en charge par le RÉFO.

Les deux problèmes clés étaient, premièrement, l’accessibilité aux programmes en français et deuxièmement, la complétude de ces programmes. C’est-à-dire, dans le premier cas, que les statistiques ont montré que seulement 22 % des programmes offerts dans la province sont disponibles en français, ce qui est problématique, et dans le second cas, que parmi ce 22 %, il est très rare de pouvoir effectuer les programmes dans leur entièreté en français. Généralement, à partir de la troisième ou quatrième année, l’étudiant sera obligé de prendre des cours dans la langue de la majorité.

À partir de ces constats, on s’est dit qu’il fallait qu’on parle a la communauté pour avoir leurs avis sur la question et c’est à partir de là qu’ont commencé les consultations régionales, en hiver et printemps 2013. Tout ce cheminement nous a amenés aujourd’hui à essayer de déterminer quel modèle de gouvernance serait préférable pour cette université.

Nous avons passé de la phase « Est-ce que c’est ce que l’on veut? » pour maintenant travailler sur « Comment peut-on le réaliser? ».

LR : Alors, que reste-t-il à faire?

Il faut maintenant recueillir certaines données avec des spécialistes, et il faut explorer certains modèles de gouvernance, que ce soit une université autonome, un système d’affiliation ou une fédération. Ensuite, il faut continuer à nourrir la réflexion et à informer, parce qu’à un moment donné, dans le meilleur des cas, soit on va proposer une solution au gouvernent et elle va être acceptée, soit elle va être refusée, et il sera alors nécessaire de négocier et de revendiquer.

Voilà les prochaines étapes : articuler un projet solide et concret, pour en bout de ligne, arriver à une institution qui offrirait des cours ou un amalgame de choses, avec une gouvernance francophone.

LR : Quel effet aurait potentiellement la création d’une telle université sur les institutions déjà en place en Ontario, comme par exemple la plus grande université bilingue au monde, l’Université d’Ottawa?

Chaque étudiant a des critères personnels pour choisir son université. Il est peu probable que tous les étudiants francophones de l’Ontario veulent rejoindre l’université franco-ontarienne. Malgré tout, il va y avoir un déplacement progressif des élèves, peut-être pas des étudiants qui ont déjà bien entamé leur cursus, mais un nombre conséquent. Cela générera sans doute des changements de programme au sein de l’université bilingue, du fait des nouveaux programmes offerts dans notre université.

Je pense qu’il y a une place pour les deux genres d’institution, parce qu’il y a des créneaux qui n’appartiennent qu’aux universités bilingues et qui sont déjà bien développés. Dans le court-moyen terme, je pense que les universités vont vivre un déplacement d’élèves mais elles ne devraient pas autrement être trop affectées.

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